Education CGT Enseignement Privé (CGT-EP)

 Les enseignant-e-s des Lycées Professionnels se sont exprimés !

 

724 PLP ont répondu à notre enquête...

Les jeunes enseignant-e-s, comme les plus expérimenté-e-s ont participé à cette enquête, et sont issu-e-s de toutes les académies (y compris les régions ultra-marines – Guyane, Réunion, Martinique, Guadeloupe...). L’âge des sondé-e-s est très varié, même si à 42% il s’agit de collègues de 40 à 49 ans. Les femmes sont majoritaires (65%) parmi les réponses ce qui correspond au ratio Femmes-Hommes de notre corps professoral.

Majoritairement en Lycée Pro, mais pas uniquement...

Logiquement, les collègues PLP interrogé-e-s travaillent dans les sections de Lycée Pro (98%) : 32% au sein de LP autonomes et 68% dans des groupes scolaires. Pour ce qui concerne ces derniers : 12% exercent également en BTS, 8% en Lycée Général ou Technologique, et 8% en collège.

Quelles difficultés au quotidien ?

Selon 64 % des enseignant-e-s, il s’agit d’abord de l’hétérogénéité des élèves.
Ce résultat n’est pas une surprise : dans une même classe se retrouvent de très bons élèves, qui choisissent une formation professionnelle, et des élèves beaucoup plus en difficulté envoyés là par défaut. De même, le niveau social des élèves et leurs conditions de vie sont très divers. Cette forte mixité est une richesse … à condition que les moyens nécessaires (encadrement, matériel…) soient donnés. Lorsque ce n’est pas le cas, les enseignant-e-s, dans leurs classes, seul-e-s à « gérer » les difficultés de chacun-e.

C’est pourquoi la CGT revendique des classes à effectifs adaptés. Sans dédoublement au-delà de 24 élèves : ce n’est pas sérieux ! A l’instar de ce qu’a affirmé le nouveau gouvernement pour le CP en REP+ : il s’agit d’une volonté politique.

Inquiétudes sur les conditions de travail

Selon 6% des collègues, les conditions de travail se sont améliorées en Lycée Pro contre 54% qui considèrent qu’elles se sont dégradées et 40% qui estiment qu’elles n’ont pas particulièrement évolué ces dernières années.

Nous avons donc interrogé les collègues sur leurs conditions matérielles de travail. Question matériel pédagogique et informatique : les résultats sont assez homogènes. Les enseignant-e-s évaluent à 10,9/20 leur environnement. Résultat équivalent pour les salles de classe et les locaux, avec 11,4/20 de moyenne. La question des « budgets disponibles pour des projets spécifiques » est plus préoccupante, avec une note de 8,9/20.

Compte tenu de la spécificité de leur public, les enseignant-e-s de Lycée Pro, cherchent à organiser des projets et activités qui nécessitent souvent des moyens financiers. Et ces derniers ne sont pas suffisants… Rappelons que les ressources peuvent être internes à l’établissement (sur les fonds propres) ou versées par les régions. Certains dispositifs régionaux prévoient le versement d’une somme fixe par élève pour des projets spécifiques… sans que les enseignant-e-s en soient informé-e-s. Les budgets entrent alors dans les recettes de l’établissement … et leur affectation n’est pas « conforme ». A vérifier dans votre région !

Selon 48% des enseignant-e-s de LP, le temps passé en réunion occupe une place trop importante en dehors du temps de classe mais pour 52%, ce n’est pas le cas ?! Les retours des collègues sont clairs : les réunions sont nécessaires… si elles sont efficaces, bien préparées et correctement menées. La balle est donc dans le camp des principaux prescripteurs de ces réunions : les directions.

Un manque criant de personnels non-enseignants en relation avec les élèves

La seconde cause de difficultés au quotidien : 48% des collègues estiment que leur établissement manque d’encadrement adulte notamment de personnels de vie scolaire (surveillant-e-s). Souvent en échec scolaire au collège, confronté-e-s à une orientation dans une filière inconnues, les jeunes - adolescent-e-s - ont d’abord besoin du soutien, de l’écoute et de l’encadrement d’adultes formé-e-s dans le domaine de la santé, de l’orientation et de la vie scolaire… Pourtant, seuls 1 Lycée Pro sur 4 dispose d’un-e infirmier-e scolaire. Pire encore pour les Conseiller-e-s d’orientation, présent-e-s dans seulement 9% des établissements. Et encore, ces collègues sont le plus souvent partagé-e-s sur plusieurs établissements. Les élèves de Lycée Pro demandent une attention particulière. Aux côtés des enseignant-e-s, les personnels d’éducation, les infirmier-e-s et les conseiller-e-s d’orientation sont en première ligne. Alors quand les jeunes ne sont pas entouré-e-s par suffisamment de professionnel-le-s, c’est tout le système qui est mis en difficulté. Pour cette raison, et confortée par cette étude, la CGT revendique plus que jamais l’embauche directement par l’éducation nationale, au même titre que pour les enseignant-e-s et à l’instar de ce qui se passe dans le public, de personnels d’éducation, de COP et d’infirmier-e-s scolaires dans les établissements privés. Ces collègues, dont la rémunération est actuellement déjà prise en charge par l’état au moyen du forfait d’externat versé aux établissements ne sont pas assez nombreux. Le forfait d’externat doit permettre ces embauches, dont nos établissements ont un besoin impérieux.

Les périodes de Formation en Entreprise

Dans 10% des établissements, les élèves d’une même classe partent « en décalé ». Concrètement, la moitié de la classe part en stage durant un mois, les autres le mois suivant. Ce système est « une très mauvaise idée » pour 86% des enseignant-e-s. En effet, les difficultés sont nombreuses pour les profs qui doivent assurer à la fois l’intégralité de leurs cours et dans le même temps réaliser le suivi des stages nécessitant des temps de route parfois importants. Les raisons invoquées à la mise en œuvre de cette pratique sont un constat de terrain confirmé par les enseignant-e-s interrogé-e-s : en moyenne, les élèves trouvent « plutôt difficilement » leurs lieux de stage. Evidemment, le type de formation et le lieu de l’établissement sont des critères importants. Il est plus difficile, par exemple, de trouver suffisamment de lieux de stage dans « l’industrie » que dans les sections « tertiaires ». Présentée comme LA solution pour répartir les élèves entre les entreprises tout au long de l’année, cette stratégie de stages décalés doit être abandonnée. Elle masque surtout les sur-effectifs des classes. S’il est nécessaire de dédoubler les classes pour que les élèves partent en stages ou aient de meilleures conditions de travail, pourquoi - tout simplement - ne pas doubler le nombre de classes ? Les élèves, les enseignant-e-s et les entreprises accueillant les stagiaires y gagneraient.

Des centaines de milliers d’euros perdus par les enseignants…

Le décret n° 2015-476 du 27 avril 2015 a institué une « indemnité de sujétion » pour les enseignant-e-s de lycée pro qui assurent au moins 6h de cours dans les classes de 1ère et terminale Bac Pro, ou en classe de CAP. Cette indemnité, même si elle n’en reprend pas les conditions, a été instaurée en remplacement de la rémunération des CCF. Mais attention, soyons très clairs : cette nouvelle indemnité n’est absolument pas liée à la réalisation des CCF, qui, in fine, ne sont donc plus rémunérés en tant que tels. L’abandon des épreuves ponctuelles nationales – considérées comme trop couteuses- était à ce prix. Une fois cette suppression actée, nul besoin de continuer à payer les enseignant-e-s pour la mise en œuvre de ces épreuves pourtant chronophages.

Mieux encore, plus de 80% des enseignant-e-s sont concerné-e-s par cette indemnité, qui représente 400 euros par an (versée mensuellement à raison de 33,33€ par mois).

Or, il s’avère que seul-e-s 47% des collègues sont informé-e-s de son existence. 16 % des enseignant-e-s savent qu’ils n’en bénéficient pas alors qu’ils le devraient (ce qui représente plus de 600 000 euros par an pour l’Etat !) et 37% des enseignants de LP ne savent pas si cette indemnité leur est versée ! Vite, une vérification sur le bulletin de salaire s’impose…

Dans le cas où cette indemnité ne vous serait pas versée, contactez-nous par mail à l’adresse contact@cgt-ep.org.

Plusieurs dizaines d’enseignant-e-s ont déjà récupéré leur dû grâce à nos démarches…

Second sujet lié au suivi des stages : dans seulement 20% des cas, les heures liées au suivi des PFE sont comptabilisées. 31% des collègues ne savent pas (ce qui signifie donc que les heures ne sont pas comptabilisées, sinon ils le sauraient). Ce décompte est important. Le statut des PLP est très clair sur le sujet (article 31 du décret n°92-1189 du 6 novembre 1992). Extrait :

II. - Pendant les périodes de formation en entreprise des élèves d’une division, chaque professeur de lycée professionnel enseignant dans cette division participe à l’encadrement pédagogique de ces élèves. La charge de cet encadrement est répartie entre les enseignants en tenant compte, notamment, du nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement qu’ils dispensent dans cette division.

L’encadrement pédagogique d’un élève est comptabilisé dans le service du professeur pour deux heures par semaine, dans la limite de trois semaines par séquence de stage. Lorsque ce décompte conduit un professeur de lycée professionnel à dépasser ses obligations hebdomadaires de service, il bénéficie du paiement d’heures supplémentaires.

Prenons l’exemple d’une classe de 20 élèves qui part en stage 4 semaines. Un enseignant qui travaillerait 5 heures avec la classe et suivrait 6 élèves en stage devrait voir son service comptabilisé comme suit :

Nombre d’heures de cours perdues : 4 x 5 = 20h Nombre d’heures de suivi : 6 x 3 x 2 = 36h Sur la période, l’enseignant doit se faire rémunérer 16 heures supplémentaires par son établissement !

Les chefs d’établissements ne sont bien souvent pas informés de ces mesures. Qu’à cela ne tienne, un courrier au rectorat règle bien souvent la situation. N’hésitez pas à vous rapprocher du syndicat pour vos démarches ou pour vérifier vos droits. D’après notre enquête, seuls 11% des enseignant-e-s ont déjà été rémunéré-e-s de ces heures supplémentaires.

Là encore, c’est une grosse économie pour le Ministère…

Temps de travail des enseignant-e-s bien loin des 35 heures !

Qui n’a jamais entendu lors d’un repas de famille, au bistrot du coin ou même dans la bouche d’un Président de la République (Merci M. Sarkozy) que les enseignant-e-s travaillaient 18h par semaine (désolé pour les agrégé-e-s ou les PEPS) ? Le ressenti des collègues est bien différent. 5% des enseignants de LP estiment travailler moins de 35h par semaine, 15% sont à 35h, quand 47% considèrent travailler entre 36 et 40h et même 33% passer plus de 40h pour le boulot. Rappelons que les enseignant-e-s ne sont pas passé-e-s aux 35h. Alors quand nous entendons des responsables politiques envisager d’augmenter de 2h le nombre d’heure de cours par semaine pour les profs, non merci.

Sur la question de l’évaluation…

La question de l’évaluation des élèves est récurrente. Elle occupe chaque nouveau ministre, mais également chaque organisation liée au monde de l’éducation (parents d’élèves, syndicats…). La CGT n’échappe pas à la règle. Les résultats de notre étude sont révélateurs de ces débats :

48% des collègues considèrent, sur un plan pédagogique, que le CCF (Contrôle en Cours de Formation) est un bon mode d’évaluation ou de certification des élèves, contre 52% qui pensent le contraire. Indécision…

En revanche, les résultats sont sans ambiguïté sur 2 points : 83% des enseignant-e-s de LP estiment que le CCF est moins impartial que l’épreuve ponctuelle. Pas étonnant, nous savons tou-te-s qu’un-e élève pénible toute l’année bénéficiera de moins de clémence que son camarade, élève modèle, lors d’une évaluation en CCF. Mais le système est pervers. Combien d’enseignant-e-s, parfois sur pression de leur direction (dans 18,5% des cas tout de même) sur-évaluent leurs élèves pour obtenir de bons résultats aux examens, et ainsi contenter l’établissement, l’inspecteur ou les familles ? C’est une des limites du CCF…

Second point catégorique, pour 82% des collègues, l’organisation des CCF entraîne une surcharge de travail. Et dans la mesure où ce travail supplémentaire n’est pas pris en compte dans la rémunération, les collègues s’essoufflent et se sentent mis à contribution pour faire réaliser de belles économies à l’administration. Sans compter les ressentis d’injustice en salle des profs, entre le collègue qui prépare 12 CCF et son collègue qui n’est pas concerné…

Le contenu des référentiels est également mis en cause par les collègues. Plus de 67 % des enseignant-e-s de LP les jugent inadaptés au profil de nos élèves, et, à près de 74% inadaptés aux réalités du monde du travail. Bref, on comprend mieux qu’il soit parfois difficile d’enseigner si le professeur, lui-même, n’est pas totalement convaincu de la finalité de son enseignement. Et si les profs étaient davantage associé-e-s à la définition des référentiels ?!

Quelles sont les revendications des enseignant-e-s de Lycée Pro ?

Sans surprise, l’augmentation de la rémunération est, de très loin, la première revendication des enseignant-e-s (c’est une priorité pour 78% des enseignant-e-s). Pas étonnant, dans ce cas, que près de 77% d’entre eux effectuent des heures supplémentaires. Dans la grande majorité des cas (77%), c’est un moyen d’améliorer cette rémunération. Bien entendu, faire des heures supplémentaires ne relève pas d’une volonté farouche de passer davantage de temps avec les élèves.

Pour la CGT, le partage du temps de travail passe par le refus des heures supplémentaires. D’ailleurs, la transformation des heures sup en postes permettrait l’embauche de plus de 7000 collègues, rien que dans l’enseignement privé ! En revanche, ce refus des heures sup doit s’accompagner d’une substantielle augmentation des salaires. Le PPCR, véritable poudre aux yeux, n’a pas rempli ses objectifs initiaux promis. Il est temps que nous obtenions gain de cause !

Viennent ensuite des demandes à niveau quasi équivalent :

  • revoir les programmes pour 48% des collègues,
  • réformer les modalités d’évaluation des élèves (44%),
  • baisser les effectifs par classe (43%) (ce point est vraisemblablement surtout demandé par les profs de matière générales qui travaillent en classe entière voire en classes regroupées),
  • développer la co-intervention en classe (34%) ce qui nécessite la mise en œuvre de moyens supplémentaires,
  • titulariser les suppléant-e-s et mettre en place un corps de titulaires remplaçant-e-s (32%)

D’autres revendications sont posées (réduction du nombre d’heures de cours, pour les profs comme pour les élèves, ou encore rééquilibrer le calendrier scolaire). Mais ces revendications, aussi importantes soient-elles, ne semblent pas prioritaires. Les enseignant-e-s regrettent la piètre qualité de notre formation continue. Pour 85% des collègues, elle est « insuffisante et devrait être développée ». Temps de travail, formation, conditions de travail, le message est limpide : les enseignant-e-s ne veulent pas « moins travailler ». Ils veulent « mieux travailler ». Qu’on se le dise !

Le « tout apprentissage » : un casus belli !

31% des établissements semblent déjà proposer des formations en apprentissage. La mixité des publics (jeunes sous statut scolaire et apprenti-e-s) reste marginale (8%) mais se développe. Il faut dire que la tendance politique est totalement axée en ce sens, avec un objectif fort de réduction des dépenses pour l’éducation nationale. Le transfert aux régions des lycées professionnels, avancé sous Sarkozy, puis par Hollande, par Fillon et Macron durant la campagne présidentielle est donc dans l’air du temps. Cette hypothèse est rejetée par 88% des enseignant-e-s de LP.

L’apprentissage est une voie de formation intéressante, pour un public limité, dans des secteurs précis, et au delà d’un certain niveau d’étude. Vouloir imposer une formation en apprentissage à l’ensemble des jeunes qui choisissent la voie professionnelle serait totalement inefficace, et ne correspond ni à la réalité économique des entreprises, ni au besoin des élèves et de leurs familles. D’ailleurs, 78% des collègues interrogé-e-s considèrent que les formations sous statut scolaire ne doivent pas être remplacées par le développement de l’apprentissage. Manifestement, nous allons devoir mener le combat pour défendre les lycées pro et leurs personnels !

Force est de constater que les enseignant-e-s des Lycées Professionnels privés se préoccupent de l’avenir de leur profession, et que leurs attentes sont nombreuses. La CGT Enseignement Privé a réalisé cette enquête (une première dans notre secteur) pour que ses revendications collent au plus près des aspirations des collègues.
Nos positionnements sont confortés par cette étude : nos revendications syndicales correspondent aux besoins de la profession.
Notre rôle va maintenant consister, plus que jamais, à interpeller le Ministère, les institutions de la République ou encore les établissements afin que nos conditions de travail s’améliorent, et que le Lycée Professionnel soit véritablement une filière valorisée au sein de l’Éducation Nationale !
Est-ce que ce sera suffisant ? Sans doute pas. L’intervention des personnels et leurs mobilisation avec le syndicat seront indispensables pour imposer nos idées...