Travail et santé Dossiers

 Brochure "Stress -­ Harcèlement moral -­ Discriminations - Maltraitance au travail" (réactualisation mai 2014)

 

SOMMAIRE :
  • Les situations du mal au travail
    • Maltraitance sociale
    • Le travail construit-il notre santé ?
    • Comprendre pour agir, agir pour prévenir
    • Le stress
    • Le harcèlement moral au travail
    • Le harcèlement sexuel
    • Les discriminations
    • S’organiser pour se défendre
    • Des outils pour agir
    • Conclusion
  • Aide à l’action
    • Récapitulatif de la démarche à suivre
    • La démarche juridique
    • Modèles de lettre type
    • Tableaux récapitulatifs
    • Formation syndicale
  • Annexes
    • Fiche d’alerte OFCT
    • Juridique : directive UE de 89, délits code pénal
    • Accords : stress au travail, violences et harcèlement au travail
souffrances mentales

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Les situations du mal au travail

Maltraitance sociale

Une personne sur 3 prend des psychotropes, des antidépresseurs dans sa vie de travailleur (1 travailleur sur 5 souffre de troubles mentaux, comme la dépression ou l’anxiété, rapport OCDE du 12 déc. 2011) les accidents du travail ne diminuent pas, les maladies professionnelles, les souffrances psychosociales non plus. Bien au contraire, elles se sont massifiées. Ce n’est ni une question de métier, ni une question de statut, ni encore celle d’un secteur professionnel. Ainsi, pour la partie visible, ce sont les salariés qui sont malades quand le discours idéologique tend à faire croire que le travail ne serait que souffrance. Or, ce qui est en cause aujourd’hui, c’est le travail, ses conditions d’exercice, son management, ce qu’il véhicule dans son sens, sa finalité. C’est donc le travail qu’il faut soigner. Et il s’agit là d’une urgence sociale

Quelques repères

Années 70 : les choix législatifs opérés permettent de transférer les risques du marché sur le salariat c’est-à-dire d’ajuster les effectifs aux objectifs financiers attendus.

Années 80 : tout est en place pour une gestion des entreprises non plus pour produire ou proposer des services mais pour faire du cash, gagner de l’argent. C’est la financiarisation de l’économie et, pour en accroître la sphère, la marchandisation des besoins sociaux fondamentaux que sont l’éducation, la formation, la santé, la culture... Les outils d’accompagnement s’appellent plans sociaux, délocalisations, externalisations, décentralisation, déconcentration, régionalisation, restructuration…

Révolution langagière : il n’y a plus d’ascension sociale mais un ascenseur, plus de conflits mais des partenaires sociaux qui trouvent des solutions, plus d’ouvriers mais des opérateurs etc. Ce langage est au service de l’idéologie dominante : celle qui met en place un management qui doit avoir la capacité d’éradiquer l’idéologie de lutte des classes, celle encore qui assoit le seul critère du marché et du chantage à la guerre économique. Celle, enfin, qui tente d’imposer de nouveaux rapports sociaux et un autre rapport de chacun à son travail et à son employeur, définit les organisations du travail toujours accompagnées de modelage des valeurs et des modes de vie, orchestrant ainsi l’implication des salariés.

L’entreprise : elle s’est recentrée sur son cœur de métier, c’est-à-dire sur l’endroit où l’argent peut se gagner le plus vite possible et massivement.

L’État : c’est le dérégulateur. Il se démunit de ses moyens d’intervention, privatise tout ce qui est possible dans la fonction « opérateur », c’est-à-dire dans la production de biens ou de services, dans cette même logique de rentabilité couplée à celle du moindre coût.

C’est tout cela, en même temps, qui fait les dégâts engendrés par le travail

Au travail

Les repères sont faussés, chacun est traité comme un rouage capable de faire dégager du profit. Les injonctions et objectifs définis sont contraires à l’éthique professionnelle, aux règles du métier.

Simplement, il n’y a plus les moyens de faire le travail. Chacun est placé dans des situations violentes qui génèrent du stress, de la souffrance, du harcèlement pour celle ou celui qui ne plie pas aux dogmes. Chacun est condamné à en faire toujours plus, à faire le tri entre ce qu’il est indispensable et prioritaire de faire et ce qu’il faudra laisser de côté. La consigne c’est : « débrouillez-vous ». Les repères qui caractérisaient un travail bien fait sont dissous.

Chacun est isolé, fragilisé et doit faire face individuellement aux difficultés, le collectif de travail ne protège plus. La discussion autour du travail ne peut plus se faire, les métiers sont effacés. Ne plus pouvoir discuter règles du métier, ne plus pouvoir faire du bon travail fait qu’on ne se dispute plus à propos du travail, on se dispute uniquement entre personnes. Jamais il n’y a eu autant de conflits individuels, autant de problèmes de personnes, autant de démarches et procédures individuelles.

Toutes les politiques managériales ne visent et ne valorisent que le résultat obtenu, en négligeant, en méprisant les efforts investis. Elles imposent des objectifs que nous ne pouvons atteindre, faute de moyens et de ressources. C’est la culpabilisation qui domine et donc l’estime de soi qui est profondément atteinte. Et perdre la main sur son travail, fait perdre la main sur sa propre existence, d’autant que les collectifs de travail sont explosés par les politiques de sous emploi, que le soutien social est liquidé par les politiques d’individualisation et de précarité.

Le sur-travail, les gains de productivité sont obtenus par toutes ces pressions. La souffrance mentale est l’ingrédient nécessaire à l’assujettissement du corps.

Il est donc facile, pour les employeurs, d’organiser toutes ces souffrances …

Les conditions dans lesquelles s’exerce le travail ont un effet permanent sur la qualité de vie et sur sa durée, donc sur la durée et la « qualité » de la retraite.

Tous ces bouleversements profonds correspondent donc à des enjeux politiques, sociétaux très lourds. Parallèlement, les limites posées par le droit à la démocratie sur le lieu de travail créent de l’invisible, freinent les mobilisations, empêchent le réel contrôle social sur l’organisation du travail, ses finalités, son sens même. Et paradoxalement, sur le travail, il y a plus souvent des paroles éclatées que des expressions collectives.

Cette situation pose la question du type de syndicalisme que nous avons à développer. Ce n’est pas celui de la gestion de la souffrance, de l’acceptation d’une fatalité, ni celui de la traque « des plus faibles », de l’hygiénisme, de la mise en place d’outils pour soutenir les salariés ou de l’attente de la fin du capitalisme.

Penser l’émancipation

La CGT considère qu’il faut porter l’idée d’un processus social et humain. Il nous faut analyser le travail pour mieux pouvoir le défendre, produire de la liberté concrète au sein même du travail, pour développer les capacités d’intervention des travailleurs, dans sa réalisation, sa finalité, donc dans la finalité de l’entreprise. Il faut réduire la domination du salariat dans le travail, transformer le cadre dans lequel il s’exerce. Cela signifie qu’on ne peut mener les luttes pour l’emploi, les salaires, les garanties collectives sans connexion avec l’exercice même du travail et ses conditions de réalisation. Désarticuler ces 2 pôles signifie que, chaque fois qu’il y a appel à mobilisation, il y a aussi appel, indirectement, à continuer de souffrir au travail.

Cette brochure se veut un outil pour aider à reprendre la main sur le travail. Elle propose des démarches de nature à faire reculer les souffrances professionnelles, pour, collectivement, retrouver des marges de manœuvre, du bien être au travail. Pour gagner ce qui ne devrait jamais se négocier : l’intégrité physique et mentale des salariés. Pour reconstruire du pouvoir de dire, du pouvoir de débattre pour regagner du pouvoir d’agir.

Le travail construit-il notre santé ?

Le travail : un vecteur essentiel de la construction de notre santé

Pour travailler sur les causes, sur ce qui engendre les souffrances mentales, il faut revenir à ce qu’est le travail et à la façon dont on peut concevoir sa santé dans cet univers.

Le travail fait appel au désir. Cette définition peut surprendre mais il suffit de penser à ceux qui en sont privés pour resituer ce désir. C’est par lui que chacun(e) est reconnu sur le lieu de son exercice et par contrecoup dans la société.

Le travail est une contribution individuelle à une œuvre collective, c’est un élément central de la construction de l’identité de chacun, le rapport à l’autre se plaçant sur le savoir-faire et non pas sur le savoir-être. Donc se réaliser dans son travail, être reconnu pour avoir de l’estime pour soi, se sentir utile, mobiliser son énergie, sa compétence, son intelligence, constituent les facteurs incontournables pour être un individu en bonne santé physique, mentale, sociale.

Le travail salarié (l’emploi) est la "marchandisation" du travail qui s’exerce dans une relation sociale particulière : la subordination du travailleur à l’autorité patronale. Ce sont les employeurs qui définissent les buts et l’organisation du travail au prétexte qu’ils achètent la force de travail. Cela resitue, d’emblée, les responsabilités.

4 registres permettent de mesurer l’état de la construction ou de la dégradation de la santé, sur le lieu de travail.

  • Un environnement physique et mental sain. Le travail et son environnement respectent-t-il l’intégrité physique et mentale des salariés ?
  • Les marges de manœuvre. Est-ce que les salariés bénéficient suffisamment de marges de manœuvre spatiales et temporelles pour construire des stratégies de préservation de leur santé ?
  • Le sens. Est-ce que les salariés maîtrisent la nature de leur contribution, la finalité de leur travail, son sens, comme la finalité de l’entreprise, du service ?
  • La reconnaissance. Est-ce que les salariés sont reconnus dans leur travail, par leurs collègues, par la hiérarchie, par les usagers ?
NB : Chacun est unique et relève d’un parcours singulier mais toujours inscrit dans un contexte socio-historique et socio-économique. Le psychique n’est jamais déconnecté du physique. On peut souffrir psychiquement et engendrer des pathologies physiques. La question du respect, de la considération, est centrale pour tout(e) travailleur(euse). Il suffit qu’un seul de ces registres soit malmené pour que la santé commence à se dégrader… C’est lui qui peut être mis en débat avec les salariés…

Être en souffrance dans son travail conduit inévitablement à rechercher ce qui, dans sa réalisation, crée l’insatisfaction, engendre la déconstruction, la souffrance, puis la maladie.

Construire sa bonne santé est indissociable de la capacité d’agir !

Dans ce contexte, la santé n’a que 2 destins possibles : Sa construction ou sa régression. La santé n’est pas un état stable acquis définitivement. Elle ne se réduit pas à une absence de maladie.

C’est une conquête permanente. Et précisément cette action de conquête, parce qu’elle n’est pas centrée sur la maladie, contribue de manière déterminante à la combattre.

Comprendre pour agir, agir pour prévenir

La tâche de travail
C’est sa nature même qui peut générer de la souffrance mentale : activités monotones, répétitives, fortes sollicitations, pressions temporelles, recours intensif aux nouvelles technologies etc.

L’organisation du travail
La souffrance mentale est générée par l’absence de contrôle ou trop de contrôle sur la répartition et la planification des tâches, l’imprécision de la mission, la mauvaise communication, l’incompatibilité des horaires de travail avec la vie privée, le statut précaire, le manque d’objectifs définis, les exigences contradictoires etc.

Les relations de travail
Le manque de soutien de la part des collègues, de la hiérarchie, la non reconnaissance du travail effectué, l’isolement physique, culturel ou social…

L’environnement physique
Le bruit, la chaleur, le froid, l’humidité, les odeurs, la luminosité, la promiscuité dans les locaux etc.

L’environnement socio-économique
La mise en concurrence, la compétitivité, la mauvaise santé économique, les insuffisances budgétaires, les réseaux de transports, l’absence de crèches etc.

La prévention (primaire)
C’est rechercher la source, l’origine du risque pour l’éradiquer, remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou l’est moins.

Prévenir
C’est anticiper sur les évènements, c’est construire un point de vue critique sur son environnement au cœur duquel l’on place le développement, l’épanouissement, la santé humaine au centre de la finalité sociale.

L’action syndicale en prévention
C’est se permettre collectivement d’inventer autre chose ! C’est mettre en action les intelligences multiples et variées des syndiqués dans leur diversité pour mettre les salariés en état d’élaborer un autre monde et le moyen de le transformer et d’agir, à partir de la situation concrète dans laquelle ils vivent. Au nombre des acteurs, on doit pouvoir compter, a minima, sur le syndicat, le CHSCT, le médecin du travail (secteur privé) ou le médecin de prévention (secteur public).

Le syndicat
C’est lui qui doit (re)faire autorité sur la question du travail. C’est ce collectif qui peut être le repère, l’organisateur de l’espace et du temps pour que s’exerce la parole, que se livre le témoignage. C’est celui qui va casser l’isolement du salarié, recréer des liens sociaux, donner du sens et du contenu aux liens de solidarité entre les salariés. Il est ainsi sur sa fonction première et primordiale, la défense des intérêts matériels et moraux, individuels et collectifs du salariat. Sa pertinence réside dans sa capacité à ne pas banaliser, à prendre en compte, à socialiser le mal être,la souffrance, à permettre l’expression collective sur le travail. Car il faut mettre les réalités du travail en débat ! Pour autant, permettre l’expression ne règle pas la question, mais constitue un temps d’action syndicale incontournable et indispensable.

Le CHSCT
C’est l’ouill le plus « politique » des IRP (instances représentatives des personnels). C’est lui qui peut aller sur le terrain de l’organisation du travail, chasse gardée des employeurs. Il est dédié à discuter des conditions de travail, à faire le lien entre le travail et la santé, à rendre visible les problèmes, à analyser le processus organisationnel du travail qui engendre les souffrances. Il peut faire des propositions, y compris en "convoquant" l’apport de compétences techniques : expert, ARACT, CARSAT, inspecteur du travail…

Le délégué du personnel (DP)
Il a toute compétence pour intervenir en matière de harcèlement, de souffrance au travail, de discriminations. En effet, à partir de l’article L2313-2 du code du travail, il peut avoir un rôle décisif dans la lutte contre les agissements coupables. D’abord parce que le délégué du personnel peut s’autosaisir d’une affaire de harcèlement, souffrance au travail ou discrimination, ensuite parce qu’il est en capacité d’exiger que l’employeur fasse procéder à une enquête et prenne les mesures pour cesse le trouble illicite. Le DP qui saisit est nécessairement associé à l’enquête et en fixe les modalités avec l’employeur. Dans les entreprises dépourvus de CHSCT cela a son importance, tout comme dans celles qui en sont pourvus puisque c’est un moyen de déclencher à un autre niveau une action pour protéger les salariés (et donc d’accumuler éventuellement des preuves). Son action sera complémentaire ou/et en lien avec le CHSCT. De plus, le DP peut, en ce cas, es-qualité saisir l’inspection du travail et les prud’hommes...

Article L2313-2
Si un délégué du personnel constate, notamment par l’intermédiaire d’un salarié, qu’il existe une atteinte aux droits des personnes, à leur santé physique et mentale ou aux libertés individuelles dans l’entreprise qui ne serait pas justifiée par la nature de la tâche à accomplir, ni proportionnée au but recherché, il en saisit immédiatement l’employeur. Cette atteinte peut notamment résulter de toute mesure discriminatoire en matière d’embauche, de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de classification, de qualification, de promotion professionnelle, de mutation, de renouvellement de contrat, de sanction ou de licenciement. L’employeur procède sans délai à une enquête avec le délégué et prend les dispositions nécessaires pour remédier à cette situation. En cas de carence de l’employeur ou de divergence sur la réalité de cette atteinte, et à défaut de solution trouvée avec l’employeur, le salarié, ou le délégué si le salarié intéressé averti par écrit ne s’y oppose pas, saisit le bureau de jugement du conseil de prud’hommes qui statue selon la forme des référés. Le juge peut ordonner toutes mesures propres à faire cesser cette atteinte et assortir sa décision d’une astreinte qui sera liquidée au profit du Trésor.

Le médecin du travail ou de prévention
Il doit (il ne le fait pas forcément) aider à l’amélioration des conditions de travail dans le cadre de sa mission de prévention de la santé, analyser les stratégies de défense des salariés face aux agressions, prendre en compte les dégradations des conditions de travail pour pouvoir intervenir.

Syndicat, CHS/CHSCT, médecin, DP peuvent ainsi avoir en commun ce que disent les salariés quand ils réalisent le travail, prendre en compte les dégradations des conditions de travail pour pouvoir intervenir, modifier, protéger, sachant que l’employeur a l’obligation légale de protéger la santé physique et mentale des salariés (obligation de moyens et de résultat).

Construire sa santé, c’est puiser les capacités à diriger sa vie. Construire sa santé au travail, c’est reprendre la main sur son travail et sur son organisation.

Les souffrances mentales ont un coût.
Pour 15 États de l’Union européenne, le stress coûte, chaque année, 240 milliards d’euros, soit 3 à 4 % du PNB, une perte de 6,5 millions de jours ouvrés, 5,7 milliards d’euros à la société.

En France, les accidents du travail avec les maladies professionnelles (AT/MP) coûtent l’équivalent de 3% du PIB, soit 10 jours fériés par an. Le coût du stress en France est de l’ordre de plus de 2 à 3 milliards d’euros (absentéisme, dépenses de soins, cessations d’activité, décès, source INRS). Enfin, selon l’Agence européenne pour la santé et la sécurité au travail, le stress serait à l’origine de 50 à 60 % de l’absentéisme au travail.

Une étude de l’Observatoire de la vie au travail montre que 65% des salariés sont exposés au stress contre 55% l’an dernier, que les PME sont davantage épanouissantes (décembre 2011).

  • 60% des salariés évaluent défavorablement le climat social
  • 65% se sentent exposés au stress, contre 55% en 2009
  • 60,7% des personnes interrogées sont si stressées par leur travail qu’elles se sentent dépressives, insomniaques ou souffrantes. Cet état est fortement lié à l’organisation du travail.

D’après l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) avec l’institut CSA, le stress touche 41% des salariés en France. Ils sont 64% à en éprouver les symptômes : fatigue importante (37%), tensions musculaires (29%), difficultés à ne plus penser au travail une fois à la maison (28%), troubles du sommeil (25%), anxiété (25%), irritabilité (19%), maux de tête (17%) et baisse de vigilance (12%).

Il existe peu d’études en la matière mais les coûts se calculent en absentéisme, dépenses médicales pour santé dégradée, retraite anticipée pour problèmes de santé, mise en inaptitude, chômage à long terme, perte de compétences, de talents et d’envie des salariés, baisse de la productivité, taux de rotation des personnels plus important, décès… Sans oublier le poids économique du soin à la charge de la famille. Bref, le coût repose sur le salarié, sa famille, sur l’entreprise, l’établissement, toute la société.

Le stress

Le stress au travail est intégré dans l’appellation « Risques psychosociaux ». Il constitue, aux yeux du patronat, l’alpha et l’oméga de la souffrance au travail. C’est l’arbre qui cache la forêt de la maltraitance sociale. C’est ce qu’un employeur ne peut plus cacher. Plus de 50% des 160 millions de salariés des 15 États de l’UE s’en plaignent. En France, 1 salarié sur 3 déclare travailler dans l’urgence. Plus d’ 1 sur 3 déclarent être contraint d’appliquer des consignes ou recevoir des ordres contradictoires et 1 sur 3 déclare que les relations dans le travail s’accompagnent fréquemment de tensions…

Le stress est lié aux pénibilités du travail, à son intensification, aux pressions. Cela signifie que tous les postes sont à risques. Donc, nous préférons parler de risques socio-organisationnels plutôt que de risques psychosociaux, ce qui a l’avantage de mettre en cause les organisations du travail -leurs impacts sur les collectifs au travail- plutôt que les travailleurs eux-mêmes.

Parallèlement, ces « Risques Psychosociaux » sont bien souvent circonscris au seul stress, même si celui-ci est à la mode parce que beaucoup trop de salariés y sont confrontés.

On peut donc se demander ce que signifie l’intérêt qui lui est porté alors qu’il y a un quasi silence sur les pathologies affectant la santé mentale des salariés. Le stress n’est-il pas bien commode pour éviter de comprendre ce qui se passe réellement en matière d’anxiété, de tensions et pressions mentales, d’usure psychique, de souffrances chez ceux qui travaillent ? En clair, le stress ne doit pas masquer l’essentiel car il permettrait l’effet inverse, celui de compliquer l’identification des causes et donc de disqualifier d’emblée toutes interventions des travailleurs sur les organisations du travail, toutes politiques de prévention.

Le stress est une violence mais ces violences ne sont souvent vues que comme comportement individuel, sans connexion avec le travail, sans connexion avec ce qui les génèrent : la dissolution des collectifs de travail, la réduction des effectifs, la flexibilité, la précarité, la méthode d’individualisation de l’évaluation sur les performances, l’impossibilité de dépasser les contraintes du travail faute de moyens etc. Perçu comme problème individuel, il y aurait du bon comme du mauvais stress, donc des « bons salariés », les résistants, et les moins bons, voire les mauvais dont il faut se débarrasser.

En réponse, dans ce qui est généralement proposé pour traiter la question, on trouve une « micro » approche de la question, toujours centrée sur l’individu, d’où découle une démarche particulière pour affirmer la bonne conscience, pour coter le risque, minimiser les coûts.

En la matière et au regard des dégâts engendrés par le travail, la bonne intention, le curriculum laboris ne tiennent pas. Le stress appelle au contraire une approche « macro », organisée à partir d’un collectif et de son rapport avec le travail d’où doit découler une démarche collective et globale.

Ce qui est à l’ordre du jour, avec le stress, et plus largement les risques psychosociaux, c’est la question de la transformation du travail. L’enjeu est de gagner le droit d’épanouissement contre celui d’épuisement physique et/ou psychique.
C’est réfléchir et agir pour permettre aux salariés de se doter d’outils d’intervention afin qu’ils puissent se réapproprier le travail, son organisation, qui doit être repensée au regard des droits de l’homme, dans une articulation entre droits individuels et droits collectifs. Parce que, quand les garanties collectives vont bien, les salariés sont en bonne santé …

Attention : les employeurs créent de plus en plus de réunions, de cellules de travail, d’observatoires….. Sans que les syndicats aient le temps de la réflexion, de la préparation. Il ne s’agit donc pas de courir partout, de s’épuiser. Le syndicat doit déterminer ses priorités et objectifs, en n’oubliant pas que la seule instance réglementaire, c’est le CHSCT.

C’est quoi, être stressé au travail ?

C’est énoncer un constat, une conséquence, mais également un état : on parle à la fois d’une cause non véritablement identifiée, mais admise par l’entourage, et d’un état de tension dont on ne sait s’il est possible de le surmonter. C’est dire qu’on a élaboré une stratégie défensive contre une agression subie dont on ne discerne pas forcément les causes et les moyens de les supprimer. « Un état de stress survient lorsqu’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face. Bien que le processus d’évaluation des contraintes et des ressources soit d’ordre psychologique, les effets du stress ne sont pas uniquement de nature psychologique. Il affecte également la santé physique et la productivité de la personne qui y est soumis ». (Agence européenne pour la Sécurité et la Santé au Travail).

« Impose son environnement ». D’emblée, cette définition est plombée puisqu’elle présente l’environnement comme un état de fait, naturel, intangible. Or, c’est justement sur cet environnement qu’on peut et qu’il faut agir.

Le stress et ses conséquences : 3 phases

Phase 1 : L’organisme se prépare, augmentation de la fréquence cardiaque, de la tension artérielle, de la température corporelle …

Phase 2 : l’organisme se défend contre une situation qui se prolonge. Augmentation du taux de sucre dans le sang.

Phase 3 : l’organisme s’épuise. Douleurs physiques : coliques, maux de tête, douleurs musculaires, articulaires, troubles du sommeil, de l’appétit, baisse de la libido, sueurs, nervosité, crise de larmes, de nerf, excitation, angoisse, tristesse, sensation d’étouffement, perturbation de la concentration, etc.

Les symptômes s’aggravent quand la situation se prolonge encore, pouvant entraîner des altérations irréversibles de la santé : dépression nerveuse, risques cardio-vasculaires, diminution de la résistance aux infections, asthme, colites, désordres hormonaux, pathologies de la grossesse (ex : prématurité) etc.

La protection des salariés

Elle s’appuie sur les dispositions générales en matière de santé au travail, sur l’accord cadre européen de 2004.

Droit privé : article L.4121-1 à 5 du Code du travail. « Le chef d’établissement prend toutes mesures nécessaires pour assurer et protéger la santé des travailleurs de l’établissement ».

Droit public : loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, article 23. « Les conditions d’hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurés aux fonctionnaires durant leur travail » et le décret 2011-774

Accord cadre : signé sur le plan européen, il a été décliné en droit français par un ANI (accord national interprofessionnel). Il s’agit d’un accord, d’une recommandation et non d’une loi (le patronat y étant plus qu’hostile !) Cf. annexe, accord ANI stress.

Disposition concernant la prévention

Pour prévenir le stress au travail, l’employeur doit, normalement, mettre au point une organisation du travail saine pour les salariés. Or, c’est plus souvent parce que les salariés se plaignent que des mesures de prévention sont prises. La prévention primaire est rare.

La prévention primaire passe par l’adoption de mesures avant l’apparition des problèmes : repérer les situations pouvant générer du stress, mettre en place des dispositifs collectifs, repérer les salariés qui peuvent être exposés, améliorer les relations humaines etc.

La prévention secondaire : elle passe par la limitation des effets de situations stressantes. Les mesures à prendre peuvent être diverses.

La prévention tertiaire : elle passe par la réparation, la réadaptation de salariés fortement touchés. Là aussi, les mesures peuvent être diverses (ex : aménagement de planning, etc.).

Le harcèlement moral au travail

Qu’est-ce que le harcèlement moral ?

Le harcèlement moral au travail est un phénomène complexe, aux origines, formes et conséquences multiples, qui est pratiqué dans le but de nuire et de détruire une personne ou un groupe de personnes. C’est une forme de meurtre psychique. Ne relève pas du harcèlement moral : une nouvelle organisation du travail, de nouvelles contraintes professionnelles, conformes à la réglementation, le stress professionnel, lié à une exigence normale de résultat, c’est-à-dire accompagnée des moyens nécessaires à sa réalisation.

Les principales formes de harcèlement ?

Le harcèlement « institutionnel » et « stratégique »
Il est pratiqué dans une logique d’entreprise : aggravation des conditions de travail, mauvaise gestion des ressources humaines, management visant à mettre en concurrence les salariés entre eux, projet de restructuration, de fermeture, etc.

Le harcèlement professionnel
Il est mis en œuvre pour se débarrasser d’un salarié qui gêne et le pousser à la démission, dans le but de contourner certaines procédures légales et éviter le coût d’un licenciement.

Le harcèlement individuel
Il est lié à la volonté du harceleur de nuire et de détruire l’autre, pour valoriser son propre pouvoir. Les cas de harcèlement moral relèvent rarement de la perversité (environ 1%) et même dans ces cas, il faut revenir au harcèlement institutionnel et professionnel pour comprendre le processus.

Les principaux types de harcèlement

  • Verticaux descendants : d’un supérieur hiérarchique vers un subordonné
  • Horizontaux simples : d’un travailleur vers un autre travailleur
  • Horizontaux collectifs : d’un groupe de travailleurs vers un collègue
  • Verticaux ascendants : d’un ou plusieurs salariés vers leurs supérieurs hiérarchiques (plus rares).

Le harcèlement moral : 2 phases

1ère phase : les personnes concernées peuvent prendre à la légère les allusions, sous entendus, reproches, pressions, vexations, humiliations, intimidations, rétentions d’informations, brimades, mensonges, non dits, etc. A ce stade, il n’y a pas encore de symptômes.

2ème phase : ces attaques se multiplient de plus en plus souvent et la victime est régulièrement soumise à des comportements, actes, paroles, écrits, gestes hostiles et dégradants, ou mise en situation d’infériorité.

Les conséquences

Il est très fréquent que les victimes soient placées en arrêt de travail par leur médecin traitant (seul habilité à faire) pendant plusieurs semaines, mois ou années, pour isoler la victime du harceleur et lui permettre de récupérer physiquement et mentalement.

  • Stress post traumatique pouvant aboutir à une névrose traumatique et à un stress chronique. Le harcèlement constitue un traumatisme, comme un accident d’avion, une attaque à main armée ou un viol.
  • État dépressif permanent et incapacité à poursuivre son activité professionnelle. Il s’ensuit une succession d’arrêts maladie, de reprises et de rechutes.
  • Anxiété généralisée et permanente avec état d’appréhension, de peur, entretenu par d’incessantes agressions. Terreur à l’idée de retourner sur le lieu de travail, de rencontrer le harceleur, crises d’angoisse aiguës.
  • Dépression nerveuse professionnelle, résistant dans beaucoup de cas, aux antidépresseurs avec humeur triste, sentiment de dévalorisation, d’infériorité ou de culpabilité excessif ou inapproprié, perte de tout désir et manque d’intérêt pour tout.
  • Maladies cardio-vasculaires
  • Troubles digestifs, endocriniens, fonctionnels et maladies psychosomatiques, hypertension artérielle incontrôlable malgré un traitement , gastralgie, colites, ulcère, amaigrissement spectaculaire ou prise de poids importante et rapide, problèmes thyroïdiens, maladies de la peau, fatigue, nervosité, malaises ,migraines, vertiges, lombalgies.
  • Troubles du sommeil, troubles de la mémoire et de la concentration, inhibition intellectuelle, difficultés à s’affirmer, manque de confiance amenant à se justifier en permanence. Troubles du caractère, de l’identité et de la personnalité, sentiments de peur, de culpabilité, d’incompréhension, d’infériorité, d’incompétence, de confusion, de doute.
  • Attitude de désistement et d’isolement volontaire, augmentation de la consommation d’alcool et de tabac.

Harcèlement et maladies professionnelles

Le harcèlement moral fait partie de la violence au travail, ce qui constitue un risque professionnel qui doit être considéré comme une maladie professionnelle ou un accident de travail. Le Conseil Économique et Social a considéré que les pathologies psychiques et psychosomatiques développées à la suite d’un harcèlement, devaient pouvoir faire l’objet d’une procédure de reconnaissance en maladie professionnelle sur expertise médicale individuelle, même si la victime n’a pas un taux d’incapacité permanente égal ou supérieur à 66%.

Ainsi, les maladies qui ne sont pas mentionnées dans les tableaux des maladies professionnelles, ou celles qui ne remplissent pas toutes les conditions y figurant, peuvent néanmoins être considérées comme des maladies à caractère professionnel (MCP) si une expertise médicale, diligentée par un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, se prononce en ce sens.

Jurisprudence

La chambre sociale de la cour de cassation a estimé qu’une série de brimades gratuites étaient bien à l’origine de la dépression d’une salariée et constituaient donc des actes de harcèlement moral. Quand les agissements de harcèlement moral reposent sur un manquement de l’employeur à ses obligations, la rupture du contrat peut lui être imputée.

La protection des salariés

Droit privé : article L. 1152 du code du travail

  • Interdit le harcèlement moral (alinéa l).
  • Interdit tout licenciement et toute sanction liés aux agissements et actes de harcèlement moral (alinéa 2).
  • Déclare nul toute disposition ou acte contraire qui résulterait d’un harcèlement moral (alinéa 3). La nullité ne vise pas seulement les décisions les plus outrancières (sanction et licenciement), mais aussi les mesures les plus insidieuses (retard dans l’avancement, refus d’accès à une formation).
  • Protège les personnes ayant témoigné ou relaté des faits de harcèlement moral (alinéa 2).

Cet article, qui reprend les dispositions de l’article L. 122-46 du code du travail relatif au harcèlement sexuel, créé une nouvelle catégorie de nullité de licenciement ainsi qu’un nouveau motif de discrimination.

Droit public : l’article 178 de la loi du 17.1.2002 transpose l’article 122-49 du Code du travail et reprend, à quelques différences près, mais en les adaptant, le dispositif incorporé aux articles cités ci-dessus du code du travail. Il introduit à cet effet, un article 6 quinquies à la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. « Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet, ou pour effet, une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel « .
Un arrêt du Conseil d’État du 11 juillet 2011 répare la charge de la preuve qui incombe à la victime. Cet arrêt de la Haute juridiction administrative fera date.
Le fonctionnaire ne devra plus faire la preuve qu’il a été victime d’un harcèlement moral, il devra établir les faits qui permettront de "présumer l’existence d’un harcèlement".
Ce sera à l’administration de produire, en sens contraire, une "argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement."

Dispositions concernant la prévention

Obligation de prévention des employeurs : la reconnaissance du harcèlement moral au travail aboutit à une obligation de prévention à la charge de l’employeur, qui a aussi une obligation de résultat. L’employeur doit donc protéger la santé physique et mentale de ses salariés.

Droit privé : Article L.1152-4 du Code du travail (article 169.1 de la loi) « il appartient au chef d’entreprise, de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements constitutifs du harcèlement moral ». Cette obligation générale de prévention, est susceptible d’engager la responsabilité de l’employeur, qu’il soit ou non auteur du harcèlement.
Article L. 4121 du Code du travail (article 173 de la loi) « le chef d’établissement prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs de l’établissement ».

Droit public : l’administration a un devoir de protection de ses agents en application de l’article II de la loi du 13.7.83. Ce devoir de protection concerne la santé physique et mentale de l’agent.

La mise en œuvre de la prévention

Les signaux de prévention internes pour :

Déterminer l’existence de situations de harcèlement moral, dommageables pour la santé des agents, mais également pour le bon fonctionnement du service,
Mettre en œuvre une procédure permettant aux agents d’avoir un interlocuteur sur les questions de harcèlement moral au travail.

L’utilisation des droits d’alerte et de retrait

L’article 176 de la loi du 17.1.2002 de modernisation sociale étend aux cas de harcèlement moral, l’application du droit d’alerte reconnu aux délégués du personnel par l’article L.2313-2 du code du travail. Cf. annexe

Le droit d’alerte et de retrait permet d’arrêter le travail en raison de la dangerosité potentielle présentée par la poursuite de l’activité, et de contraindre l’administration ou l’employeur à respecter leur obligation générale de prévention et de sécurité.
Les droits d’alerte et de retrait permettent donc aux salariés de contraindre l’administration ou l’employeur à respecter l’obligation générale de sécurité dont ils ont l’obligation.
Aucune sanction ou retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un agent ou d’un groupe d’agents qui a fait un usage raisonnable du droit de retrait (article 231.8.1. du Code du travail).
Lorsque le harcèlement moral est dénoncé par la victime, un représentant du personnel, ou le syndicat, la personne qui en a été informée et qui, bien qu’ayant le pouvoir hiérarchique de faire cesser les agissements et actes de harcèlement, n’a rien fait pour que celui-ci cesse, peut être considérée complice et punie sévèrement.

Attention !
Si le danger n’est pas grave et imminent, ce sont les autres canaux normaux qui sont à utiliser. Dans le dispositif individuel de l’alerte, il faut avoir un motif raisonnable de danger grave et imminent (L.4131-2, L.4132-2 et L.4132-3) pour exercer le droit de retrait ; en d’autres circonstances, ce sont les autres canaux.

Les sanctions

Sanctions civiles

L’article L 1152 -5 du code du travail (article 169 de la loi du 17.1.2002) précise que « tout salarié auteur d’un harcèlement est passible d’une sanction disciplinaire ».

Sanctions pénales
L’article 222-33.2 du code pénal (article 170 de la loi du 17.1.2002) précise que :
« Le fait de harceler une personne par des agissements répétés ayant pour objet, ou pour effet, une dégradation des conditions de travail, susceptible déporter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale, ou de compromettre son avenir professionnel est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende ».

Cette disposition ne supprime pas la présomption d’innocence en vigueur en matière pénale. Dans sa décision n°2001-455 DC du 12.1, 2002 -JO du 18.1, le Conseil Constitutionnel a rappelé que si les deux sanctions étaient admissibles, leur éventuel cumul ne devait pas entraîner de sanction supérieure à la peine légale la plus sévère.
Le cumul des deux sanctions ne peut donc entraîner un emprisonnement de plus d’un an et une amende supérieure à 15 000 euros.

Le tribunal peut ordonner, aux frais de la personne condamnée, l’affichage du jugement dans les conditions prévues à l’article 131-35 du code pénal et son insertion dans les journaux.
Le tribunal peut, par ailleurs, prononcer l’ajournement du prononcé de la peine en cas de poursuites pour infraction aux dispositions relatives au harcèlement moral ou sexuel (article 152-1-2 du Code du travail), dans les conditions prévues aux articles 132-58 à 132-62 du code pénal, et sous réserve de mesures particulières.

Rétroactivité des sanctions
L’application rétroactive de ces sanctions n’est pas possible. Les conventions internationales comme le droit français s’opposent formellement à une telle pratique. Même s’il peut paraître injuste aux victimes d’actes de harcèlement moral, ce principe de non rétroactivité vise à éviter que soient bafoués les droits de la défense. Les auteurs de faits de harcèlement moral n’échappent pas pour autant à toute sanction pour les faits antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi de modernisation sociale du 17.1.2002.
En effet, il existe d’ores et déjà dans le Code pénal plusieurs dispositions susceptibles d’être invoquées dans certaines situations de harcèlement moral :
L’article 222.33 relatif au harcèlement sexuel (qui est parfois une composante du harcèlement moral).
L’article 226-1 relatif à l’atteinte à la vie privée, l’article 225-2 relatif aux discriminations, notamment celles entravant l’exercice d’une activité,
L’article 223-13 relatif à la provocation au suicide pour les cas les plus dramatiques, mais surtout l’article 225-14 qui sanctionne les conditions de travail contraires à la dignité de la personne. Cf. annexe Accord harcèlement, violences au travail.

Élément permettant de présumer l’existence d’un harcèlement moral

Une mauvaise ambiance de travail et la tenue de propos agressifs et dévalorisants reconnus par l’employeur, laissent présumer l’existence d’un harcèlement.
Est sans cause réelle et sérieuse, le licenciement d’une salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement, lorsque l’inaptitude est consécutive à des faits de harcèlement moral commis par la supérieure hiérarchique, elle-même licenciée par l’employeur en raison de ces faits.
La salariée victime d’un harcèlement moral peut contester la cause réelle de son licenciement fondé sur son inaptitude, en présentant la lettre de licenciement adressée par l’employeur à l’auteur du harcèlement..
Selon la Cour de cassation, présume de l’existence d’un harcèlement moral, le fait pour l’employeur de reprocher dans la lettre de licenciement adressée à l’auteur présumé des faits de harcèlement moral :

  • son attitude générale incompatible avec les fonctions d’une directrice de région,
  • son comportement agressif et dévalorisant qui se traduisait, notamment par :
    • la profération de propos tels que "vous me faites chier", "cela ne pourra jamais marcher avec vous car je ne vous ai pas choisis et je ne vous ai donc pas formés à mon image",
    • la déresponsabilisation, notamment en invitant régulièrement les salariés à s’adresser à la direction,
  • ses pratiques managériales, non conformes aux valeurs de l’entreprise, se traduisaient par :
    • des propos dévalorisants et vulgaires ("C’est un travail de merde", "Sortez-vous les doigts du cul et allez bosser")
    • l’instauration d’une mauvaise ambiance de travail au sein de l’équipe.

En conséquence, en reconnaissant qu’un salarié a instauré une mauvaise ambiance de travail, tout en tenant des propos agressifs et dévalorisants, et en le sanctionnant, l’employeur atteste que les faits présumés de harcèlement moral invoqués par un autre salarié sont avérés. Aucun salarié ne peut être licencié en raison des faits de harcèlement moral qu’il a subis, dès lors que ce sont ces faits qui sont à l’origine de son inaptitude à reprendre le travail (Cass. / Soc. 29 septembre 2011 - pourvoi n°10-12722).

Le harcèlement sexuel

La loi n° 2012-954 du 6 août 2012 instaure une nouvelle définition plus précise du harcèlement sexuel à la fois dans le code pénal, dans le code du travail et au sein du statut de la fonction publique, assortie de sanctions plus lourdes et conforme au droit européen. Elle harmonise les dispositions législatives relatives au harcèlement sexuel. Elle élargit la protection contre les discriminations, renforce l’obligation de prévention qui incombe notamment à l’employeur et les droits des associations.

Code pénal, article 222-33

Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle qui :

  • soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant,
  • soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante.

Est assimilé au harcèlement sexuel le fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers (exemple du chantage sexuel).

Sanctions

Ces faits sont punis de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. De plus, cinq circonstances aggravantes portent les peines encourues à 3 ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende lorsque les faits sont commis :

  • par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions,
  • sur un mineur de 15 ans,
  • sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de leur auteur,
  • sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de leur auteur,
  • par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice.

Protection élargie contre les discriminations

La loi incrimine les discriminations faisant suite au harcèlement sexuel, commise à l’encontre de la personne harcelée ou de la personne témoin, même si la discrimination fait suite à un acte unique de harcèlement, en affirmant que ces agissements constituent un cas de discrimination, à l’instar du handicap ou de l’origine.
Elle introduit un nouveau motif de discrimination dans l’article 225-1 du code pénal (ainsi que dans tous les codes et textes faisant référence aux discriminations, le code du travail, du sport, le statut de la fonction publique, la loi sur la presse) : il s’agit de l’identité sexuelle afin de lutter contre la transphobie.

Si dans le code du travail, la protection contre les discriminations liés au fait d’avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement sexuel ou d’avoir témoigné de tels faits existait déjà (article L 1153-2 et L 1153-3 du code du travail), elle est désormais élargie aux personnes en formation ou en stage (comme celles concernant le harcèlement moral). (Ainsi par exemple, le refus de promotion ou sanction octroyée à une salariée suite à un refus de harcèlement sexuel).

Obligations de l’employeur
Il doit intégrer à la planification de la prévention des risques professionnels ceux liés au harcèlement sexuel. Il doit également afficher les textes du code pénal sur le harcèlement moral et le harcèlement sexuel sur les lieux de travail (ainsi que sur la porte des locaux où se fait l’embauche pour celui sur le harcèlement sexuel). L’inspection du travail peut constater les délits de harcèlement sexuel.

Les délégués du personnel
Ils peuvent exercer leur droit d’alerte en cas de faits de harcèlement sexuel ou moral.

Les services de santé au travail
Ils conseillent les employeurs, les salariés, les représentants du personnel sur les dispositions et mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement sexuel ou moral.

Droit public – article 6 ter de la loi 13 juillet 1983, circulaire du 4 mars 2014

« Aucun fonctionnaire ne doit subir les faits :
« a) Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;
« b) Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers.
« Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l’affectation et la mutation ne peut être prise à l’égard d’un fonctionnaire :
« 1° Parce qu’il a subi ou refusé de subir les faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas, y compris, dans le cas mentionné au a, si les propos ou comportements n’ont pas été répétés ;
« 2° Parce qu’il a formulé un recours auprès d’un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces faits ;
« 3° Ou bien parce qu’il a témoigné de tels faits ou qu’il les a relatés.
« Est passible d’une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou enjoint de procéder aux faits de harcèlement sexuel mentionnés aux trois premiers alinéas.
« Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public.
 »

Loi du 6 août 2012 de la notion d’« identité sexuelle « , article 6 de la loi du titre I du statut général, comme circonstance aggravante des infractions mentionnées dont est victime une personne transsexuelle.

Le harcèlement sexuel prévu à l’article 6 ter de la loi du 13 juillet 1983 précitée est passible d’une sanction disciplinaire, sans préjudice des sanctions pénales pouvant être par ailleurs appliquées, conformément aux dispositions du code pénal. En effet, les procédures disciplinaires et pénales sont indépendantes l’une de l’autre.

Les discriminations

Définition

«  » alinéa 5 du préambule de la Constitution.

Être discriminé, c’est subir un traitement différent, défavorable, au nom de son origine, sa situation de famille, son sexe, apparence physique (taille, poids, esthétique), son patronyme, handicap, âge, orientation sexuelle, opinions politiques, religieuses, syndicales, philosophiques, son état de santé, son appartenance à une ethnie, une nation.

La lutte contre les discriminations concerne l’ensemble du déroulement de la carrière professionnelle : recrutement, titularisation, formation, notation, promotion, affectation, mutation, candidature à un stage, demandes d’emploi, rémunération, renouvellement de contrat, classification, qualification.

Les directives européennes 2000/43 du 29 juin 2000 et 2000/78 du 27 novembre 2000 distinguent les discriminations directes et indirectes.

Discriminations directes : elles se produisent lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable.

Discriminations indirectes : elles se produisent lorsqu’une disposition, une pratique, un critère apparemment neutre est susceptible d’entraîner un désavantage particulier pour des personnes d’une catégorie donnée par rapport à d’autres personnes. Elles ne sont pas reconnues si le critère, la pratique … sont justifiés par un objectif légitime, que les moyens utilisés pour parvenir à cet objectif sont appropriés et nécessaires.

La protection des salariés

Article L.225-2 du Code pénal.
Loi de modernisation sociale du 16 novembre 2001
Jurisprudence de la cour de cassation

Droit privé : article L.1132 du Code du travail
Aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement, aucun salarié ne peut être sanctionné ou licencié en raison de sa origine, son sexe, de ses mœurs, de sa situation de famille, de son appartenance à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses ou, sauf inaptitude constatée par un médecin du travail dans le cadre du titre V du livre II du présent code, en raison de son état des santé ou de son handicap ».

Droit public : loi n° 83-634 du 13 juillet portant droits et obligations des fonctionnaires
« Les fonctionnaires bénéficient, à l’occasion de leurs fonctions, d’une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales ». D’autre part, « la collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, les violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l’occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ».

Cour de justice européenne : le droit européen a cerné la non- discrimination par l’échelle des preuves. La règle d’égalité de traitement prohibe toutes les formes de discrimination, même camouflées. La notion de discrimination indirecte (sexe) se retrouve dans toutes les directives. La force du principe de non-discrimination a ses limites, même en droit communautaire : des comparaisons sont impossibles, il faut une source unique de comparatif.

La directive UE 2000/43 du 29 juin 2000, transposée dans la loi du 30 décembre 2004 concerne l’égalité de traitement entre les personnes, sans distinction de race ou d’origine ethnique. Elle est également transposée partiellement dans le Code du travail, dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires – loi n° 2001-1066 du 16 novembre 2001-.

La loi du 30 décembre 2004 étend le principe de l’égalité de traitement à toutes les matières visées par la directive : protection sociale, santé, avantages sociaux, éducation, fourniture et accès aux biens et services, affiliation et engagement dans une organisation syndicale ou professionnelle.

La loi du 30 décembre 2004 a été enrichie d’un second volet portant sur la lutte contre les propos discriminatoires à caractère homophobe, sexiste ou handiphobe. Les délais de prescription sont les délais du droit commun, à savoir 3 mois à compter du jour où les faits ont été commis ou du jour du dernier acte d’instruction ou de poursuite.

La charge de la preuve

C’est au salarié, la victime, de faire la preuve des agissements de son employeur (témoignages, tableau comparatif ….).
La Directive 97/80/CE du Conseil, du 15 décembre 1997, relative à la charge de la preuve dans les cas de discrimination fondée sur le sexe précise que, dès lors que la partie demanderesse établit devant une juridiction ou une autre instance compétente des éléments de fait qui permettent de présumer l’existence d’une discrimination, il incombe à la partie défenderesse de prouver qu’il n’y a pas eu violation du principe d’égalité.

La discrimination peut se prouver par tous moyens, sauf ceux obtenus de façon déloyale : enregistrements à l’insu de la personne, documents de l’employeur obtenus hors exercice des fonctions.
La preuve testimoniale consiste à faire établir, par écrit, une attestation par un témoin. Celui-ci doit raconter avec précision les faits, doit joindre à sa déclaration une photocopie d’un document d’identité.
Selon l’article L.1132, « aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements définis aux alinéas précédents ou pour les avoir relatés ». Le témoignage en justice d’un salarié, ne peut constituer un abus, une faute, ni une cause de licenciement (Cour de cassation). En cas de licenciement, la réintégration est de droit. Cf. annexe de témoin.

La constatation des faits et action en justice

La victime peut écrire directement au procureur, lequel peut décider d’une enquête.
Elle peut saisir l’organisation syndicale qui peut ester en justice (à condition d’être représentative sur le plan national ou dans l’entreprise). Elle peut agir à la place de la victime, sous mandat de l’intéressé. Il suffit de l’avoir informé par écrit, qu’il ne se soit pas opposé à l’action dans les 15 jours.
Les délégués du personnel disposent du droit d’alerte.
Les associations peuvent aussi ester en justice, si elles relèvent de la lutte contre les discriminations, si elles sont constituées depuis 5 ans au moins et justifient d’un accord avec l’intéressé.
Les inspecteurs du travail peuvent se faire remettre tout document ou information utile à la constatation des faits, peut s’entretenir avec les salariés mais ne peut les obliger à témoigner.
NB : à ce sujet, voir la partie démarche juridique

Autres dispositions

Les listes présentées aux élections prud’homales par un parti politique ou une organisation syndicale, prônant la discrimination, ne sont pas recevables.
Les éléments relatifs à la discrimination raciale constituent une clause obligatoire dans les conventions de branche.

Le défenseur des droits (ex Halde : Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité)

Depuis 2011, la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde) a fusionné avec d’autres organismes et s’appelle désormais « défenseur des droits ».

La saisie : un salarié, une entreprise, syndicat, comité d’entreprise, société… peuvent le saisir Il peut l’être directement, en ligne, sur le site. Il suffit de taper « défenseur des droits ».
Les associations peuvent également la saisir, avec l’accord du salarié, à condition d’avoir 5 ans d’existence déclarée à la date des faits, avoir dans ses statuts le combat contre les discriminations, l’aide aux victimes de discriminations.

Il existe des délégués territoriaux dans chaque département. Ceux-ci vérifient si votre réclamation relève de la compétence du Défenseur des droits et si elle est recevable. Selon les cas, une réponse est apportée au niveau local ou national, en collaboration avec les équipes du Défenseur des droits. Les délégués peuvent être rencontrés, ils sont présents dans les préfectures, sous-préfectures, maisons de justice et du droit, maisons de service public.
Vous pouvez obtenir une carte de l’implantation géographique des délégués, toujours sur le site.

Les sanctions

Sanctions civiles

C’est le principe de la nullité des mesures discriminatoires, c’est à dire leur disparition rétroactive et la remise du salarié dans la situation qui était la sienne avant le prononcé de la mesure déviante, sauf discrimination à l’embauche qui relève de l’octroi de dommages et intérêts.

Sanctions pénales
  • 2 ans d’emprisonnement, 30 000 euros d’amende (article 225-2 du Code pénal), avec possibilités de peines complémentaires :
    • interdiction du droit d’éligibilité pour une durée de 5ans maximum ;
    • interdiction d’exercer une fonction juridictionnelle, d’être expert devant une juridiction, de représenter ou assister une partie devant la justice pendant 5 ans maximum ;
    • affichage ou diffusion de la décision prononcée à la charge du condamné à condition que les frais ne dépassent pas le maximum de l’amende encourue ;
    • fermeture pour une durée de 5 ans au plus ou à titre définitif, de l’un de plusieurs établissements appartenant à la personne condamnée ;
    • exclusion des marchés publics définitivement ou pour 5 ans au plus.
  • 1 an d’emprisonnement et /ou 45 000 euros d’amende pour les personnes qui ont :
    • publiquement provoqué à la haine, à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap et/ou de 45 000 euros ;
    • refusé de fournir un bien, un service, entravé l’exercice normal d’une activité économique, refus d’embaucher, prononcé de sanctions ou licenciement, refus d’accès à un stage de formation, de réadaptation fonctionnelle ;
    • refusé le bénéfice d’un droit accordé par la loi ou d’entraver l’exercice normal d’une activité économique (dépositaire de l’autorité publique, personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice de ses fonctions).
  • Pour les diffamations, injures publiques, la poursuite peut être exercée d’office par le ministère public si elles ont été commises envers un groupe de personnes à raison de leur sexe ou orientation sexuelle. La poursuite d’office peut aussi s’exercer si les injures /diffamations ont été commises envers des personnes considérées individuellement, à la condition que celles-ci aient donné leur accord.
    • 1 an d’emprisonnement et/ou 45 000 euros d’amende pour diffamation commise par discours dans des lieux ou réunions publics, voie de presse, tout moyen de communication au public par voie électronique, envers une personne ou un groupe à raison de leur sexe/orientation sexuelle.
    • 6 mois d’emprisonnement et/ou 22 500 euros d’amende pour l’injure publique commise envers une personne ou un groupe à raison de leur sexe ou orientation sexuelle, ou handicap (l’injure est définie comme toute expression outrageante, terme de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait).

S’organiser pour se défendre

Accueillir, orienter et défendre les victimes de souffrances mentales, c’est utiliser au mieux les possibilités ouvertes par la loi, en combinant l’action collective avec l’action juridique dont l’enjeu est aussi d’améliorer la jurisprudence, donc les droits collectifs.

Le salarié

C’est ne pas resté isolé sur son lieu de travail. C’est trouver de l’aide, prendre contact avec le syndicat, ou, s’il n’existe pas sur le lieu de travail, avec l’Union locale, départementale…
C’est se syndiquer pour protéger sa santé, sa vie !
C’est aussi, si la difficulté est déjà importante, se retirer de son lieu de travail en sollicitant un arrêt de travail auprès de son médecin de ville. Il est important d’expliquer à celui-ci le lien qui existe entre la dégradation de l’état de santé et le travail (lui demander de l’attester par écrit). Le salarié doit rester maître de son dossier, de sa situation. C’est une posture essentielle pour se reconstruire, se remettre en mouvement, reprendre la main sur sa vie.

Le syndicat

La lutte contre la souffrance au travail, pour la préservation de la santé mentale, la reconquête du bien-être au travail doit être un objectif central de notre organisation syndicale. Pour accomplir cette mission, des compétences spécifiques élargies ont été attribuées aux représentants et délégués du personnel. Cette lutte doit se conjuguer avec le CHSCT, pour aider à rendre intelligible une situation de souffrance au travail.

Le syndicaliste

Il propose l’écoute et l’action, il agit dans le cadre de sa mission, celle de l’étude et la défense des droits et intérêts matériels et moraux, individuels et collectifs des travailleurs.

Nos compétences syndicales

  • Aider le salarié à retisser des liens, à renouer avec un collectif.
  • Aider à la déculpabilisation en resituant les causes et responsabilités.
  • Permettre au salarié de redevenir acteur de la construction de sa santé.
  • Réfléchir à une démarche syndicale collective tout en respectant les choix du salarié.
  • Rechercher les coopérations avec d’autres acteurs et institutions internes et externes à l’entreprise, l’établissement, basées sur une approche pluridisciplinaire fondée sur les sciences du travail, de la santé et du droit.

Des outils pour agir

Mission du Comité d’Hygiène, de Sécurité, des Conditions de travail (Article 7-1 de la loi n° 93-121)

L’article L 4612 (droit privé) et le décret 2011-774 (droit public) précisent que le CHSCT a pour mission de contribuer à la protection de la sécurité et de la santé « physique et mentale » des travailleurs.

Ils prévoient que le CHSCT peut proposer des actions de prévention en matière de risques psychosociaux.

Rôle du médecin du travail (droit privé) ou de prévention (droit public)

A la C.G.T. nous considérons que les actions préventives doivent être privilégiées pour éviter ou diminuer les actions curatives (après les faits). Agir en curatif, ou lorsque les faits sont établis et reconnus, représente déjà un échec.

Poser le problème de la prévention, c’est aussi poser une question centrale, de quelle médecine du travail ou de prévention les personnels ont- ils besoin ?

Le médecin du travail ou de prévention est le conseiller de l’administration ou de l’employeur, des personnels ou salariés, des représentants ou délégués du personnel, des services sociaux. Sa mission principale est de prévenir toute altération de la santé des agents du fait de leur travail, et de vérifier la compatibilité des conditions de travail de l’agent avec son état de santé. Il occupe donc une place centrale et a un rôle majeur dans notre système de prévention et de lutte contre le harcèlement moral au travail, les discriminations. Il faut surtout le solliciter, lui demander d’analyser les postes de travail, d’être sur le terrain.

L’inspection du travail (Article L.8112-1 du Code du travail, droit privé)

Elle est chargée de veiller au respect des normes sociales d’origine légale, réglementaire, conventionnelle. Les inspecteurs et contrôleurs du travail peuvent donc constater les infractions à ces dispositions.
Ils sont dotés de nombreux moyens pour mener à bien leurs missions de contrôle : entrée libre dans les entreprises, droit de se faire présenter tout document, livre, registre, obligatoirement tenus par l’employeur, droit de procéder à des enquêtes.

Les ARACT (droit privé et public)

Ce sont 25 associations, réparties régionalement, dans le cadre du réseau de l’ANACT (Association Nationale d’Amélioration des Conditions de Travail).

Ses missions
  • Aider les entreprises publiques et privées, services publics, à développer des projets innovants touchant au travail et à son organisation.
  • Améliorer la situation de travail des salariés et l’efficacité des entreprises, services.
  • Favoriser l’appropriation de méthodes correspondantes par tous les acteurs concernés.
Ses champs d’intervention

Ils sont déterminés par un Contrat de progrès signé avec l’Etat, pour 5 ans.
La réflexion et l’activité sont structurées autour de projets. L’Anact est un outil de veille active sur l’évolution des organisations et conditions de travail, sur les expériences et méthodologies de changements innovantes, sur les politiques mises en œuvre, le rôle des différents acteurs, les questions nouvelles posées lors de ses interventions. Son intérêt porte également sur les composantes professionnelles du stress et des troubles psychosociaux.

Ses modes d’action
  • Des interventions courtes, gratuites (en deçà de 3 jours).
  • Des apports d’outils et de méthodes pour la conduite de projets d’entreprises, le suivi de groupes de travail, l’aide à l’expérimentation des projets sur une longue durée et évaluation de l’impact (payant).
  • Des formations conçues pour tous les acteurs de l’entreprise/service, les intervenants extérieurs.
  • Des actions collectives territoriales, de branches ou interprofessionnelles destinées aux PME et TPE.
  • Des études permettant de mieux comprendre le contexte et les effets des interventions.
  • La collaboration avec les partenaires institutionnels des entreprises dans le domaine de l’emploi, de la formation professionnelle

Attention
Certaines associations régionales peuvent porter un autre intitulé qu’Aract. Exemple : Fact, Midact, Act, Arvise, Actal, Cestp, Antenne Anact.

L’Aract est un organisme neutre. Vous pouvez donc la solliciter pour un diagnostic, afin qu’elle détermine les causes engendrant des souffrances mentales. Il faut l’accord de l’employeur.

A la C.G.T. nous considérons que la prévention passe avant tout par des actions d’information, de réflexion et de formation, auprès de tous les salariés.

Conclusion

Nos choix sont simples : soit compter le nombre d’exclus, malades, accidentés…. soit reprendre la main sur le travail. Nous devons, ensemble, comprendre le travail et réinjecter du droit pour retrouver des marges de manœuvre, sachant que l’enjeu de transformation est indissociable de celui de l’intervention des premiers concernés : les salariés,

Réfléchir à ces questions, c’est poser le débat en d’autres termes que ceux de pseudo division entre réformistes et révolutionnaires. Parler du travail, c’est nous protéger d’un syndicalisme d’accompagnement qui se contenterait de quelques discours critiques et qui, dans les faits, jouerait les voitures balais du système. Nous appuyer sur les exigences des travailleurs et leur reconnaissance, fonde, de fait, une démarche revendicative enracinée dans le réel. C’est de cela qu’est née et s’est construit la CGT.

Il y a urgence à remettre des mots sur les maux, à reconstruire du dialogue professionnel, à recréer de la distanciation en créant les conditions du temps et de l’espace pour pouvoir redonner une position à chacun, permettre à chacun d’être à nouveau en phase avec lui-même.

Il y a urgence à mettre en lumière le travail réel, c’est-à-dire à mettre à plat les charges réelles de travail pour en socialiser les difficultés. C’est une dimension plus qu’importante puisque nos employeurs ne réfléchissent et n’agissent qu’au travers du travail prescrit.

Il y a urgence à réinjecter du droit directement dans le travail, en faisant respecter la réglementation. Celle-ci est très riche, applicable à tout employeur. Elle stipule, sans possibilité de déroger, qu’il a obligation de mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé physique, mentale et sociale des travailleurs qu’il emploie. C’est la directive européenne du 12 juin 1989, transposée en droit français, public et privé. Elle donne un niveau important de protection aux travailleurs. Mesurons bien que l’employeur a une obligation de moyens et de résultat.

Bien sûr, nos employeurs sont tout, sauf exemplaires en la matière, mais n’est-ce pas aussi leur réponse face au manque de pression sociale ? Toute la réglementation relative à la santé au travail constitue un véritable arsenal, un contre pouvoir puissant pour mettre les politiques développées en difficulté.

Pour nous, il s’agit d’en faire une véritable stratégie syndicale, qui permette aussi de replacer le CHSCT au cœur de l’activité syndicale. Parce que nous ne sommes pas des missionnaires mais des travailleurs. Parce que le CHSCT, c’est l’outil le plus politique de toutes les institutions représentatives du salariat, simplement du fait que c’est le seul à pouvoir remettre en cause la chasse gardée de l’employeur, son pouvoir exorbitant qui consiste à choisir comment il va utiliser les capacités de l’humain à travailler.

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Aide à l’action

Récapitulatif de la démarche à suivre

Récapitulatif des premières démarches à effectuer

Remarques

Aucun salarié ne peut encourir de sanction pour avoir quitter son travail pour se rendre directement chez son médecin. Il faut veiller à prévenir sa hiérarchie que l’on va quitter le lieu de travail pour s’y rendre.

Si je fais le choix de continuer de travailler, je me protège avec en calepin en poche. Je note systématiquement jour, heure, personnes présentes et actes d’incivilité/violences me concernant. Le faire de façon ostentatoire.

Attirer l’attention sur le fait que toute personne qui a eu connaissance d’un délit, a refusé d’en témoigner, peut être poursuivie. (Responsabilité civile et pénale).

La démarche juridique

Dans une société de droit, saisir les juridictions civiles ou pénales s’opère, notamment quand d’autres formes d’action ont été épuisées. Cela signifie qu’une réparation est demandée parce que le rapport de forces sur le lieu de travail n’a pas été suffisant pour imposer le droit à la prévention.
Cependant, l’action en justice reste une possibilité parmi d’autres dans la défense individuelle et collective des salariés. Elle doit s’appuyer sur une intervention syndicale préalable.

Si les dossiers que nous défendons sont souvent nourris, nous pouvons cependant perdre le gain d’une action juridique, faute d’avoir su choisir la procédure adaptée au cas défendu.
La multiplication et la variété des dossiers à défendre et le coût des frais de justice doivent nous pousser à rechercher plus d’efficacité.

L’objectif
Il s’agit toujours de protéger la victime tout en faisant établir ou rétablir son droit, mais aussi de protéger la collectivité au travail.

Quelques rappels

  • Les juridictions civiles : conseil des prud’hommes (CP), tribunal administratif (TA), tribunaux d’instance (TI), tribunaux de grandes instances (TGI).
  • Les juridictions pénales : la Correctionnelle, les Assises, le TASS (Tribunal des Affaires de la Sécurité Sociale), le TCI (Tribunal du Contentieux de l’Incapacité).
  • Prud’hommes et tribunal administratif ont pour compétences de rétablir le salarié dans ses droits (code du travail, statut général). Les tribunaux civils statuent sur la réparation du préjudice subie par la victime, les tribunaux pénaux sanctionnent les infractions à la loi.
  • Généralement, c’est une personne seule qui dépose plainte contre X auprès du tribunal civil. C’est la victime qui se trouve ainsi exposée, alors que le syndicat peut porter le dossier en justice. Le salarié, mieux protégé, peut se constituer partie civile.
  • Même si le responsable des faits est connu, il vaut mieux porter plainte contre X. Cela protège de toute poursuite ultérieure pour dénonciation calomnieuse si le dossier ne passe pas par manque de faits et preuves rapportées. De plus, l’enquête pourra mettre en cause ceux qui savaient et se sont tus. Enfin, c’est à la justice de définir le ou les délits. Se tromper de qualification de délit conduirait à perdre le dossier.

Une démarche validée par l’expérience

  • La section, le syndicat, peuvent demander à l’employeur de saisir le procureur afin qu’il diligente une enquête au regard des éléments en sa possession : empoisonnement (amiante, irradiation..), harcèlement, discrimination etc. On sait que l’employeur ne le fera pas mais les responsabilités respectives sont mieux établies.
  • Le syndicat, avec l’UL, l’UD, la Fédération, le Collectif fédéral, le Comité régional (les structures Cgt) peut saisir le procureur pour lui demander de diligenter une enquête au regard des éléments connus. Il n’est pas nécessaire de solliciter un avocat pendant cette première phase ; la procédure est donc gratuite.
  • Au regard des premiers éléments portés à la connaissance du procureur, celui-ci peut se saisir et ordonner une enquête qui sera effectuée par la gendarmerie ou les services de la police judiciaire. Le procureur nomme un juge pour instruire l’affaire. Il y a avantage de s’adresser en priorité au pénal plutôt qu’au civil. D’autre part, le dossier est rapidement consultable par le biais d’un avocat, dès lors que le syndicat s’est porté partie civile.
  • Le jugement ne sera rendu qu’à partir des faits établis par l’enquête. L’avocat n’intervient ensuite qu’au moment de plaider. Et il est possible de négocier avec lui le montant de ses honoraires.
  • Le pénal rétablit la victime dans son droit mais ne la dédommage pas. Il faut donc, après cette procédure, saisir les juridictions civiles pour faire établir les dommages et intérêts, en appui sur le rendu de jugement.

Attention :

  • Le syndicat ne qualifie pas les faits, il laisse le soin à la justice de faire (c’est ce qui le protègera contre toute poursuite ultérieure pour procédure abusive ou dénonciation calomnieuse). Il a aussi intérêt à déposer plainte contre X (protection contre toute poursuite ultérieure pour dénonciation calomnieuse).
  • La juridiction à saisir relève de la zone géographique du lieu de travail.

Pour ester en justice, il faut être syndicat au sens du code du travail (et non pas une section syndicale) ET avoir déposé des statuts qui mentionnent cette possibilité.
Trois documents sont exigibles : un exemplaire des statuts, le récépissé de dépôt des statuts, une délibération de la section/syndicat donnant mandat pour l’action juridique (la CE, le bureau ou le secrétaire général, voir les statuts).
La démarche ne doit pas et ne peut pas être conduite sans l’accord du salarié ou du syndiqué.
Il s’agit bien de saisir le procureur et en aucun cas un juge.

Modèles de lettre type

  • Elles sont adaptables au prorata des situations.
  • Elles peuvent être utilisées par la victime ou par le syndicat, voire dans une démarche conjointe.
  • La victime peut qualifier les faits, pas le syndicat.

Tableaux récapitulatifs

Les techniques du harcèlement

Souffrances mentales et organisations du travail

Violences au travail

Violences au travail : conséquence d’un échange inégal dans les rapports sociaux.

Formation syndicale

Toutes les attaques du patronat et du gouvernement portent sur le travail qui se voit déqualifié, disqualifié : licenciements, bas salaires, compression de l’emploi, précarité… Jamais le mal être au travail n’a été aussi profond, quelque soit le métier, la qualification : isolement, stress, individualisation, harcèlement, discrimination sont devenus des outils de gestion ordinaires.

L’enjeu est donc de taille pour notre organisation puisqu’il s’agit de créer les conditions de la réappropriation du travail, de la reconstruction de collectifs de travail et donc celles des repères, des solidarités, des exigences collectives.

La formation syndicale est un des outils majeurs qui donne aux militants les moyens de la pensée et de l’action.

La politique de formation en travail santé de la FERC s’articule autour de 4 piliers.

  • Une formation annuelle de niveau 1, sur 5 jours « CHSCT, bien être - santé au travail ». Elle a pour objectif d’interroger le travail, son lien avec la santé, l’environnement et la prévention. Elle place les missions de veille, d’investigation du CHSCT au cœur de l’activité du syndicat. Elle permet à chacun de s’inscrire dans une dynamique pérenne, une continuité de la pensée et de l’action, dans le cadre du réseau fédéral des référents en santé travail.
  • Une formation bisannuelle de niveau 2 « Être militant CGT en santé au travail ». Elle a pour objectif d’offrir un panorama plus large des acteurs et outils dédiés à la prévention. Elle permet d’interroger les pratiques, de voir comment, collectivement, on peut faire évoluer le droit, les exigences, les revendications. Elle est lieu de construction de compétences mises à disposition des organisations et de la fédération. Elle prépare au stage confédéral.
  • Des journées d’étude décentralisées en territoire, à quelque niveau géographique que ce soit. Elles sont organisées sur 2 jours, portent sur une ou des thématiques choisie par le syndicat, la section et travaillées ensemble.
  • Des interventions lors de congrès, commissions exécutives, journées d’étude etc.

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Annexes

Fiche d’alerte OFCT

Juridique : directive UE de 89, délits code pénal

Directive européenne 89/391/CEE du 12 juin 1989

Obligation des employeurs

  • Éviter les risques.
  • Évaluer les risques qui ne peuvent être évités.
  • Combattre les risques à la source.
  • Adapter le travail à l’homme : conception des postes, choix des équipements de travail.
  • Réduire les effets du travail monotone et cadencé.
  • Tenir compte de l’état d’évolution des techniques.
  • Remplacer ce qui est dangereux par ce qui ne l’est pas ou ce qui l’est moins.
  • Planifier la prévention en intégrant organisation du travail, technique, relations sociales, influence des facteurs ambiants au travail.
  • Favoriser les mesures de protection collective plutôt qu’individuelle.
  • Donner des instructions appropriées aux salariés.
  • Évaluer les risques, y compris dans le choix des substances, préparations chimiques, équipements utilisés et aménagement des lieux de travail.
  • Garantir un meilleur niveau de protection de la sécurité et santé des salariés.
  • Prendre en compte la capacité des salariés.
  • Consulter les salariés/ leurs représentants pour l’introduction et la planification de nouvelles technologies.
  • Désigner des salariés pour s’occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels.
  • Faire appel à des compétences extérieures si celles présentes sont insuffisantes.
  • Prendre les mesures nécessaires en matière de premiers secours : incendie, évacuation des salariés, assistance médicale d’urgence, sauvetage.
  • S’assurer que les salariés venant de l’extérieur ont reçu des instructions appropriées en ce qui concerne les risques pour leur sécurité et santé pendant leur activité dans l’établissement.
  • Informer les salariés et leurs représentants, assurer les formations.
  • Informer rapidement les salariés d’un risque d’exposition à un danger grave et imminent, sur les dispositions prises ou à prendre en matière de protection.
  • Prendre des mesures, donner des instructions pour arrêter toute activité et se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail, en cas de danger grave et imminent.
  • S’abstenir de demander aux salariés de reprendre le travail si le danger persiste.
  • Disposer d’une évaluation des risques.
  • Déterminer les mesures de protection à prendre et matériel de protection à utiliser.
  • Tenir une liste des accidents du travail ayant entraîné pour le salarié une incapacité de travail supérieure à 3 jours de travail.
  • Établir des rapports concernant les accidents du travail pour l’autorité compétente.

Droit et obligations des salariés

Information

  • Droit de recevoir les informations nécessaires relatives aux risques pour la sécurité et la santé, les mesures et activités de prévention concernant l’entreprise ou l’établissement en général, chaque poste de travail et/ou de fonction, à l’évaluation des risques et mesures de protection, à la liste et aux rapports établis, aux informations provenant des services d’inspection et organismes de prévention compétents.

Consultation et participation

  • Droit d’être consulté, de participer à toutes questions relatives à la sécurité-santé au travail et de faire des propositions.
  • Consultation des représentants des salariés sur toute action qui peut avoir des effets substantiels sur la sécurité-santé, la désignation des salariés et les actions prévues, les informations, l’appel à des compétences extérieures, la conception et l’organisation de la formation.
  • Droit pour les représentants ayant une fonction spécifique sécurité- santé de demander à l’employeur de prendre des mesures appropriées et de lui soumettre des propositions pour pallier tout risque, éliminer tout danger.
  • Droit à une dispense de travail suffisante sans perte de salaire, mise à disposition des moyens nécessaires pour permettre aux représentants sécurité santé d’exercer leurs droits et fonctions.
  • Droit de faire appel à une autorité compétente en sécurité santé si les mesures prises et moyens engagés sont jugés insuffisants.
  • Présentation des observations des représentants sécurité-santé lors de visites et vérifications effectuées par l’autorité compétente.

Formation

  • Droit, pour chaque salarié, de recevoir, dès l’embauche ou suite à une mutation, un changement de fonction, à l’introduction d’une nouvelle technologie spécifiquement axée sur son poste de travail ou sa fonction, une formation suffisante et adéquate, sous forme d’informations et d’instructions.
  • Droit à une formation adaptée à l’évolution des risques et à l’apparition des risques nouveaux, répétée périodiquement si nécessaire.
  • Droit à la formation appropriée pour les représentants des salariés ayant une fonction spécifique dans la protection de la santé sécurité. Elle s’effectue durant le temps de travail, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement, et ne peut être à la charge du salarié.

Obligations

  • Prendre soin, selon ses possibilités, de sa sécurité ainsi que de celle des personnes concernées du fait de ses actes ou de ses omissions au travail, conformément à sa formation et aux instructions de son employeur.
  • Utiliser correctement l’équipement de protection individuelle mis à disposition et après utilisation, le ranger à sa place, les machines, appareils, outils, substances dangereuses, équipements de transports et autres moyens.
  • Ne pas mettre hors service, changer ou déplacer arbitrairement les dispositifs de sécurité propres aux machines, appareils, outils, installations et bâtiments.
  • Signaler immédiatement toute situation de travail qui présente un danger grave et imminent pour la sécurité et la santé, toute défectuosité constatée dans les systèmes de protection.
  • Concourir pour que l’employeur assure un milieu et des conditions de travail sûres et sans risque pour la sécurité et la santé, à l’intérieur du champ d’activité, pour permettre l’accomplissement de toutes tâches ou exigences imposées par l’autorité compétente afin de protéger la sécurité et la santé des salariés.

Délits code pénal

Article 121-3
« Il y a également délit lorsque la loi prévoit en cas de faute, d’imprudence, de négligence ou un manquement grave à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement s’il est établi que l’auteur des faits n’a pas accompli les diligences normales compte tenu le cas échéant de la nature de ses missions ou de ses fonctions, de ses compétences ainsi que du pouvoir et des moyens dont il dispose.
Dans le cas prévu par l’alinéa qui précède, les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures permettant de l’éviter, sont responsables pénalement s’il est établi qu’elles ont, soit violé d’une façon manifestement délibérée une obligation particulière de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou le règlement, soit commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient ignorer ».

Article 221-6
« Le fait de causer dans les conditions et selon les distinctions prévues à ‘article 121-3 par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de prudence ou de sécurité prévue par la loi ou règlement la mort d’autrui constitue un homicide involontaire puni de 3ans d’emprisonnement et de 45 OOO euros d’amende.
En cas de violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement, les peines encourues sont portées à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende ».

Article 223-6
« Quiconque pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ou pour les tiers, soit un crime, soit un délit contre l’intégrité physique de la personne, s’abstient volontairement de le faire est puni de 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende ».

Article 223-7
« Quiconque s’abstient volontairement de prendre ou de provoquer les mesures permettant, sans risque pour lui ou pour les tiers, de combattre un sinistre de nature à créer un danger pour la sécurité des personnes est puni de 2ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende ».

Accords : stress au travail, violences et harcèlement au travail

Accord national interprofessionnel sur le stress

Introduction

Le stress au travail est considéré sur le plan international, européen et national comme une préoccupation à la fois des employeurs et des travailleurs. Ayant identifié la nécessité d’une action commune spécifique sur cette question et anticipant une consultation sur le stress par la Commission, les partenaires sociaux européens ont signé, le 8 octobre 2004, un accord sur le stress au travail dans le cadre de l’article 138 du Traité CE.

Le présent accord a pour objet de transposer l’accord européen en droit français et de prendre en compte les évolutions de la société sur ce sujet. Le stress peut affecter potentiellement tout lieu de travail et tout travailleur, quels que soient la taille de l’entreprise, le domaine d’activité, le type de contrat ou de relation d’emploi. En pratique, tous les lieux de travail et tous les travailleurs ne sont pas nécessairement affectés.

La lutte contre le stress au travail doit conduire à une plus grande efficacité et une amélioration de la santé et de la sécurité au travail, avec les bénéfices économiques et sociaux qui en découlent pour les entreprises, les travailleurs et la société dans son ensemble. Il importe de tenir compte de la diversité des travailleurs, des situations de travail et de la responsabilité des employeurs dans la lutte contre les problèmes de stress au travail.

Objet

L’objet de l’accord est :

  • d’augmenter la prise de conscience et la compréhension du stress au travail, par les employeurs, les travailleurs et leurs représentants,
  • d’attirer leur attention sur les signes susceptibles d’indiquer des problèmes de stress au travail et ce, le plus précocement possible,
  • de fournir aux employeurs et aux travailleurs un cadre qui permette de détecter, de prévenir, d’éviter et de faire face aux problèmes de stress au travail. Son but n’est pas de culpabiliser l’individu par rapport au stress.

Dans ce cadre, les partenaires sociaux souhaitent concourir à la préservation de la santé des travailleurs par :

  1. la mise en place d’une prévention efficace contre les problèmes générés par les facteurs de stress liés au travail,
  2. l’information et la formation de l’ensemble des acteurs de l’entreprise,
  3. la lutte contre les problèmes de stress au travail et la promotion de bonnes pratiques notamment de dialogue dans l’entreprise et dans les modes organisationnels pour y faire face,
  4. la prise en compte de l’équilibre entre vie professionnelle, vie familiale et personnelle.

Reconnaissant que le harcèlement et la violence au travail sont des facteurs de stress, les partenaires sociaux décident d’engager, dans les 12 mois qui suivent la signature du présent accord, une négociation spécifique sur ces questions dans le cadre de la transposition de l’accord européen sur le harcèlement et la violence au travail du 26 avril 2007. Le présent accord ne traite donc ni de la violence au travail, ni du harcèlement et du stress post traumatique.

Description du stress et du stress au travail

Un état de stress survient lorsqu’il y a déséquilibre entre la perception qu’une personne a des contraintes que lui impose son environnement et la perception qu’elle a de ses propres ressources pour y faire face. L’individu est capable de gérer la pression à court terme mais il éprouve de grandes difficultés face à une exposition prolongée ou répétée à des pressions intenses.

En outre, différents individus peuvent réagir de manière différente à des situations similaires et un même individu peut, à différents moments de sa vie, réagir différemment à des situations similaires. Le stress n’est pas une maladie mais une exposition prolongée au stress peut réduire l’efficacité au travail et peut causer des problèmes de santé.

Le stress d’origine extérieure au milieu de travail peut entraîner des changements de comportement et une réduction de l’efficacité au travail. Toute manifestation de stress au travail ne doit pas être considérée comme stress lié au travail. Le stress lié au travail peut être provoqué par différents facteurs tels que le contenu et l’organisation du travail, l’environnement de travail, une mauvaise communication, etc.

Identification des problèmes de stress au travail

Compte tenu de la complexité du phénomène de stress, le présent accord n’entend pas fournir une liste exhaustive des indicateurs potentiels de stress.

Toutefois, un certain nombre d’indicateurs peuvent révéler la présence de stress dans l’entreprise justifiant la prise de mesures adaptées pour lutter contre le phénomène.

Par exemple un niveau élevé d’absentéisme notamment de courte durée ou de rotation du personnel en particulier fondée sur des démissions, des conflits personnels ou des plaintes fréquents de la part des travailleurs, un taux de fréquence des accidents du travail élevé, des passages à l’acte violents contre soi-même ou contre d’autres, même peu nombreux, une augmentation significative des visites spontanées au service médical sont quelques-uns des signes pouvant révéler la présence de stress au travail.

L’identification d’un problème de stress au travail doit passer par une analyse de facteurs tels que :

  • l’organisation et les processus de travail (aménagement du temps de travail, dépassement excessifs et systématiques d’horaires, degré d’autonomie, mauvaise adéquation du travail à la capacité ou aux moyens mis à disposition des travailleurs, charge de travail réelle manifestement excessive, des objectifs disproportionnés ou mal définis, une mise sous pression systématique qui ne doit pas constituer un mode de management, etc.).
  • les conditions et l’environnement de travail (exposition à un environnement agressif, à un comportement abusif, au bruit, à une promiscuité trop importante pouvant nuire à l’efficacité, à la chaleur, à des substances dangereuses, etc.),
  • la communication (incertitude quant à ce qui est attendu au travail, perspectives
  • d’emploi, changement à venir, une mauvaise communication concernant les orientations et les objectifs de l’entreprise, une communication difficile entre les acteurs etc.),
  • et les facteurs subjectifs (pressions émotionnelles et sociales, impression de ne pouvoir faire face à la situation, perception d’un manque de soutien, difficulté de conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle, etc.).

L’existence des facteurs énumérés peut constituer des signes révélant un problème de stress au travail.
Dès qu’un problème de stress au travail est identifié, une action doit être entreprise pour le prévenir, l’éliminer ou à défaut le réduire. La responsabilité de déterminer les mesures appropriées incombe à l’employeur. Les institutions représentatives du personnel, et à défaut les travailleurs, sont associées à la mise en oeuvre de ces mesures.

L’amélioration de la prévention du stress est un facteur positif qui contribue à une meilleure santé des travailleurs et à une plus grande efficacité de l’entreprise. Le médecin du travail est une ressource en termes d’identification du stress au travail.

Responsabilités des employeurs et des travailleurs

En vertu de la directive-cadre 89/391 concernant la mise en œuvre des mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, et des articles L.4121-1 à 5 du Code du travail, les employeurs prennent les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.

Cette obligation couvre également les problèmes de stress au travail dans la mesure où ils présentent un risque pour la santé et la sécurité. Tous les travailleurs ont l’obligation générale de se conformer aux mesures de protection déterminées par l’employeur.

La lutte contre les causes et les conséquences du stress au travail peut être menée dans le cadre d’une procédure globale d’évaluation des risques, par une politique distincte en matière de stress et/ou par des mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés.

Les mesures sont mises en œuvre, sous la responsabilité de l’employeur, avec la participation et la collaboration des travailleurs et/ou de leurs représentants.

Prévenir, éliminer et à défaut, réduire les problèmes de stress au travail

Prévenir, éliminer, et à défaut, réduire les problèmes de stress au travail inclut diverses mesures.

Ces mesures peuvent être collectives, individuelles ou concomitantes.
Elles peuvent être mises en œuvre sous la forme de mesures spécifiques visant les facteurs de stress identifiés ou dans le cadre d’une politique intégrée qui implique des actions de prévention et des actions correctives.

À ce titre, les partenaires sociaux souhaitent réaffirmer le rôle pivot du médecin du travail soumis au secret médical, ce qui garantit au travailleur de préserver son anonymat, dans un environnement pluridisciplinaire.

Lorsque l’entreprise ne dispose pas de l’expertise requise, elle fait appel à une expertise externe conformément aux législations, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales, sans obérer le rôle du CHSCT.

Les mesures de lutte contre le stress sont régulièrement réexaminées afin d’évaluer leur efficacité ainsi que leur impact sur le stress tel qu’il ressort des indicateurs.
Dans ce cadre, il conviendra de déterminer s’il a été fait un usage optimal des ressources et si les mesures définies sont encore appropriées ou nécessaires.

Ces mesures incluent par exemple :

  • des mesures visant à améliorer l’organisation, les processus, les conditions et l’environnement de travail, à assurer un soutien adéquat de la direction aux personnes et aux équipes, à donner à tous les acteurs de l’entreprise des possibilités d’échanger à propos de leur travail, à assurer une bonne adéquation entre responsabilité et contrôle sur le travail, et des mesures de gestion et de communication visant à clarifier les objectifs de l’entreprise et le rôle de chaque travailleur,
  • la formation de l’ensemble des acteurs de l’entreprise et en particulier de l’encadrement et de la direction afin de développer la prise de conscience et la compréhension du stress, de ses causes possibles et de la manière de le prévenir et d’y faire face,
  • l’information et la consultation des travailleurs et/ou leurs représentants, conformément à la législation, aux conventions collectives et aux pratiques européennes et nationales.

Mise en œuvre et suivi

Les organisations professionnelles d’employeurs et les organisations syndicales de salariés, représentatives au niveau national et interprofessionnel, invitent l’État à prendre, dans les meilleurs délais, les mesures d’extension du présent accord.
Les accords de branche et les accords d’entreprises ne peuvent déroger aux dispositions du présent accord que dans un sens plus favorable aux travailleurs.

ANI sur souffrances/harcèlement

Préambule

Le respect de la dignité des personnes à tous les niveaux est un principe fondamental qui ne peut être transgressé, y compris sur le lieu de travail. C’est pourquoi le harcèlement et la violence, qui enfreignent très gravement ce principe, sont inacceptables. Les parties signataires les condamnent sous toutes leurs formes.
Elles estiment qu’employeurs et salariés ont un intérêt mutuel à traiter, notamment par la mise en place d’actions de prévention, cette problématique, qui peut avoir de graves conséquences sur les personnes et est susceptible de nuire à la performance de l’entreprise et de ses salariés.

Elles considèrent comme étant de leur devoir et de leur responsabilité de transposer, par le présent accord, l’accord cadre autonome signé par les partenaires sociaux européens le 15 décembre 2006 sur le harcèlement et la violence au travail.

Prenant en compte les dispositions des législations européenne et nationale qui définissent l’obligation de l’employeur de protéger les salariés contre le harcèlement et la violence sur le lieu de travail et le fait que le harcèlement et/ou la violence au travail peuvent prendre différentes formes, susceptibles d’être d’ordre physique, psychologique et/ou sexuel,
 de consister en incidents ponctuels ou en comportements systématiques,
 d’être exercés entre collègues, entre supérieurs et subordonnés, ou par des tiers tels que clients, consommateurs, patients, élèves, etc.,
 d’aller de cas mineurs de manque de respect à des agissements plus graves, y compris des délits, exigeant l’intervention des pouvoirs publics, les parties signataires reconnaissent que le harcèlement et la violence peuvent affecter potentiellement tout lieu de travail et tout salarié, quels que soient la taille de l’entreprise, son champ d’activité ou la forme du contrat ou de la relation d’emploi.

Cependant, certaines catégories de salariés et certaines activités sont plus exposées que d’autres, notamment, s’agissant des agressions externes, les salariés qui sont en contact avec le public. Néanmoins, dans la pratique, tous les lieux de travail et tous les salariés ne sont pas affectés.

Le présent accord vient compléter la démarche initiée par l’accord national interprofessionnel du 2 juillet 2008 sur le stress au travail (signé le 24 novembre 2008) dont les dispositions abordent les aspects organisationnels, les conditions et l’environnement de travail. Il vise à identifier, à prévenir et à gérer deux aspects spécifiques des risques psychosociaux - le harcèlement et la violence au travail.
Dans cette perspective, les parties signataires réaffirment leur volonté de traiter ces questions en raison de leurs conséquences graves pour les personnes ainsi que de leurs coûts sociaux et économiques.

Elles conviennent, en conséquence, de prendre des mesures de protection collective visant à améliorer la santé et la sécurité au travail des salariés, de veiller à l’environnement physique et psychologique du travail. Elles soulignent également l’importance qu’elles attachent au développement de la communication sur les phénomènes de harcèlement et de violence au travail, ainsi qu’à la promotion des méthodes de prévention de ces phénomènes.

Sans préjudice des dispositions législatives et réglementaires en vigueur, le présent accord traite des formes de harcèlement et de violence au travail qui ressortent de la compétence des partenaires sociaux et correspondent à la description qui en est faite à l’article 2 ci-dessous.

ARTICLE 1 : OBJECTIFS DE L’ACCORD

Le présent accord a pour objectifs

  • d’améliorer la sensibilisation, la compréhension et la prise de conscience des employeurs, des salariés et de leurs représentants à l’égard du harcèlement et de la violence au travail afin de mieux prévenir ces phénomènes, les réduire et si possible les éliminer,
  • d’apporter aux employeurs, aux salariés et à leurs représentants, à tous les niveaux, un cadre concret pour l’identification, la prévention et la gestion des problèmes de harcèlement et de violence au travail.

Ces objectifs s’imposent à l’ensemble des entreprises, quel que soit leur effectif. Les modalités retenues pour les atteindre devront être adaptées à la taille des entreprises.

ARTICLE 2 : DÉFINITION, DESCRIPTION ET IDENTIFICATION DU HARCÈLEMENT ET DE LA VIOLENCE AU TRAVAIL

1. Définition et description générale Le harcèlement et la violence au travail s’expriment par des comportements inacceptables d’un ou plusieurs individus ; ils peuvent prendre des formes différentes (physiques,psychologiques, sexuelles), dont certaines sont plus facilement identifiables que d’autres.
L’environnement de travail peut avoir une influence sur l’exposition des personnes au harcèlement et à la violence. Le harcèlement survient lorsqu’un ou plusieurs salariés font l’objet d’abus, de menaces et/ou d’humiliations répétés et délibérés dans des circonstances liées au travail, soit sur les lieux de travail, soit dans des situations liées au travail.
La violence au travail se produit lorsqu’un ou plusieurs salariés sont agressés dans des circonstances liées au travail. Elle va du manque de respect à la manifestation de la volonté de nuire, de détruire, de l’incivilité à l’agression physique. La violence au travail peut prendre la forme d’agression verbale, d’agression comportementale, notamment sexiste, d’agression physique. Les incivilités contribuent à la dégradation des conditions de travail, notamment pour les salariés qui sont en relation quotidienne avec le public, et rendent difficile la vie en commun.
Les entreprises qui laissent les incivilités s’installer, les banalisent et favorisent l’émergence d’actes plus graves de violence et de harcèlement Le harcèlement et la violence au travail peuvent être exercés par un ou plusieurs salariés ou par des tiers avec pour but ou pour effet de porter atteinte à la dignité d’un salarié, affectant sa santé et sa sécurité et/ou créant un environnement de travail hostile. Les phénomènes de stress lorsqu’ils découlent de facteurs tenant à l’organisation du travail, l’environnement de travail ou une mauvaise communication dans l’entreprise peuvent conduire à des situations de harcèlement et de violence au travail plus difficiles à identifier.

2. Cas particulier de harcèlement et de violence au travail Certaines catégories de salariés peuvent être affectées plus particulièrement par le harcèlement et la violence en raison de leur origine, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur handicap, ou de la fréquence de leur relation avec le public. En effet, les personnes potentiellement exposées à des discriminations peuvent être plus particulièrement sujettes à des situations de harcèlement ou de violence au travail.

3. Violences faites aux femmes En ce qui concerne plus particulièrement les violences faites aux femmes, la persistance des stéréotypes et des tabous ainsi que la non reconnaissance des phénomènes de harcèlement sexuel, nécessite une forte sensibilisation à tous les niveaux de la hiérarchie et la mise en place de politiques de prévention, et d’accompagnement dans les entreprises. Il s’agit notamment d’identifier ces stéréotypes et de les démystifier en réfutant les représentations erronées de la place des femmes dans le travail. Une telle démarche s’inscrit notamment dans une approche volontariste et opérationnelle pour combattre ces phénomènes qui peuvent se révéler dans le cadre du travail au travers de situations de harcèlement et de violence au travail.

ARTICLE 3 : ENGAGEMENTS DES EMPLOYEURS ET DES SALARIES

Aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. De même, aucun salarié ne doit subir des agressions ou des violences dans des circonstances liées au travail, qu’il s’agisse de violence interne ou externe,

  • la violence au travail interne est celle qui se manifeste entre les salariés, y compris le personnel d’encadrement
  • la violence au travail externe est celle qui survient entre les salariés, le personnel d’encadrement et toute personne extérieure à l’entreprise présente sur le lieu de travail.

En conséquence, l’employeur prend toutes les mesures nécessaires en vue de prévenir de tels agissements. Les entreprises doivent clairement affirmer que le harcèlement et la violence au travail ne sont pas admis. Cette position qui peut être déclinée sous la forme d’une " charte de référence " précise les procédures à suivre si un cas survient. Les procédures peuvent inclure une phase informelle, durant laquelle une personne ayant la confiance de la direction et des salariés est disponible pour fournir conseils et assistance. La diffusion de l’information est un moyen essentiel pour lutter contre l’émergence et le développement du harcèlement et de la violence au travail. A cet effet, la position ci-dessus, lorsqu’elle fait l’objet d’un document écrit ou de la " charte de référence ", est annexée au règlement intérieur dans les entreprises qui y sont assujetties.

ARTICLE 4 : PRÉVENTION, IDENTIFICATION ET GESTION DES PROBLÈMES DE HARCÈLEMENT ET DE VIOLENCE AU TRAVAIL

L’employeur, en concertation avec les salariés et/ou leurs représentants, prend les mesures nécessaires en vue de prévenir et gérer les agissements de harcèlement et de violence au travail.

À cet effet, il apparaît important de recenser, le cas échéant, les phénomènes de harcèlement ou de violence au travail afin d’en mesurer l’ampleur, d’en appréhender les circonstances, et de rechercher les mesures de prévention adéquates.
Le harcèlement et la violence au travail ne peuvent se présumer. Toutefois, en l’absence de dénonciation explicite, les employeurs doivent manifester une vigilance accrue à l’apparition de certains indicateurs ou indices tels que des conflits personnels répétés, des plaintes fréquentes de la part de salariés, ou des passages à l’acte violents contre soi-même ou contre d’autres.

1. Prévention des problèmes de harcèlement et de violence au travail
Une meilleure sensibilisation et une formation adéquate des responsables hiérarchiques et des salariés réduisent la probabilité des cas de survenance de harcèlement et de violence au travail. Aujourd’hui, la formation au management proposée dans les différentes écoles ou universités ne prend pas suffisamment en compte la formation à la conduite des équipes. Aussi, ces programmes de formation doivent davantage intégrer la dimension relative à la conduite des hommes et des équipes, et aux comportements managériaux.
Cette sensibilisation et cette formation passe par la mobilisation des branches professionnelles qui mettront en place les outils adaptés à la situation des entreprises de leur secteur professionnel.
Ainsi, les outils nécessaires pourront être élaborés afin de favoriser la connaissance des employeurs et des salariés des phénomènes de harcèlement et de violence au travail et de mieux appréhender leurs conséquences au sein de l’entreprise.
Par ailleurs, les mesures visant à améliorer les processus, les conditions et l’environnement de travail et à donner à tous les acteurs de l’entreprise des possibilités d’échanger à propos de leur travail participent à la prévention des situations de harcèlement et de violence au travail.
En cas de réorganisation, restructuration ou changement de périmètre de l’entreprise, celle-ci veillera à penser, dans ce nouveau contexte, un environnement de travail équilibré. Les branches professionnelles s’emploieront avec les organisations syndicales de salariés à aider les entreprises à trouver des solutions adaptées à leur secteur professionnel. Lorsqu’une situation de harcèlement ou de violence est repérée ou risque de se produire, le salarié peut recourir à la procédure d’alerte prévue en cas d’atteinte au droit des personnes. Les parties signataires rappellent que les services de santé au travail qui associent des compétences médicales et pluridisciplinaires sont les acteurs privilégiés de la prévention du harcèlement et de la violence au travail. Outre leur rôle d’information et de sensibilisation des salariés ou de l’employeur confrontés à ces phénomènes, ils peuvent participer à l’élaboration de formations adaptées et d’une politique de sécurité, au niveau approprié de l’entreprise. Le médecin du travail joue dans ce cadre un rôle particulier tenant au respect du secret médical tel qu’il est attaché à sa fonction et auquel il est tenu. Dans le cadre des attributions des institutions représentatives du personnel, le CHSCT agit, en lien avec le comité d’entreprise, pour la promotion de la prévention des risques professionnels dans l’établissement. Il peut notamment proposer des actions de prévention en matière de harcèlement et de violence au travail. En cas de refus de l’employeur, ce refus doit être motivé.
2. Identification et gestion des problèmes de harcèlement et de violence au travail
Sans préjudice des procédures préexistantes dans l’entreprise, une procédure appropriée peut être mise en place pour identifier, comprendre et traiter les phénomènes de harcèlement et de violence au travail. Elle sera fondée sur les éléments suivants, sans pour autant s’y limiter :

  • il est dans l’intérêt de tous d’agir avec la discrétion nécessaire pour protéger la dignité et la vie privée de chacun,
  • aucune information, autre qu’anonymisée ne doit être divulguée aux parties non impliquées dans l’affaire en cause,
  • les plaintes doivent être suivies d’enquêtes et traitées sans retard,
  • toutes les parties impliquées doivent bénéficier d’une écoute impartiale et d’un traitement équitable,
  • les plaintes doivent être étayées par des informations détaillées,
  • les fausses accusations délibérées ne doivent pas être tolérées, et peuvent entraîner des mesures disciplinaires,
  • une assistance extérieure peut être utile. Elle peut notamment s’appuyer sur les services de santé au travail.

Dans le respect de ces orientations, une procédure de médiation peut être mise en œuvre par toute personne de l’entreprise s’estimant victime de harcèlement ou par la personne mise en cause.
Le choix du médiateur fait l’objet d’un accord entre les parties. Le médiateur s’informe de l’état des relations entre les parties. Il tente de les concilier et leur soumet des propositions qu’il consigne par écrit en vue de mettre fin au conflit.
L’employeur peut avoir recours aux compétences pluridisciplinaires du service de santé au travail dès l’identification de phénomènes de harcèlement et de violence au travail jusqu’à la mise en œuvre d’actions de prévention.
Les employeurs, en concertation avec les salariés et/ou leurs représentants, établissent, revoient et suivent ces procédures pour assurer leur efficacité, tant en matière de prévention qu’en matière de traitement des problèmes éventuels.

ARTICLE 5 : SANCTIONS A L’ENCONTRE DES AUTEURS DE HARCÈLEMENT ET DE VIOLENCE AU TRAVAIL ET MESURES D’ACCOMPAGNEMENT DES SALARIÉS HARCELÉS OU AGRESSÉS

1. Sanction à l’encontre des auteurs de harcèlement ou de violence
S’il est établi qu’il y a eu harcèlement ou violence, des mesures adaptées sont prises à l’égard du ou des auteur(s). Le règlement intérieur précisera les sanctions applicables aux auteurs des agissements de harcèlement ou de violence.
2. Mesures d’accompagnement des salariés harcelés ou agressés
Aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements de harcèlement ou de violence ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
La(les) victime(s) bénéficie(nt) d’un soutien et, si nécessaire, d’une aide à leur maintien, à leur retour dans l’emploi ou à leur réinsertion.
Des mesures d’accompagnement prises en charge par l’entreprise sont mises en œuvre en cas de harcèlement avéré ou de violence, pouvant porter atteinte à la santé. Celles-ci sont avant tout destinées à apporter un soutien à la victime, notamment au plan médical et psychologique.

S’agissant des agressions par des tiers, l’entreprise pourra prévoir des mesures d’accompagnement, notamment juridique, du salarié agressé.
L’employeur, en concertation avec les salariés ou leurs représentants, procédera à l’examen des situations de harcèlement et de violence au travail lorsque de telles situations sont constatées, y compris au regard de l’ensemble des éléments de l’environnement de travail comportements individuels, modes de management, relations avec la clientèle, mode de fonctionnement de l’entreprise.

ARTICLE 6 : PROMOTION, SUIVI ET ÉVALUATION

Les parties signataires assureront la diffusion et la promotion du présent accord auprès des salariés et des entreprises. Elles s’attacheront également à la situation dans les TPE/PME. Elles insistent sur le rôle fondamental que doivent jouer les branches professionnelles en la matière.
Les partenaires sociaux établiront un rapport annuel conjoint, communiqué aux partenaires sociaux européens dans le cadre du suivi du déploiement de l’accord autonome européen.
À l’issue d’un délai de deux ans suivant la publication de l’arrêté d’extension de l’accord, les partenaires sociaux se réuniront pour évaluer la mise en œuvre de l’accord à tous les niveaux.

ARTICLE 7 : EXTENSION

Les parties signataires demanderont, à l’initiative de la partie la plus diligente, l’extension du présent accord.