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 Brésil : après les élections, reconstruire l’Éducation

 

Après une campagne électorale difficile, c’est donc Lula da Silva qui a battu le président Bolsonaro dans les urnes et qui devrait gouverner la fédération brésilienne le 1er janvier prochain.

Il s’agit d’une victoire permise par l’engagement des mouvements sociaux, en particulier les syndicats, mais aussi par la participation massive des populations pauvres, notamment dans le Nordeste rural. Mais c’est aussi une victoire qui nécessite de changer le rapport de force, car les bolsonaristes ont tenté de tenir les rues : contrôles inopinés opérés par la police routière fédérale dans les régions « lulistes » le jour même des élections, blocages d’autoroutes par les patron·nes routier·es au lendemain des résultats, rassemblements devant les casernes de 24 États sur 27 pour demander l’intervention de l’armée, manifestation de 30 000 personnes dans la capitale Brasília… C’est dire que le contexte politique et social est difficile et que le bolsonarisme est bien installé dans le pays, comme le prouve la 1ere place du Parti Libéral, tant au Sénat qu’à la Chambre des Député·es ou le nombre d’États dont les nouveaux·elles gouverneur·ses sont des allié·es du président battu. Symbole dramatique de la « bolsonarisation des esprits », l’attaque ce 25 novembre de deux écoles à Aracruz dans l’État d’Espírito Santo, provoquant trois décès et onze blessé·es, par un jeune de
16 ans portant un symbole nazi sur ses vêtements.

L’équipe de transition, dirigée par le futur vice-président, a pu commencer à travailler mais elle doit composer avec les décisions déjà prises par le gouvernement Bolsonaro et notamment le budget qui ne prévoit aucune dépense sociale. Tout l’enjeu aujourd’hui est d’avoir l’accord du parlement pour amender celui-ci.

La « journée de la conscience noire » s’est déroulée le 20 novembre dernier. La CNTE (Confédération Nationale des travailleur/ses en Éducation, membre de la CUT) a choisi ce slogan pour sa campagne : « Re-raconter l’Histoire pour la mémoire de la population noire ». Elle rappelle que le Brésil a la population noire hors Afrique la plus importante au monde et que l’Histoire du Brésil doit aussi se redire à partir de la mémoire des noir.es vivant dans le pays et en insistant sur l’égalité que doit permettre une éducation publique de qualité.

Dans ce contexte, outre la dénonciation des mesures prises depuis le coup d’État qui a mené à la destitution de Dilma Roussef et durant la présidence Bolsonaro, les organisations syndicales de l’Éducation (CNTE affiliée à la CUT, Sinasefe afilié à la CSP Conlutas…) posent leurs revendications : l’augmentation de l’aide « Bolsa Familia » à destination des familles en vulnérabilité sociale et du salaire minimum ; un budget de l’Éducation qui permette de répondre aux investissements dans l’enseignement supérieur et la recherche, aux différents programmes à destination de l’enseignement basique, notamment sur l’alimentation scolaire, les transports, la connectivité… Voilà pour les mesures d’urgence.

Plus généralement, les organisations syndicales de l’Éducation réclament le retour et l’amélioration des programmes de formation des enseignant·es et des conseiller·es scolaires, des mesures d’action contre les inégalités régionales de financement des écoles, des mesures salariales… Enfin, elles réclament l’arrêt des partenariats entre écoles et réseaux d’enseignement avec des fondations et des entités à but lucratif, demandant que « les investissements publics soient dirigés vers l’éducation publique et la valorisation de ses professionnel.les » [1]


[1Extrait d’un document remis par la CNTE (confédération nationale des travailleur/ses en éducation) au coordonnateur du groupe de travail Education de l’équipe de transition, le 22 novembre 2022.