Société

 Parole à… Jean-Pierre Devaux

 

Service juridique de la CGT-Éduc’action et chargé de l’étude des documents statutaires présentés en CTM de l’éducation nationale

Comment est régi le statut de la Fonction Publique ?

Les agents de la FP sont régis par le statut général des fonctionnaires qui se décline en 4 titres [1] et par les statuts particuliers prenant la forme de décrets, qui permettent à chaque fonctionnaire d’être titulaire d’un grade, d’un corps donné et d’avoir un véritable déroulement de carrière au regard des emplois occupés tout au long de son parcours professionnel et de sa manière de servir. Dans une certaine mesure, l’ensemble de ces textes correspond à ce qu’est le code du travail pour les salariés du privé et définit les droits et devoirs des agents dans l’exercice de leurs fonctions en toute indépendance.

Quel est le rôle de la Fonction Publique ?

Sa vocation première est d’être au service de tous. Elle participe et contribue à l’accès des citoyens aux droits fondamentaux (santé, enseignement, culture, sécurité des biens et des personnes, communication…). Elle assure l’égalité de traitement de tous, quels que soient l’origine, la situation professionnelle et économique, les opinions ou encore, l’endroit où l’on vit. De par son financement, elle appartient à la Nation.

Pour ce faire, la Fonction publique situe son action hors de la concurrence et des lois du marché. Le statut n’est, en aucun cas, un privilège accordé aux fonctionnaires. Porteur de droits et de devoirs, il constitue le socle d’une Fonction publique accessible à tous.

En quoi est-il attaqué par les gouvernements successifs ?

Pour les porteurs d’une vision libérale de la société, il y aurait toujours trop de Fonction publique, trop de fonctionnaires. Ils colportent de multiples contre-vérités pour convaincre du bien-fondé de leur projet : confier au secteur marchand une grande partie de la sphère publique.

Les logiques libérales n’ont fait qu’accentuer les inégalités d’accès pour tous les usagers. Cela s’accompagne de cadeaux aux entreprises qui financent leurs investissements par des fonds publics. De plus, leur main d’œuvre pour une bonne part payée au Smic les exonère de cotisations sociales. Souvent quand le secteur public confie certaines de ses missions au privé, ce dernier bénéfice de diverses exonérations, voire de subventions. La majorité des dépenses étant prise en charge par les contribuables !

Partout et quelle que soit sa situation, le citoyen doit pouvoir trouver un échelon de la Fonction publique capable de répondre à tous ses besoins. Une telle conception s’oppose à un pilotage de la FP au travers de normes comptables. Ce qui est vrai pour les effectifs l’est également pour d’autres domaines. Par exemple, la tarification à l’activité de l’hôpital - la fameuse T2A - qui consiste à privilégier la rentabilité et les activités lucratives. Cela détériore l’offre de soins et accélère la fermeture de services.

Elle ne peut davantage s’accommoder d’une Fonction publique à 2 ou 3 vitesses selon l’endroit où l’on vit. C’est pourquoi, toutes les prétendues réformes qui conduisent à créer des services publics de différente qualité ne sont pas recevables. L’excellence partout doit être le seul critère à mettre en avant en matière de qualité du service public.

Si rapprocher l’administration de l’usager, faciliter ses démarches, sont de louables intentions, cela ne saurait se confondre avec des fusions, à savoir des regroupements n’ayant comme objectif que la réduction des effectifs et la mise en place de services n’ayant plus que des missions parcellaires à assumer.
Offrir un service public de qualité passe avant tout par la présence dans les services d’agents en nombre suffisant avec un statut protecteur de fonctionnaires et non par le recours d’agents en situation de précarité quasi permanente. Malheureusement, la nouvelle dénomination du Ministère de la Fonction publique, devenu Ministère de l’action et des comptes publics n’augure rien de bon en la matière…


[1Droits et obligations des fonctionnaires : loi 83-634 du 13 juillet 1983 ;
dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État : loi 84-16 du 11 janvier 1984 ; dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : loi 84-53 du 26 janvier 1984 ; dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : loi 86-33 du 9 janvier 1986).