L’Amérique latine en temps de Covid
La pandémie a touché l’ensemble des systèmes éducatifs. C’est tout particulièrement vrai en Amérique latine où une grande majorité de pays a choisi la fermeture des écoles ou l’alternance pédagogique, souvent dès le mois de mars 2020 et parfois jusqu’à aujourd’hui.
Comme ailleurs dans le monde, les questions de continuité pédagogique, d’égalité d’accès aux matériels et réseaux numériques, comme de reprise dans des conditions sanitaires dignes se sont posées aux enseignant·es et à leurs organisations syndicales et associatives.
Le 24 février dernier, à la veille de la reprise prévue dans plusieurs pays le 1er mars, le centre de recherche « Otras Voces en Educación » organisait une réunion d’échanges d’informations sur le retour en présentiel.
L’ensemble des représentant·es des associations et syndicats présents à cette réunion dénoncent les conditions du télé-enseignement, vraie catastrophe dans des pays où l’accès à Internet est très faible, voire inexistant pour les familles populaires et les zones rurales, tant les prix pratiqués par des entreprises privées de télécommunication sont prohibitifs. Ainsi, en Uruguay, les abonnements à Internet par l’entreprise nationale de communication sont de 5,59 dollars, inaccessibles pour de nombreuses familles qui subissent, de plus, la vague de licenciements liée à la pandémie.
Faute de réseau internet adapté et/ou à bon marché, la télévision a parfois joué un rôle prépondérant dans la continuité pédagogique comme au Mexique avec le programme « Aprende en Casa » dont la CNTE
critique l’absence d’échanges humains.
Partout, la fermeture des classes s’est faite dans la plus grande confusion. En Colombie, à partir du mois de mai 2020, le gouvernement national impose la modalité de l’alternance mais de manière complètement improvisée et sans garantir aux enseignant·es la possibilité de déconnexion, rendant les conditions de travail très difficiles, nous dit le représentant de la FECODE.
Les conditions de reprise sont elles aussi improvisées et se font souvent sans négociations avec les organisations syndicales. Plusieurs pays ont choisi de donner priorité à la réouverture en zone rurale, mais ce sont souvent les régions où les conditions sanitaires sont impossibles à tenir, faute de toilettes en bon état et d’un réseau d’eau potable efficient, quand il ne s’agit pas aussi d’absence d’électricité. Au Pérou, le SUTEP estime que la moitié des écoles primaires n’a pas d’eau et que 80 % de celles-ci sont situées en milieu rural.
Une rentrée progressive était prévue au Costa Rica pour le 1er mars mais la liste des écoles ouvertes n’était pas publiée une semaine avant ; dans le même temps, l’APSE considère qu’aucune école ne peut être ouverte en respectant un protocole sanitaire de plus de 100 pages.
Le 1er mars était également la date prévue de retour des élèves chiliens si les familles le souhaitaient. Si la campagne de vaccination des enseignant·es a démarré fin février, le Colegio de Profesores de Chile, émet des réserves quant aux conditions de rentrée et craint qu’il faille attendre mi-avril pour que la moitié des enseignant·es soit vaccinée.
Quant aux syndicalistes brésiliens, ils et elles n’hésitent pas à parler de « génocide » tant la politique sanitaire du gouvernement fédéral est aberrante. C’est pourquoi un calendrier de lutte unitaire pour la défense de l’Éducation publique et contre les mesures gouvernementales y a été organisé pour le mois de mars.
En conclusion, partout le même constat d’un droit à l’éducation et à la santé attaqué et fragilisé !