RetraitéE - continuité syndicale Sécurité sociale UFR

 Un impôt invisible, la CRDS

 

Du 24 novembre au 15 décembre 1995, des manifestations les plus importantes depuis mai 68 font apparemment reculer le Gouvernement sur le Plan Juppé de réforme de la Sécurité sociale et des retraites.

On soufflait un peu, on avait tort, parce que deux semaines plus tard, en douce, par application de l’article 38 de la Constitution autorisant le Gouvernement à réformer la Sécurité sociale (loi 95-1348 du 30 décembre 1995) avec recours aux ordonnances (déjà, ce qui évitait des débats trop voyants) le gouvernement exerce une sorte de vengeance contre les travailleurs dont nous continuons depuis à payer la facture, mois après mois.

A l’époque la « dette de la Sécu » (dont nous contestons la réalité) se montait à la somme de 230 Mds de francs (question écrite n° 12991 Metzinger, JO Sénat 30-11-1995), soit 35 Mds d’euros.

Le gouvernement va monter une machine unique au monde : la CADES, Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (décret 96-353 du 24 avril 1996) après avoir crée le 24 janvier l’impôt dit Contribution pour le Remboursement de la Dette Sociale, pour « amortir » cette somme finalement assez minime au regard des recettes de la Sécu.Au passage, cette caisse va permettre , au travers des emprunts successifs en France et surtout à l’étranger, d’engraisser quelques gros prêteurs qui spéculent sur la « dette » française. Pensez, pendant ses dix premières années d’existence, cet impôt de 0,5%, prélevé chaque mois sur votre feuille de paye ou de pension, a rapporté 50 milliards d’euros soit un an d’impôt sur le revenu ! Pour ses 20 ans, la CADES aura remboursé – pardon, amorti-, 124,7 milliards d’euros et surtout versé 47,2 mds d’euros d’intérêts à ses avisés prêteurs.

Entre temps, les gouvernements ont chargé la barque. Cet impôt qui ne devait durer que 13 ans est trop commode ; en 97 Jospin transfère à la CADES 13 milliards d’euros correspondant « à des dettes non financées » ; la CRDS est prolongée jusqu’en 2014. En 2004, le « plan de redressement de la Sécu » de Douste-Blazy transfère 50 milliards supplémentaires de « dettes » + 15 mds d’euros de « déficits prévisionnels ». La date butoir de 2014 est abrogée et la ponction mensuelle prolongée jusqu’à extinction de la dette (loi du 13 août 2004).

En 2005, lors de l’examen de la LFSS, loi de finance de la Sécurité sociale, le Parlement, à l’initiative de certains députés, décide que tout nouveau transfert de dette à la CADES doit être accompagné d’une augmentation des recettes de la Caisse pour ne pas prolonger la durée d’amortissement, ce qui signifie qu’il est interdit de prolonger la CADES ou d’inventer un organisme ayant les mêmes fonctions. La mort annoncée se situe aux alentours de 2021-25.

Le taux de la CRDS, est fixé à 0,5 % du revenu brut qu’il soit salaire, retraite, ainsi que patrimoine, vente de métaux, objets précieux et les jeux de hasard, etc.
Les salaires des apprentis et le RSA en sont exonérés mais pas les allocations logement ni, depuis 97, les prestations familiales.

Donc, nous payons depuis 1996 (le plus souvent sans savoir à quoi correspond cette ligne sur notre feuille de paye ou de pension) le remboursement de déficits qui, si l’on respectait le préambule de la Constitution de 46 toujours inscrite en tête de notre actuelle constitution, devraient être pris en charge par l’État.

Le pire ce sont les résultats décevants de ce plan qui devait rapporter 17 milliards en 1996 et 11 en 1997 : ces années se soldèrent par un déficit de 52 et 38 Mds.
Le contrôle du Parlement est édifiant : le rapport Vaisselle (Sénat n°248 2003) n’emploie-t-il pas des expressions aussi fortes que « de la caisse d’amortissement à la caisse noire » ou « tentation de fuite en avant ».

Mais nous payons encore cet impôt qui n’est pas virtuel, en principe jusqu’à 2024 … mais les plus âgés d’entre nous se souviennent que la Vignette Mollet s’est métamorphosée mais n’a pas été supprimée !