Communiqué CGT FERC Sup - M. Hetzel, l’autonomie des universités et la réaction ne sont pas les bienvenues au ministère de l’ESR
La CGT FERC Sup a appris avec consternation la nomination de M. Patrick Hetzel comme ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche (ESR).
Pour rappel, la CGT FERC Sup avait, avec toute la CGT, appelé à voter pour le programme du Nouveau Front populaire (NFP) au lendemain de la dissolution décidée par le Président Macron. Cet appel était fait dans une double démarche de combat résolu contre l’extrême droite et ses idées, et de lutte pour le progrès social. Le Président Macron, niant le résultat des urnes qui l’a désavoué ainsi que sa politique, a refusé de nommer un gouvernement issu du NFP, pourtant arrivé en tête. À l’inverse, il a installé un gouvernement d’alliance entre son parti et la droite, avec le soutien de l’extrême droite.
Pour la CGT FERC Sup, ce gouvernement de droite, libéral et conservateur, est plus qu’inquiétant sur son orientation.
Concernant l’ESR, M. Hetzel est une personnalité qui est à l’opposé de ce dont a besoin le service public.
Selon Le Monde, M. Hetzel promeut une « vision libérale des universités » : en 2022, il préconise dans un article pour la revue de l’UNI de : « Débureaucratiser et faire respirer le système », « donner davantage d’autonomie pédagogique et budgétaire aux établissements », ou encore « permettre aux universités qui le souhaitent d’expérimenter des dispositifs de gouvernance nouveaux ». Et en effet :
- Adepte d’une université à deux vitesses (celle qui développe une recherche à un niveau mondial et celle qui doit insérer professionnellement les étudiant·es après 3 ans), M. Hetzel a écrit un rapport en octobre 2006 « De l’université à l’emploi » qui devait largement inspirer la loi LRU l’année suivante : autonomie et restructuration, sélection à l’entrée, innovation et « partenariat » avec le patronat plutôt que recherche et émancipation, régionalisation, développement de l’apprentissage dans le Supérieur... Ce rapport est la préfiguration de la politique de l’ESR depuis 15 ans.
- M. Hetzel était conseiller éducation du premier ministre Fillon (2007-2008) et directeur général de l’enseignement supérieur (2008-2012) sous Pécresse : il a ainsi participé au déploiement de la loi LRU de 2007, « l’autonomie » des établissements combattue par toute la communauté universitaire. Il est aujourd’hui nommé pour terminer le travail et accélérer l’acte II de l’autonomie voulu par Macron et amorcé par Mme Sylvie Retailleau (cf. les « expérimentations » en cours dans 10 établissements).
- M. Hetzel a voulu proposer une loi pour « mettre fin à l’occupation illicite des locaux universitaires », c’est-à-dire pénaliser « le fait de pénétrer ou de se maintenir dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement sans y être habilité (...) dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement ». En un mot, M. Hetzel veut mettre fin aux franchises universitaires et empêcher toute mobilisation étudiante.
- M. Hetzel, face à la mobilisation étudiante à Sciences Po Paris contre les massacres en Palestine, a voulu mettre en place une « commission d’enquête relative à l’entrisme idéologique et aux dérives islamo-gauchistes dans l’enseignement supérieur » (tout un programme !), dans la droite ligne de Vidal – Blanquer.
Sans compter les positions réactionnaires de M. Hetzel : son vote contre le mariage pour tous, son vote contre la procréation médicalement assistée (PMA) pour les couples de femmes et les femmes seules, son vote contre la constitutionnalisation du droit à l’avortement, la centaine d’amendements qu’il a portés contre le projet de loi sur la fin de vie… La CGT FERC Sup combat vivement la vision de la société portée par M. Hetzel.
Pour revenir à l’ESR, la CGT FERC Sup rappelle qu’elle s’est opposée et s’oppose toujours aux lois de restructuration = destructions de l’ESR public, LRU en tête. Elle s’oppose également à la sélection à l’université (ORE et ParcourSup) et réclame les moyens nécessaires (postes et budgets) pour accueillir dignement tous les étudiant·es. La politique menée depuis 20 ans a remis en cause les fondements-mêmes de notre service public d’ESR et dégradé notablement les conditions de travail et d’étude.
La CGT FERC défend fermement les libertés académiques et les franchises universitaires, l’Université est un lieu de savoirs et de confrontation d’idées, la contestation des idées reçues ou des politiques imposées y a toute sa place. Comme nous l’écrivions le 30 avril 2024 (voir communiqué CGT, FSU, FO et SUD) à propos des restrictions suite aux attentats du 7 octobre 2023 : « Nos organisations dénoncent cette volonté d’imposer une opinion politique, par l’usage de la force préfectorale ou de l’intimidation. Ce n’est ni aux préfets ni aux élus territoriaux ou nationaux de définir ce qui doit être enseigné ou débattu dans les enceintes universitaires, pas plus à propos de Gaza que sur d’autres sujets. »
M. Hetzel aura probablement à mettre en œuvre de nouvelles restrictions budgétaires dans l’ESR : pour 2025, ce sont 400 à 500M€ de coupes qui sont annoncés… La CGT FERC Sup apprécie que la ministre démissionnaire Sylvie Retailleau défende le financement de l’ESR au moment de partir. Il est bien temps, après avoir accepté la loi immigration de Macron et la première coupe de 904 M€ du budget ESR au début 2024. Le gouvernement Macron-Barnier porte la continuité et l’aggravation des politiques précédentes, à rebours du progrès social que nous défendons.
La CGT FERC Sup revendique encore et toujours :
- de supprimer le Crédit Impôt Recherche servi aux entreprises sans aucune évaluation, ni contrôle, et de reverser immédiatement les 8 milliards d’€ annuels de cette niche fiscale à l’ESR ;
- de consacrer 1,5 % du PIB à la recherche publique, et 2 % du PIB à l’enseignement supérieur ;
- la revalorisation du point d’indice de 25 % et son indexation sur l’inflation ;
- l’embauche massive de personnels titulaires sur des postes correspondant à leurs qualifications, pour assurer les missions et répondre aux besoins urgents et critiques de notre secteur ;
- de titulariser l’ensemble des contractuels qui assurent des missions pérennes ;
- le déploiement d’un vaste plan de rénovation du patrimoine de l’ESR, 2ème patrimoine de l’État et délabré à près de 60 % ;
- une baisse générale et immédiate du temps de travail (32h sur 4 jours, retraite à 60 ans) ;
- la revalorisation des retraites et des minimas sociaux et l’abrogation de la réforme des retraites ;
- le financement de ces mesures par la récupération de tout ou partie des 180 milliards d’€ d’aides publiques accordées chaque année aux employeurs privés, dont la majeure partie nourrit la rente ;
- la fin de la sélection à l’entrée à l’université, l’abrogation de la loi ORE et de ParcourSup ;
- la fin des frais d’inscription différenciés pour les étudiant·es étrangers, contre toute hausse ou libéralisation de ces frais ;
- le gel de l’acte 2 de l’autonomie, l’abrogation des lois de restructuration/destructions de l’ESR (LRU et suivantes).
La CGT FERC Sup se prononce pour un service public national d’Enseignement supérieur et de Recherche laïque, démocratique et émancipateur.
Elle invite tous les personnels à se réunir en Assemblées générales pour débattre des revendications et à participer à la mobilisation du 1er octobre appelée par CGT, FSU et SUD.