14e Congrès Motion - Formation professionnelle et AFPA
L’organisation de la formation professionnelle s’est appuyée sur une loi fondatrice en 1971, dite loi DELORS. Elle posait les bases d’une formation qui ne se réduit pas à un outil d’adaptation des salarié·es mais portait la vision d’un moyen de développement personnel, d’émancipation et de promotion sociale, entre autres.
La loi de 2018, dite « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », prend le contre-pied exact de cette vision. C’est l’aboutissement d’un travail revanchard du patronat qui n’a eu de cesse que d’atteindre son objectif libéral : toujours moins de dépenses publiques, toujours plus de concurrence, réforme de la protection sociale et du marché du travail.
Le constat, 5 ans après, est amer pour les travailleurs et travailleuses. La monétisation du Compte Personnel de Formation s’est traduite par un vol pur et simple des capacités à se former pour toutes et tous, sans parler des escroqueries qui continuent d’envahir nos mails et SMS.
Les travailleurs et travailleuses deviennent responsables de tout pendant que l’entreprise n’a plus d’obligation de financer son plan de formation. Le découpage des diplômes et des certifications en blocs de compétence est une opportunité pour l’employabilité vantée par le patronat. Bientôt toutes et tous embauché·es avec un bout de diplôme, pour faire un bout de travail et payé.es quelques pièces, comme l’était le/la tâcheron·ne !
Cette attaque massive contre un système crucial, à l’heure de l’urgence sociale et environnementale, doit nous mobiliser. Sans formation qualifiante, gratuite et rémunérée, gagner un travail avec un salaire digne sera toujours plus difficile à obtenir. Sans service public de la formation professionnelle, la qualité des formations continuera de se dégrader et son accès sera toujours plus inégalitaire sur le territoire.
La marchandisation de la formation professionnelle a pour principaux effets de dégrader la qualité à tous les niveaux, de limiter l’accès à une formation qualifiante et de détériorer les conditions de travail.
C’est ce que subit l’AFPA de plein fouet. Annoncé en octobre 2018, le plan sauvegarde de l’emploi (PSE) prévoyait initialement la fermeture de 38 sites et la suppression de 1530 postes, pouvant aller jusqu’à 1985. La mobilisation des salarié·es et de nombreux·ses élu·es politiques a permis de réduire le nombre de fermetures de centres à 34 et le nombre de licenciements à 1111, pouvant aller jusqu’à 1559. Après de nombreux épisodes, l’homologation du PSE a été annulée par le Tribunal Administratif le 23 juillet 2020, une décision confirmée par la Cour d’Appel le 22 décembre 2020. La DREETS a alors décidé de se pourvoir en cassation devant le Conseil d’État.
Sur le fond et en résumé de ces procédures judiciaires, il s’agissait d’arbitrer sur le « contrôle par l’autorité administrative des obligations de l’employeur en matière de prévention des risques pour, durant la réorganisation de l’entreprise, assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleur·ses à l’occasion de l’établissement d’un document unilatéral portant sur le plan de sauvegarde de l’emploi ».
Le résultat est tombé le 21 mars 2023, le Conseil d’État, donne raison à la CGT, SUD et un collectif de salarié·es et déboute le pourvoi du Ministère du travail de l’époque qui était tenu par… Mme BORNE ! Cette longue procédure que nous avons portée depuis 2019 s’achève donc par une victoire. C’est une décision qui fera également date pour d’autres entreprises, par la jurisprudence qui va en découler.
L’État n’a de cesse, sous l’impulsion du patronat, de continuer la destruction de L’AFPA devenue EPIC. Ambroise CROIZAT avait permis la création de cette structure pour faciliter la reconstruction du pays d’après-guerre.
Pour faciliter la transition écologique et les reconversions professionnelles, les besoins en formation seront énormes. Par exemple, dans l’industrie automobile, ce sont des milliers d’emplois qui seront impactés par la fin des moteurs thermiques. Pour construire et rénover massivement le logement social, ne faudrait-il pas aussi une main d’œuvre qualifiée à la hauteur des enjeux ?
N’est-il pas urgent de prolonger son œuvre par la création d’un service public de la formation professionnelle, construit avec le réseau des GRETA, du CNAM, des CRP et de l’AFPA ?
Saint Pierre de Quiberon, 26 mai 2023