Repères revendicatifs - Pour une formation professionnelle initiale et continue émancipatrice
Introduction : les enjeux de la formation professionnelle initiale et continue
Bilan de la Loi « pour la Liberté de Choisir son Avenir Professionnel » : un big-bang ultra-libéral !
France Compétences, bras armé de la réforme
Un financement à revoir
L’organisation de la mise en concurrence
Orientation des élèves & information des salarié∙es
Une offre de formation lisible et accessible à toutes et tous
Regagner un service public national de l’orientation
Permettre l’information des salarié∙es
Former l’humain·e, la/le travailleur·se, la/le citoyen·ne : pour une formation initiale émancipatrice !
Blanquer et la Transformation de la Voie Professionnelle
La réforme Macron Grandjean : adéquationnisme radical
Une carte des formations initiales pilotée uniquement par l’insertion professionnelle
Mixage des publics et mise en concurrence
Le développement de l’alternance et de l’apprentissage dans le supérieur
Aide à l’apprentissage : un effet d’aubaine pour les entreprises
Entreprise : un lieu de formation discriminatoire
Entreprise, un lieu de formation dangereux
Les Écoles de production
Renforcer les droits des salarié∙es à la formation continue et à la qualification
Pour une formation continue de qualité : sortir des logiques d’appel d’offres et construire un service public de la Formation Continue
De nouveaux droits pour les salarié∙es
Du DIF au CPF : un droit individuel toujours plus attaqué
Le bilan de compétences
La validation des acquis de l’expérience (VAE)
Les certificats de qualification professionnelle CQP
Le « plan de développement des compétences » - PDC
Salaires, qualification vs Compétences
Découpage en bloc de compétences
Renforcer l’articulation formation, diplômes et convention collective
Introduction : les enjeux de la formation professionnelle initiale et continue
Le Préambule de la constitution de 1946 énonce dans son article 13 que « La Nation garantit l’égal accès de l’enfant et de l’adulte à l’instruction, à la formation professionnelle et à la culture ». Il proclame également que la formation professionnelle constitue un « principe politique, économique, et social particulièrement nécessaire à notre temps ».
La Loi « pour la Liberté de Choisir son Avenir Professionnel », les réformes de la « Transformation de la Voie Professionnelle », puis Macron-Grandjean du lycée professionnel ont profondément attaqué la formation professionnelle dans son ensemble.
Ces réformes trouvent leur inspiration dans la « stratégie de Lisbonne » élaborée au début des années 2000. Il s’agit d’une marchandisation du secteur de l’enseignement initial et de la formation continue. Ces réformes portées par des logiques de dérégulation et de privatisation ont augmenté les inégalités d’accès à la formation. La Loi « plein emploi » aggrave encore cela en réduisant la formation professionnelle à l’insertion professionnelle immédiate.
Pour la FERC-CGT, la finalité de la formation professionnelle n’est pas limitée à l’accès ou au retour à l’emploi, notamment si les entreprises ne créent pas d’emploi ou si les métiers disponibles sont mal payés ou sont particulièrement pénibles…Plutôt que l’employabilité immédiate ou l’adaptation au poste de travail, problématiques que le patronat cherche à imposer, la FERC-CGT défend une formation professionnelle source d’émancipation et de progrès social.
Pour faire face aux enjeux environnementaux et aux besoins sociaux, la nécessaire transformation de nos systèmes de production va générer d’importantes transformations des métiers et des emplois. Les exigences croissantes en matière de durabilité et de transition énergétique requièrent des qualifications nouvelles et des reconversions massives. Un investissement historique dans la formation initiale et continue est nécessaire pour assurer une transition juste et équitable pour toutes et tous.
Bilan de la Loi « pour la Liberté de Choisir son Avenir Professionnel » : un big-bang ultra-libéral !
La Loi « pour la Liberté de Choisir son Avenir Professionnel (LCAP) » de septembre 2018 a profondément modifié la formation professionnelle et bouleversée de fond en comble l’organisation de l’apprentissage en France. Elle s’inscrit dans le prolongement des lois "travail", qui fragilisent les garanties collectives. Elle fait porter sur chaque salarié∙e la responsabilité de son employabilité : elle ou il doit se former, développer ses compétences et les qualifications nécessaires à l’emploi.
France Compétences, bras armé de la réforme
France Compétences est le bras armé de cette réforme de la formation professionnelle. Présentée comme l’instance centrale de gouvernance et de financement de la formation professionnelle et de l’apprentissage, France Compétences a remplacé les instances de gouvernance nationales (Copanef, Cnefop) et absorbé le Fonds Paritaire de Sécurisation des Parcours Professionnels (FPSPP) et la Commission nationale de certification professionnelle (CNCP).
France Compétences est dotée d’une personnalité morale et d’une autonomie financière. Elle est composée de plusieurs collèges : l’État, les organisations syndicales de salariés, les organisations patronales, les Régions et des personnalités qualifiées. Le fonctionnement est théoriquement quadripartite, mais l’Etat, via les nominations des personnalités qualifiées, s’est assuré d’avoir une voix prépondérante.
En cas de non-prise en compte des recommandations de France Compétences, le code du travail prévoit que l’Etat peut se substituer aux branches professionnelles.
De plus, le passage des OPCA [1] au OPCO s’est accompagné d’un contrôle accru de la gestion paritaire par l’Etat. Cette loi représente donc un affaiblissement des possibilités d’intervention des organisations syndicales dans la formation professionnelle.
France Compétences, via sa commission « certification professionnelle », est chargée du pilotage des certifications avec l’actualisation du Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP) et du répertoire spécifique. Cela s’accompagné d’une refonte des procédures d’enregistrement des certifications inscrites au RNCP, qui ouvre une démarche dérogatoire pour un enregistrement plus rapide de certifications liées à des « métiers en émergence ou en forte évolution ».
De plus, les diplômes issus des ministères de l’éducation nationale et du supérieur sont enregistrés, de droit, mais à la condition d’être découpés en blocs de compétences. La subordination du ministère de l’Enseignement supérieur à celui du Travail est plus que visible dans l’obligation qui est faite aux établissements d’obtenir la certification de tous leurs diplômes en formation initiale et continue auprès de France compétence avant de soumettre la demande d’accréditation.
En confiant la formation professionnelle aux branches professionnelles, la Loi LCAP a modifié le fonctionnement des Commissions Professionnelles Consultatives (CPC) [2] : les représentant∙es des personnels de l’éducation nationale, de Jeunesse et Sports, de la Santé et Sociale, de la Culture et de l’Agriculture) en sont exclu∙es !
La volonté du gouvernement d’harmoniser le fonctionnement des CPC n’a pas amélioré leur fonctionnement, au contraire. C’est le pouvoir des branches professionnelles qu’il convient de diminuer.
Les enseignant∙es et les formateur∙trices ayant le regard technique et pédagogique, la FERC-CGT revendique que leurs organisations représentatives reviennent dans les discussions sur les diplômes, parmi les personnalités qualifiées.
Dans l’immédiat, en fonction des programmes de travail des 11 CPC, la FERC-CGT peut mettre en lien les camarades mandaté∙es par la confédération avec des formateurs∙trices et des enseignant∙es s des formations concernées par des rénovations de diplômes.
La FERC-CGT revendique l’abrogation de France Compétences. Dans l’immédiat, la FERC-CGT revendique que les organisations de salarié∙es aient la majorité des voix dans l’instance nationale décisionnaire sur la formation professionnelle que constitue France Compétences.
Un financement à revoir
Déjà en 2014, le choix avait été fait de diminuer la contribution des entreprises de 1,6% à 1% de la masse salariale, privant d’autant le financement de la formation professionnelle. Avec la loi LCAP, la taxe d’apprentissage a baissé avec la mise en place d’une « contribution unique à la formation professionnelle et à l’alternance », fléchée à 87% sur les contrats d’apprentissage et de professionnalisation. La part barème ou hors quota, rebaptisée solde de la taxe d’apprentissage (financement des équipements des lycées technologiques et professionnels) diminue donc de 23% à 13%, ce qui fragilise le fonctionnement des structures en bénéficiant.
Cette Loi LCAP organise la mise en concurrence de la formation, notamment par l’arrivée du financement au contrat (sorte de tarification à l’acte). Ce financement au « cout contrat » fragilise les petits CFA [3]. Les baisses de financement, les flux exponentiels d’aides aux entreprises entrainent, dès sa mise en place, un déficit structurel de France Compétences. L’une des réponses a été la baisse du Niveau de Prise En Charge (NPEC) des coûts contrats apprentissage. À la suite de cela certains CFA ont déjà annoncé ou acté la fermeture de formations y compris dans des secteurs dits en tension.
Dans l’immédiat, la FERC-CGT revendique la suppression des aides aux entreprises pour l’embauche d’apprenti∙es et l’utilisation de cet argent pour améliorer la formation initiale.
Pour la FERC-CGT, rétablir un réel droit à la formation professionnelle qualifiante implique de revoir et d’accroître son financement (obligation de financement de 2% de la masse salariale) et de la sortir de la marchandisation promue par la loi de 2018.
L’organisation de la mise en concurrence
La Loi LCAP brouille les frontières entre formation initiale et continue, qui renforce la mise en concurrence généralisée.
La modification du Code du travail a entrainé, entre autres, la suppression de la notion de formation professionnelle continue pour ne laisser apparaître que celle de formation professionnelle, entrainant un floutage avec la fusion des contrats de professionnalisation et du contrat d’apprentissage et l’extension de la possibilité d’entrée en apprentissage jusqu’à 29 ans révolus. Il n’y a pas de limite d’âge pour les travailleuses et travailleurs handicapé∙es (RQTH en cours), les créateurs d’entreprise, les ancien∙nes grands sportifs.
Au prétexte de « lever des freins » à l’entrée en apprentissage, la loi diminue la protection des apprenti·es mineurs : possibilité de déroger aux durées maximales hebdomadaires (35h) et quotidienne (8h), assouplissement du travail de nuit… Les ruptures de contrat d’apprentissage par l’employeur·se ont été facilitées.
La FERC-CGT revendique l’interdiction du recours à l’apprentissage avant 18 ans.
Le contrôle de l’apprentissage par les SAIA (Service Académique d’Inspection de l’Apprentissage) disparait. Depuis janvier 2021, Qualiopi (certification par ailleurs payée par les organismes demandant la certification) est le seul contrôle qui permet aux organismes qui dispensent des actions de formation, de bilan de compétences, de V.A.E et ou d’apprentissage, d’obtenir des fonds de financements publics et/ou mutualisés. Qualiopi, qui ne cache pas son inspiration néo-libérale, envisage l’éducation et l’insertion professionnelle des jeunes en termes de « besoins des clients […] et de service après-vente » ! Le contrôle qualité de Qualiopi, comme d’ailleurs de son prédécesseur Datadock, contrôle exclusivement les processus administratifs et organisationnels. Aucun contrôle sur le contenu pédagogique et scientifique de la formation n’est réalisé par les organismes accrédités Qualiopi, cela est d’ailleurs exclu de leurs compétences. Il n’y a aucun effet sur la qualité intrinsèque des formations. Les organismes de formation ont le libre choix parmi les 37 certificateurs Qualiopi privés.
La FERC-CGT revendique le renforcement des procédures d’habilitation des formations et le renforcement des moyens dédiés aux inspections et contrôles conduit par les ministères certificateurs (Éducation nationale, Agriculture, sanitaire et sociale, Jeunesse et Sports…), en fonction des périmètres des formations. Il doit veiller aux qualifications des encadrants, qualité et adéquation des équipements avec la formation, à leur formation continue, à leurs conditions de travail.
Ce contrôle doit notamment se centrer sur la qualité de l’enseignement d’un point de vue scientifique et pédagogique et prendre en compte les conditions de formation des apprenant·es : respect du temps de travail, absence d’heures supplémentaires imposées, respect des règles hygiène et sécurité, prévention des VSST, lutte contre le harcèlement et les pratiques de bizutage, rapport entre temps d’études en présentiel et à distance ou en hybride lors des temps de formation, formation au droit du travail, à l’existence des droits syndicaux, élection des représentant∙es au conseil de perfectionnement et réunions de celui-ci.
La FERC-CGT revendique la revalorisation de la culture générale et la recherche de l’émancipation des apprenant·es.
Avec la Loi LCAP, toutes les entreprises obtiennent la possibilité d’ouvrir un CFA. Les modalités d’ouverture d’une Unité de Formation en Apprentissage (UFA) dans un Lycée Professionnel sont assouplies par la suppression de l’obligation d’un vote en Conseil d’Administration.
La mise en concurrence entraine une dégradation des conditions de travail des salarié∙es des CFA, des organismes de formation et des salarié·es de l’enseignement privé indépendant, le passage des personnels des CFA publics vers les GRETA [4]. On constate également des pressions croissantes sur les Professeur·ses de Lycée Professionnel du public et du privé sous contrat pour effectuer des compléments de service dans des formations en apprentissage. Le statut des PLP est de plus en plus menacé.
Au ministère Jeunesse et Sports, les écoles nationales et les CREPS subissent également les effets de la Loi LCAP par leur mise en concurrence avec des organismes privés marchands. La délégation des certifications à tous les centres de formation amplifie le phénomène. Les services déconcentrés du ministère Jeunesse et Sports en région ne disposent plus des outils réglementaires pour garantir aux apprenant·es des formations de qualité.
La FERC-CGT revendique l’abrogation de la Loi « Liberté de choisir son avenir professionnel ».
Pour sortir de la mise en concurrence, la FERC-CGT revendique la nationalisation des organismes de formation initiale et continue.
La FERC-CGT revendique :
- L’arrêt des CFA d’entreprise (opportunité financière : cumul des aides entreprise et OF, main d’œuvre quasi gratuite souvent liée à un besoin de main d’œuvre ou de développement, formation sur-adéquationniste)
- Une revalorisation générale des grilles de rémunération afin que cesse le nivellement par le bas la dépréciation des carrières et de la qualification au détriment des compétences exclusivement liées à l’emploi.
- Des conditions de travail qui tiennent compte de l’ensemble du processus de formation (préparation, recherche, encadrement des stagiaires, activités induites et connexes)
- La couverture des salarié·es des CFA associatifs par la convention collective la mieux disante du champ de la formation ou de l’enseignement privé indépendant
- Un véritable statut de fonctionnaires catégorie A pour les formateur·ices des GRETA-CFA et des postes statutaires pour les personnels administratifs.
- L’augmentation des postes de fonctionnaires dans les établissements publics.
Orientation des élèves & information des salarié∙es
« la notion d’« orientation » est utilisée sous la forme active dans le langage administratif et sous la forme passive par les intéressé·es : « j’ai été orienté·e » signifiant par là qu’elles et ils l’ont subie comme une exclusion. » [5].
Dans la formation professionnelle initiale, les publics féminins subissent une double domination. Elles sont formées dans des filières qui reproduisent les stéréotypes de genre (professionnalisation du travail domestique, essentialisation des compétences dites « féminines ») et qui les condamnent souvent à des bas salaires, de la précarité, des horaires flexibles. Dans les formations féminisées, alors que sont invisibilisés les savoir-faire techniques et l’engagement physique du métier, il y a une mise en avant des « savoirs-être », notamment dans les métiers du soin et du lien. Inversement, dans les formations suivies par les hommes, on insiste sur la capacité à encaisser la pénibilité.
La FERC-CGT participe à la campagne confédérale sur la revalorisation des métiers du soin et du lien.
La FERC-CGT revendique une revalorisation de toutes les professions dites "féminines".
La FERC-CGT revendique un travail sur la diversification de tous les choix d’orientation trop conformes aux stéréotypes de genre.
La FERC-CGT souligne également la nécessité d’une mixité lexicale de toutes les professions.
Une offre de formation lisible et accessible à toutes et tous
Les intitulés de formation ne sont pas toujours lisibles. Par exemple, CAP « Monteur en Installations Thermiques » est moins lisible que « Plombier-Chauffagiste ».
De plus, la mise en place, uniquement dans la voie scolaire des « familles de métiers » complexifie encore l’orientation. Pour les représentant·es légales·aux et les élèves, il n’est pas toujours facile de repérer le métier désiré dans les intitulés. De plus, elles augmentent l’orientation subie et concentrent l’orientation genrée.
L’orientation ne doit pas non plus être subie en raison du manque de places dans les lycées professionnels publics de certaines académies ou certaines filières (ouvertures de classes insuffisantes). Ce manque est parfois aggravé par le choix de privilégier pour l’usage des plateaux techniques les GRETA, considérés comme plus rentables.
La FERC-CGT revendique l’abrogation des « familles de métiers ».
La FERC-CGT revendique des intitulés de formations stables, dégenrés, compréhensibles pour le grand public qui fassent au maximum référence à un métier clairement identifié.
Regagner un service public national de l’orientation
La FERC-CGT revendique l’égale dignité des trois voies du lycée.
Elle défend la possibilité pour tous les jeunes, quel que soit leur bac d’origine (professionnel, technologique, général), d’accéder à l’enseignement supérieur sans sélection, sans discrimination et gratuitement (gratuité pour toutes et tous les étudiant∙es quel que soit leur statut (étudiant∙es, salarié∙es, doctorant∙es...) [6] et quel que soit leur nationalité.
Parcoursup constitue un outil de sélection scolaire et social dont le processus est particulièrement anxiogène pour les élèves.
La mise en place de la plateforme « InserJeunes » renforce la mise en concurrence des voies de formations, sur la base de la mise en avant de l’insertion rapide dans l’emploi. L’orientation a été de plus en plus déléguée aux professeur·ses principale·aux.
La FERC-CGT revendique, au lycée et à l’Université, des moyens de remédiation des difficultés sociales et scolaires.
La FERC-CGT exige l’abrogation de la Loi ORE et de Parcoursup pour permettre le libre choix de l’orientation, la suppression des frais différentiés pour les étudiant·es étranger·es.
La FERC-CGT demande l’ouverture des places nécessaires dans le supérieur et des moyens d’accompagnement et des moyens matériels, budgétaires et humains permettant l’accès à une formation de qualité.
Pour permettre d’informer les jeunes et les représentants légaux, il faut regagner un service public national de l’orientation, avec des personnels statutaires en nombre suffisant spécifiquement formés à l’orientation.
Permettre l’information des salarié∙es
Une étude du CEREQ d’avril 2024 [7] montre que l’aspiration des salarié·es à se former ne suffit pas pour qu’elle se concrétise forcément. En effet, il est nécessaire que les salarié·es aient « accès à des espaces de délibération et de pouvoir disposer d’informations éclairées, pour construire plus concrètement la faisabilité de leur projet de formation et le réaliser ».
Dans l’entreprise, c’est le rôle des entretiens professionnels depuis 10 ans, mais ceux-ci ne sont pas respectés par la majorité des employeur·ses. Dans le contexte de la loi de 2018 qui renforce la responsabilité de la ou du salarié·e dans son parcours professionnel, il est nécessaire d’imposer aux employeur·ses de respecter leurs obligations d’accompagnement des salarié·es.
La loi du 5 mars 2014 sur la formation professionnelle avait créé un nouveau dispositif, soutenu par la CGT, le Conseil en Evolution Professionnelle. Il reste ouvert à toutes et tous, gratuit, indépendant de l’entreprise. Il doit permettre le conseil, l’accompagnement avec des personnels qualifiés et recrutés pour cette mission afin de faciliter l’accès à une formation continue qualifiante et favorisant reconversion ou évolution professionnelles.
Le gouvernement a choisi d’attribuer la gestion du CEP à des opérateur·rices régionale·aux privé·es.
La FERC-CGT exige des opérateur·ices issu·es du secteur non marchand, contrôlés par le dispositif public tant au niveau des prestations que de la professionnalisation de leurs intervenant·es. Elle milite pour que des accords de branche ou d’entreprises soient signés, à l’aide de représentant·es CGT, pour prévoir une prise en charge financière et sur le temps de travail des préconisations du Conseil en Evolution Professionnelle (CEP).
La FERC-CGT exige l’obligation d’un suivi de qualité de ces opérateur·ices, tant au niveau de leurs prestations que de la professionnalisation des intervenant·es.
La FERC-CGT revendique que le Conseil en Evolution Professionnelle s’effectue sur le temps de travail, avec le maintien de la rémunération.
La FERC-CGT milite pour qu’une campagne nationale pour le Conseil en Evolution Professionnelle, soit organisée par le gouvernement, sur le modèle des campagnes sur le CPF.
Pour la FERC-CGT, le CEP doit s’organiser au plus près des lieux de vie ou de travail de l’ensemble des salarié∙es. La FERC-CGT exige que les opérateur·ices soient issu·es du secteur non marchand dans le cadre d’un service public de la formation et de l’accompagnement.
Former l’humain·e, la/le travailleur·se, la/le citoyen·ne : pour une formation initiale émancipatrice !
La formation professionnelle initiale doit permettre l’émancipation de la jeunesse. Elle doit donner accès à une culture générale, technique et professionnelle de qualité, garantie d’une reconnaissance de la qualification et d’une évolution possible sur le long terme.
Pour cela elle doit s’inscrire dans une scolarité obligatoire jusqu’à 18 ans et être placée sous la tutelle unique de l’Éducation nationale via notamment la nationalisation des établissements privés sous contrat.
Blanquer et la Transformation de la Voie Professionnelle
Derrière le slogan d’une voie professionnelle « d’excellence et d’avenir » Jean-Michel Blanquer a poursuivi le démantèlement de l’enseignement professionnel sous statut scolaire.
Les nouvelles grilles horaires, aussi bien en CAP qu’en Bac pro, avec notamment l’explosion des heures d’accompagnement personnalisé et la diminution drastique des heures d’enseignement disciplinaire tant dans les matières générales que professionnelles ont appauvri les contenus de formation. L’introduction de la co-intervention et du chef-d’œuvre ont consacré une vision utilitariste du français et des mathématiques.
La mise en place en classe de 2nde Bac Pro, uniquement dans la voie scolaire, des « familles de métiers » regroupant différentes spécialités sous couvert de compétences communes a pour conséquence la déspécialisation du diplôme et donc sa déqualification. Cela intervient dans le contexte depuis 2009 d’une perte d’une année de formation professionnelle initiale avec le passage du bac pro en 3 ans.
Ayant perduré quelques années sous forme de diplôme intermédiaire, le BEP a définitivement été abrogé en décembre 2021 au motif qu’il ne répondait plus aux besoins du patronat.
La réforme Macron Grandjean : adéquationnisme radical
Pour Macron, la voie professionnelle, ses élèves et ses personnels sont des instruments pour atteindre les objectifs de la loi dite « plein emploi 2027 » : répondre aux besoins, à court terme, des métiers dits en tension. Pour rappel, ces métiers identifiés comme tels par le Patronat correspondent, en fait, à ceux liés par des contrats de travail précaires aux salaires indignes, et dont les conditions de travail et de sécurité sont dégradées.
Cette réforme, menée sous la double tutelle du ministère de l’Éducation et du Travail, repose sur un a priori idéologique : le mythe de l’entreprise formatrice.
D’où la dérégulation de l’année de terminale bac pro qui se caractérise par une perte conséquente d’heures d’enseignement professionnel et par l’apparition de "parcours en Y [8]" qui visent essentiellement à l’employabilité immédiate au détriment des poursuites d’études, amplifiant le tri social !
Pour remédier aux difficultés des élèves de la voie professionnelle en BTS, la FERC-CGT revendique des BTS passerelles, avec une 1ere année adaptée ou une année supplémentaire.
L’augmentation des Périodes de Formation en Milieu Professionnel (PFMP) au détriment du temps scolaire n’est pas acceptable. Leur « gratification », modique et financée exclusivement par de l’argent public, fait passer la formation des jeunes derrière les exigences de ce qui est considéré maintenant, par le patronat, comme un travail rémunéré. Cela conforte cette idée de main d’œuvre gratuite pour le patronat, habituant les élèves à de bas salaires. Compte tenu de la précarité d’un certain nombre d’élèves, cette gratification peut agir comme un frein à l’engagement dans la poursuite d’études.
Une carte des formations initiales pilotée uniquement par l’insertion professionnelle
La carte des formations professionnelles est politique puisqu’elle peut influer sur l’avenir des élèves.
Les modalités d’élaboration de la carte des formations sont modifiées. Les sous-préfectures, la région académique et le conseil régional organiseront la carte des formations, au niveau du bassin d’emploi. La création des Bureau Des Entreprises, en concurrence directe avec les Directeur·ices Délégué·es aux Formations, dont les missions consistent à renforcer les liens avec les entreprises et à participer à l’élaboration de la carte des formations va dans le même sens.
L’objectif annoncé est la fermeture de 25 % des formations prétendument non-insérantes pour la rentrée 2027. La fermeture de certaines filières va entrainer des suppressions de postes et des reconversions forcées.
Pour les ouvertures, sous couvert de répondre aux enjeux écologiques, numériques et démographiques, il s’agit surtout d’orienter localement les élèves vers les métiers dits en tension, avec le risque d’une jeunesse assignée à résidence, sans possibilité d’évolution. Cette organisation nie le droit à la mobilité géographique en réduisant l’offre de formation d’un territoire à ses besoins locaux. La même idéologie s’attaque au supérieur.
Cet adéquationnisme radical est renforcé par l’apparition dans les lycées pro de plusieurs dispositifs au centre desquels on retrouve France Travail ("un jeune, une solution" (qui s’applique aussi dans les promos 16-18 de l’AFPA), "Avenir pro", "Ambition emploi"). Des expérimentations du même genre sont menées par les CCI (« cap alternance »).
Pour la FERC-CGT une offre de formation diversifiée doit donc exister dans les lycées.
L’étude de la carte ne doit pas s’éloigner des personnels et des établissements : en ce sens la FERC-CGT revendique le retour à une étude par académie.
Le pacte, le développement du mixage des publics, la dérégulation de l’année de terminale participent à une remise en cause des Obligations Réglementaires de Service et constituent de puissants leviers d’annualisation des services. Ces attaques sur le statut font écho aux projets de territorialisation des PLP portés notamment par certaines Régions.
Les Régions sont propriétaires des lycées publics et à ce titre financent les locaux et leur fonctionnement. Le poids des conseils régionaux sur l’enseignement professionnel s’est progressivement accru et est aujourd’hui très important, notamment sur la carte des formations, la gestion des plateaux techniques et l’investissement pédagogique. Le transfert des personnels enseignants reste l’ultime étape de la régionalisation de l’enseignement professionnel sous statut scolaire. Certaines régions dans le cadre de la loi 3DS [9] voudraient expérimenter cette territorialisation des personnels. Elles veulent mutualiser les plateaux techniques pour mieux mettre en concurrence les voies des formations et les organismes.
La FERC-CGT s’oppose à ces projets et à tout transfert des personnels qui annonceraient la fin de la voie professionnelle au sein de l’Éducation nationale et une remise en cause du statut des personnels.
La FERC-CGT s’oppose à l’adéquationnisme et aux dispositifs qui l’accompagnent.
Par conséquent la FERC-CGT est opposée aux colorations des formations professionnelles : sans moyens spécifiques, sans référentiels, sans qualification reconnue et en partenariat exclusif avec les branches professionnelles. Elle revendique à leur place des transformations en options.
La FERC-CGT est opposée aux FCIL, car elles sont non-pérennes, locales et non-qualifiantes. Si ces formations répondent à un besoin réel, la FERC-CGT revendique leur transformation en diplôme de niveau 3 ou de niveau 4.
La FERC-CGT est opposée au développement tous azimuts des certificats de spécialisation (anciennes Mentions Complémentaires) délivrés par apprentissage. Elle revendique que ces certificats de spécialisation se fassent sous statut scolaire et que leur qualification soit inscrite dans les grilles salariales.
Mixage des publics et mise en concurrence
Par a priori idéologique, depuis de nombreuses années, les gouvernements successifs ont favorisé le développement de l’apprentissage dans les établissements scolaires et le mixage des publics (apprenti∙es, stagiaires de la formation continue et élèves).
La volonté de développer le mixage des publics et des parcours est présente dans toutes les réformes depuis la mise en place du Lycée des métiers. L’argument utilisé pour convaincre les familles et les jeunes est la mise en avant d’un taux d’insertion meilleur dans l’emploi à 7 mois par rapport à la voie scolaire. Cette donnée brute ne tient pas compte des taux de rupture et d’abandon qui avoisinent en moyenne 30 % ni du capital d’autochtonie [10] qui favorise l’embauche des apprenti·es et biaise l’indicateur à court terme. De plus, d’après les taux d’insertion dans l’emploi à 5 ans, les jeunes issu·es du cursus scolaire sont tout autant inséré·es que les apprenti·es.
Le développement de l’apprentissage au sein de l’Éducation nationale accroît les logiques de tri à l’œuvre dans l’École et de mise en concurrence des voies de formations. Contrairement aux idées reçues, ce sont les meilleur·es élèves qui décrochent un contrat d’apprentissage, pas les plus en difficultés scolaires. L’apprentissage est une voie discriminante. Les plus vulnérables face à l’emploi ne parviennent pas à décrocher un contrat de travail, condition préalable pour y accéder. En conséquence, la concentration des difficultés sociales et scolaires s’accroît dans les classes des lycées professionnels.
On constate aussi des mutualisations des formations entre l’initial et la formation continue.
Le mixage des publics dégrade les conditions de travail des équipes pédagogiques, qui doivent jongler entre plusieurs calendriers de formation, bousculant les emplois du temps sur l’année scolaire et dérivant vers une annualisation du temps de travail. C’est une atteinte directe au statut de PLP. C’est également une méconnaissance grave des besoins des différents publics : on ne forme pas de la même manière un·e adulte qu’un·e adolescent·e.
La FERC-CGT s’oppose au mixage des publics dans les établissements scolaires.
Les contraintes financières ne doivent pas mener à une orientation subie : la FERC-CGT revendique la mise en place d’une allocation d’autonomie pour les élèves, déconnectée de la gratification des stages, ainsi que la revalorisation des bourses.
Le développement de l’alternance et de l’apprentissage dans le supérieur
Jusqu’alors cantonnée aux seuls CAP [11], la réforme Seguin de 1987 ouvre l’apprentissage à tous les niveaux de formation et donc dans l’enseignement supérieur. Il s’est fortement développé récemment. Au 31 décembre 2023, les centres de formation d’apprenti·es accueillent 635 900 étudiant∙es préparant un diplôme de l’enseignement supérieur (contre 576 000 au 31 janvier 2022). Cela représente une hausse de 10 % en un an et de 33 % en deux ans (et 78% entre 2020 et 2022). Près d’un tiers de ces apprenti·es sont inscrit·es en STS (section de technicien supérieur), 16 % en écoles de commerce et 31 % dans diverses autres formations principalement privées [12]. Elles et ils sont dans des formations principalement privées (plus de 60 % des apprenti·es du sup sont dans le privé !).
Les apprenti∙es post-bac sont devenu∙es de la main d’œuvre quasi gratuite pour les entreprises, qui préfèrent désormais embaucher des apprenti∙es plutôt que des salarié∙es en CDI ou en CDD. L’opération s’avère particulièrement avantageuse avec les diplômé·es du supérieur : un·e apprenti·e, en études dans l’enseignement supérieur et donc, qualifié, peut être rémunéré·e à 53 % du SMIC horaire.
Les établissements de l’enseignement supérieur et les organismes nationaux de recherche profitent à leur tour de cette aubaine et utilisent des apprenti·es et des alternant·es sur des postes pérennes au lieu d’embaucher des agentes et agents sur des postes de fonctionnaires.
La FERC-CGT revendique un contrôle par les représentant·es du personnel dans les instances CSA/FS-SSCT ou CSE/CSSCT de la réalité des stages d’apprentissage et d’alternance.
Le sous-financement et la casse de l’université publique ont permis le colossal essor de l’enseignement supérieur privé lucratif. Parcoursup est devenu une vitrine publicitaire pour le privé, prospérant sur fond de laisser-faire et d’absence de contrôle gouvernemental, avec des promesses d’obtenir un « Mastere » ou un « Bachelor », masquant le fait que ces diplômes ne sont en rien reconnus ou homologués par l’Etat. De grands groupes comme Omnes (détenu par le fonds d’investissement britannique Cinven) et Galileo (détenu par le fonds de retraite canadien CPPIB et Téthys, la holding de la famille Bettencourt Meyers) investissent ce marché en rachetant des écoles en France et à l’étranger, en les pressurisant et les revendant une fois avoir réalisé un maximum de profits.
Le succès de l’apprentissage auprès des étudiant·es s’explique en grande partie par leur précarité financière. Il est nécessaire de permettre aux étudiant·es de poursuivre leurs études dans de bonnes conditions.
La FERC-CGT revendique la mise en place d’un salaire étudiant∙e.
La FERC-CGT exige dans l’immédiat l’augmentation des bourses et l’élargissement des critères d’attribution.
Au sein des Instituts Universitaires Technologiques (IUT), le passage du DUT au BUT marque la transition d’un modèle universitaire vers une formation en alternance. La Formation initiale universitaire est ainsi progressivement vidée de sa substance au profit d’un seul modèle, celui de l’alternance. L’étudiant·e devient un ou une étudiant·e-travailleur·se dès la première année de l’IUT, souvent, sans qu’elle ou il ait même acquis les rudiments de la formation générale.
Le programme de formation des IUT, dans le cadre du bachelor, bascule d’un cadrage national à une plateforme pédagogique en partie locale (à hauteur de 25 %) liée aux besoins des entreprises du secteur géographique de tel ou tel IUT.
C’est dire si le principe de « qualification » est battu en brèche au profit de compétences floues. C’est dire si la capacité de la ou du travailleur·se à évoluer professionnellement est remise en question au profit d’employabilité.
La FERC-CGT revendique
- Le retour au principe d’une formation initiale comme modèle principal, seul gage de la qualité universitaire des diplômes.
- Des budgets d’IUT et de formation universitaire en général, à hauteur des besoins (qu’il s’agisse d’encadrement pédagogique, de personnels administratifs et techniques).
- Une formation en alternance qui ne soit pas le modèle unique, et qui soit dégagée des pressions patronales, qui permette aussi aux alternant·es d’être de vrai·es travailleur·ses (respect de leurs qualifications à venir, de tous leurs droits de salarié·es). Cela passe notamment par l’abandon de l’approche par compétences, par une formation au code du travail et une sensibilisation aux droits syndicaux au sein de l’entreprise.
Aide à l’apprentissage : un effet d’aubaine pour les entreprises
Cette réforme s’est accompagnée d’une politique d’aide financière massive aux entreprises pour les contrats en alternance. Entre 2019 et 2022, le nombre de contrats d’apprentissage a plus que doublé en France pour atteindre 837 000 en 2023, la dépense nationale pour l’apprentissage s’élevant à 25 milliards € cette année-là. L’apprentissage s’est particulièrement développé dans le supérieur. Les formations privées ont englouti la plus grosse part du gâteau : 84 % des formations en apprentissage sur Parcoursup sont des formations privées. Le pouvoir politique a choisi de rediriger l’argent de l’éducation et de la formation professionnelle afin de favoriser une employabilité accrue des élèves, des apprenant·es ou stagiaires, souvent au détriment de la qualité de la formation et de l’éducation. Cet effet d’aubaine a créé des dérives avec des « emplois » occupés par une succession d’apprenti·es et de stagiaires au détriment du marché des jeunes diplômé·es. L’État se félicite d’avoir atteint un nombre record de contrats, mais le chômage des jeunes de moins de 25 ans est resté au même niveau entre décembre 2019 et décembre 2022. La distribution de primes sans régulation a permis aux entreprises de tester et de relancer le dispositif d’aide autant de fois qu’elles le souhaitaient et de créer ainsi un turn-over de l’alternance grâce à la période d’essai et une main d’œuvre gratuite ou quasi gratuite pour le patronat, sans contrôle ni contrepartie.
Entreprise : un lieu de formation discriminatoire
L’apprentissage repose sur la recherche d’un contrat de travail, on retrouve donc en entrée de l’apprentissage toutes les discriminations à l’embauche. Loin d’être un dispositif d’accueil pour les élèves rejeté∙es par l’école, il introduit un nouveau filtre de sélection déplacé en amont même de la formation. En effet, 30 % des élèves de LP sont des jeunes recalé·es de ce dispositif, jeunes les plus vulnérables face à l’emploi [13] qui ne parviennent pas à décrocher un contrat, condition préalable pour accéder à l’apprentissage : 42 % des recalé·es (pour 30 d’élu·es) sont issu·es de l’immigration ; 58 % des recalé·es (pour 46 % d’élu·es) sont issu·es de la « classe » populaire paupérisée. Un même processus s’observe pour les filles. Bien qu’elles expriment quasiment le même intérêt que les garçons pour ce dispositif (52 % contre 54 %), seul un peu plus d’un tiers des filles deviennent apprenties (36,5 %) contre la moitié des garçons (49,5 %) [14].
Loin de se concentrer sur le premier niveau de qualification, sur les jeunes les plus fragilisé·es face à l’emploi, l’apprentissage favorise celles et ceux qui sont les mieux loti∙es pour obtenir un diplôme et s’insérer sur le marché du travail.
Entreprise, un lieu de formation dangereux
Contrairement aux préjugés libéraux, l’entreprise n’est pas un lieu de formation initiale. Poussée par une logique de rentabilité, l’entreprise ne prend pas le temps de bien former. Elle est un lieu dangereux pour les stagiaires et apprenti·es, souvent mineur·es, moins en mesure de se défendre. De plus, la situation d’évaluation ajoute une vulnérabilité.
Les études montrent une surreprésentation des apprenti·es dans les accidents du travail. En 2019, l’Assurance maladie a recensé 10 301 accidents du travail d’apprenti·es (1 par heure). À cela s’ajoutent 3 110 accidents de trajet. Au total 15 mort·es dont 12 sur les trajets ! Les apprenti·es représentent 50 % des accidents de travail des salarié·es de moins de 20 ans.
Cela n’est pas lié à des conduites à risques, mais bien aux conditions de travail. « Les jeunes sont bien mieux formés, ils connaissent bien les mesures de protection. Mais quand ils arrivent au travail, ils se heurtent à une impossibilité de mettre en application ce qu’ils ont appris à l’école, du fait des injonctions de rentabilité de l’entreprise » [15].
De même, les études alertent sur une surexposition des apprenti∙es et des stagiaires aux produits CMR [16]. Les activités confiées, aux apprenti·es et aux stagiaires, comme par exemple, le nettoyage de zones empoussiérées en menuiserie, les colorations en coiffure ou le dégraissage de pièces en mécanique sont souvent à risques [17].
La FERC-CGT revendique une vraie formation des stagiaires et des apprenti·es à leurs droits dans l’entreprise au regard du code du travail, des risques liés au travail, des VSST. Cette formation doit notamment leur permettre d’identifier les acteur·ices de la protection des salarié∙es : inspection du travail, représentant·es des personnels, syndicats.
Les entreprises représentent pour des mineur·es un lieu avec un risque accru de Violence Sexistes et Sexuelles. Il n’y a pas d’enquête officielle ou de données en France sur les violences sexistes et sexuelles sur les apprenti·es, mais l’étude du syndicat Suisse UNIA est alarmante [18] : sur 800 apprenti·es au début de 2019, 33% des personnes interrogées ont déjà été harcelées sexuellement sur le lieu de travail.
La FERC-CGT revendique des enquêtes statistiques annuelles la DEEP et la DARES sur les VSST dont sont victimes les stagiaires et les apprenti·es.
La FERC-CGT revendique un accompagnement des stagiaires et des apprenti·es ayant subi des VSST.
La FERC-CGT exige un tutorat constant des apprenti·es, jeunes en contrat de service civique. La FERC-CGT rappelle que la/le jeune ne doit pas remplacer un·e salarié·e. En cas d’absence de la/du tuteur·ice (télétravail) la/le jeune doit disposer d’un tutorat opérationnel ou ne pas être en structure.
La FERC-CGT exige que la/le stagiaire, jeune employé·e en CIVIS dès le début de son contrat, soit informé·e par écrit et en entretien, des possibilités de recours à la médecine du travail et dispose des numéros alerte harcèlement.
Dans le plan du ministère du Travail « pour la prévention des accidents du travail graves et mortels 2022-2025 » (mis à jour en avril 2024), deux mesures sur les jeunes sont indiquées :
• « Intégrer un volet santé et sécurité au travail dans les conventions de stage des élèves dans le cadre des périodes de formation en milieu professionnel ». [19]
Pour les apprenti·es, le plan prévoit une mise en place d’un volet Santé Sécurité au moment de la signature de la convention tripartite annexée au contrat d’apprentissage, « sur la base d’une incitation des CFA ».
• « Organisation d’un temps dédié à la prévention des risques professionnels en direction des jeunes en formation. A l’occasion de la semaine de préparation à l’arrivée en milieu professionnel, obligatoire pour les élèves stagiaires des lycées professionnels, sera organisée un temps dédié à la prévention des risques professionnels, adaptable selon les métiers concernés » [20].
La FERC-CGT exige que ces mesures, qui sont théoriquement en place depuis 2022, soient réellement mises en œuvre, que le volet santé et sécurité soit un document spécifique, avec l’ajout de la prévention des VSST.
La FERC-CGT revendique que ces mesures ne reposent pas sur l’incitation des CFA, mais deviennent obligatoires.
Durant le temps dédié à la prévention des risques professionnels, les stagiaires et les apprenti·es doivent bénéficier d’une demi-journée de formation sur les VSST animée par des personnes formées.
La pression des semaines pour la validation des diplômes et maintenant de la gratification pèse sur les stagiaires et les empêche de dénoncer des situations. Pour desserrer l’étau, nous voulons revendiquer un équivalent du "droit de retrait" pour les stagiaires. Pour pouvoir se protéger, pendant les périodes des PFMP, les élèves doivent bénéficier d’un équivalent au droit de retrait pour danger grave est imminent des salarié∙es. Face à des situations de VSST ou de dangerosité, les élèves doivent pouvoir alerter et être mis·es rapidement en sécurité, sans perde de gratification et sans rattrapage de semaines de stages pendant les vacances.
La FERC-CGT revendique pour les stagiaires un équivalent du « droit de retrait » des salarié∙es, avec maintien de la gratification et une dérogation légale sur les semaines de stages qui ne pourraient pas être faites.
Les Écoles de production
Ces établissements, à l’origine catholiques hors contrat, ou encore en lien avec les entreprises et leurs branches professionnelles, proposent sur un même lieu, des formations théoriques et une mise en pratique en plaçant l’élève en situation de production proche du monde du travail. Dans ces structures la production est vendue, mais l’élève n’est pas rémunéré·e.
Cette main d’œuvre gratuite, corvéable à merci sous couvert de formation, est présentée comme de "l’apprentissage intégré".
Le gouvernement en fait un outil de sa politique d’adequationnisme radical. Il veut les développer en renforçant, en plus de la défiscalisation de fonds privés via le mécénat, le financement public de ces établissements privés. Les collectivités territoriales (régions, métropoles, communautés de communes, municipalités…) arrosent aussi ces structures, au détriment des Lycées professionnels.
Longtemps restées marginales et surtout non reconnues par l’État, les écoles de production connaissent depuis la Loi LCAP une croissance exponentielle, d’une vingtaine en 2018, elles sont 69 en octobre 2024.
Les rapports d’inspection, quand ils existent, font parfois état de manquements graves en matière de sécurité et de conformité à la réglementation, et dans la grande majorité des cas ils font le constat d’importantes insuffisances pédagogiques.
La FERC-CGT exige la suppression des écoles de production.
La FERC-CGT demande la fin du financement public de ces structures et le re-fléchage des budgets vers les Lycées professionnels.
Dans l’immédiat, la FERC-CGT demande un suivi de ces écoles, des visites d’inspection et des bilans réalisés par des inspectrices et des inspecteurs de l’Éducation nationale et par l’inspection du Travail.
Renforcer les droits des salarié∙es à la formation continue et à la qualification
La formation professionnelle continue et l’éducation permanente doivent être accessibles à toutes et à tous, quels que soient l’âge, le genre, le niveau d’étude, la période de la vie, l’emploi occupé et la taille de l’entreprise et sur tout le territoire.
La FERC-CGT revendique un véritable droit à la formation professionnelle continue sur le temps de travail, une égalité d’accès de toutes et tous, l’acquisition d’une période correspondant à 10 % du temps travaillé pour se former, la gratuité totale pour l’usager·e. Cette formation réalisée sur le temps de travail doit être rémunérée comme telle.
Portable et transférable comme les autres droits prévus par la Sécurité sociale professionnelle, exigée par la CGT, le droit à la formation doit rentrer dans le cadre de droits attachés à la personne et garantis collectivement dans un système par répartition avec des fonds dédiés suffisants, permettant de garantir l’effectivité de ces droits.
Les demandes de formation relèvent du choix de chacun·e, sans que les hiérarchies puissent y poser un veto. Par ailleurs, l’employeur·se ne doit pas se soustraire à son obligation de formation.
Le maillage territorial doit permettre une offre de formation diversifiée et de proximité. L’Afpa a fonctionné, avec succès, sur ce modèle de 1946 à 2004, démontrant à la fois son efficacité sociale et sa performance économique.
Pour une formation continue de qualité : sortir des logiques d’appel d’offres et construire un service public de la Formation Continue
Les Conseils Régionaux, France Travail et les OPCO [21] fonctionnent principalement par appel d’offres, privilégiant le cout de la formation au détriment de la qualité de la formation (notamment pédagogique) et de l’accompagnement. Les organismes publics (Afpa, CNAM, GRETA, SUFA [22], CRP [23], CREPS [24] et écoles nationales jeunesse et sport …) de formation professionnelle se trouvent mis en concurrence entre eux et avec les organismes privés. Cette mise en concurrence avec le coût comme premier critère de sélection dégrade la qualité du service rendu et fragilise les organismes de formation. Le gouvernement sacrifie des outils publics complémentaires (AFPA, GRETA…) sur l’autel de la marchandisation de la formation. Pour baisser les coûts, on assiste à une gestion à court terme et à une précarisation des personnels et au développement des formations en distanciel quand ce n’est pas sur des plateformes comme pour les modules de langues.
La FERC-CGT exige le non-financement des formations 100 % distanciel asynchrone. À défaut de couverture de l’ensemble du territoire : financement des formations distanciel synchrone (maximum 20 % d’asynchrone : travaux en sous-groupe…) répondant aux difficultés d’accessibilité ou de mobilité des publics.
Par exemple, dans les GRETA, initialement, les personnels étaient des enseignant·es titulaires bénéficiant de postes gagés donc « détachés ». Au nom de la concurrence libre et non faussée, le Conseil d’État a interdit aux GRETA de fonctionner avec des personnels payés sur le budget de l’État. Les postes gagés ont donc disparu petit à petit et des contractuel·les les ont remplacés. Seul·es restent rattaché·es aux rectorats les Conseiller·es en Formation Continue (CFC). Aujourd’hui, les personnels des GRETA sont très majoritairement des agent·es de l’État, contractuel·les de droit public, mais la reconnaissance d’agent·es de l’Éducation nationale ne leur est plus acquise. Pour braver la concurrence et gagner en souplesse, nous constatons un recours de plus en plus massif à la sous-traitance (notamment par des auto-entrepreneur·ses) plutôt qu’à l’embauche dans les GRETA. Cette réalité se retrouve dans un grand nombre d’organismes de formation et dégrade la qualité de la formation.
Autre exemple, l’Afpa subit une baisse régulière de ses effectifs et n’a pas le financement nécessaire pour son plan de transformation. Les salarié∙es de l’Afpa doivent s’adapter à marche forcée, souvent sans formation préalable, pour être opérationnel·les simultanément sur plusieurs champs : polyvalence de formation, multiplication des modalités pédagogiques, glissement des taches de l’accompagnement vers la formation et inversement... Cela entraine une densification du travail et une dilution des métiers de la formation, et dégrade à la fois la qualité du travail et le service rendu aux stagiaires.
Dans l’enseignement privé, pour la formation pour adultes on assiste également au recours abusif à des micro-entrepreneurs et au CDDU [25] qui en précarisant les travailleur·ses ont le même effet de dégradation de la qualité de la formation.
La FERC-CGT revendique la reconnaissance professionnelle des personnels du secteur des GRETA avec un titre de formation professionnelle d’adulte (niveau 6 - Bac +3) et un statut de fonctionnaire d’État.
La FERC-CGT revendique la fin de la politique d’appel d’offres. La formation continue doit être sortie des logiques de marché. Elle doit répondre aux besoins sociaux et environnementaux. Le financement doit permettre de répondre aux besoins des stagiaires et viser l’élévation de leurs qualifications.
La FERC-CGT revendique l’utilité sociale de la formation professionnelle qualifiante pour les privé·es d’emploi et son efficacité économique. Le retour à l’emploi permet de recouvrer pour tout·e individu·e sa dignité et une place dans la société.
La FERC-CGT revendique la mise en place un plan d’investissements pluriannuels permettant de rénover et d’isoler les bâtiments, de mette aux normes, de rénover les hébergements et de déployer des énergies renouvelables.
La FERC-CGT revendique que les services associés (hébergement, restauration…), indispensables au bon déroulement de l’accompagnement et des formations, soient intégrés au service public de la formation professionnelle.
Le maillage territorial doit être renforcé pour assurer un égal accès à la formation professionnelle.
La FERC-CGT revendique des plans massifs d’embauche et de résorption de la précarité des travailleur·ses de la formation professionnelle.
La FERC-CGT revendique le respect du cadre d’emploi défini dans les fiches de poste construites à partir de la qualification, la classification et sa juste rémunération.
Pour sortir de la mise en concurrence généralisée, il est nécessaire de redéfinir précisément les contours (financier, pédagogique) de la formation initiale et de la formation continue.
La formation continue doit être repensée et articulée entre les acteur·ices (GRETA, AFPA, CNAM, CREPS…) dont c’est la mission historique afin de réaliser pleinement leur rôle au service de la promotion sociale.
Un véritable service public de la formation professionnelle pourra offrir à toutes celles et tous ceux que le système scolaire a délaissé une « seconde chance » permettant pour chaque individu·e en dehors du système scolaire, une orientation, une formation à une qualification reconnue, une insertion ou une reconversion, le cas échéant, réussie.
La FERC-CGT revendique la création d’un grand service public de formation professionnelle continue, d’insertion, d’orientation et de certification, articulé autour des organismes publics existants tels que AFPA, CNAM, GRETA, CMAR, CRP... Il doit être élaboré et piloté par l’État pour éviter les inégalités sur le territoire et mis en œuvre par les services déconcentrés de l’État.
De nouveaux droits pour les salarié∙es
Le découpage des diplômes et certifications en blocs de compétences impose une vigilance. L’acquisition de tous les blocs de compétences est nécessaire pour obtenir le diplôme ou la certification complète et assurer ainsi aux salarié∙es une réelle chance de pouvoir évoluer professionnellement.
Du DIF au CPF : un droit individuel toujours plus attaqué
Depuis 2015, le compte personnel de formation (CPF) remplace le droit individuel à la formation (DIF). Ce droit est régulièrement attaqué, comme en 2018, avec la monétisation du CPF. En 2023, le gouvernement avait annoncé la mise en place d’une participation minimum pour les salarié∙es de 10 % du montant de la prise en charge de la formation. Au final, il a annoncé par voie de presse et sans aucune concertation, la mise en place d’un reste à charge de 100 €, indexé sur l’inflation, avec de nombreuses exceptions qui complexifient l’accès au CPF. Ce reste à charge éloigne encore plus les salarié∙es les plus fragiles de l’accès au CPF.
Pour les salarié∙es du privé, la monétarisation du CPF, la conversion du temps en euros, a provoqué une hausse et une dérive des couts de formation. Le CPF est devenu très insuffisant pour financer certaines formations choisies, de qualité et qualifiantes.
Le CPF est attaché à la/au salarié∙e, il doit donc être à sa disposition, et non celle des employeur·ses. Chaque salarié·e doit pouvoir disposer de son CPF comme elle/il l’entend (y compris pour des formations non professionnalisantes), il peut très bien décider de s’en servir lors d’un cofinancement avec sa/son employeur·se pour se former, mais elle/il doit être seul·e décideur·se de cette utilisation.
Dans la Fonction Publique, y compris pour les contractuel·les, l’utilisation du CPF est soumise à l’autorisation de l’administration. Il n’y a pas de campagne d’information. Il n’est donc pas un droit des salarié·es. De plus, des plafonnements limitent la libre utilisation du CPF. Dans l’Éducation Nationale, par exemple, la prise en charge financière est assujettie au double plafonnement : 25 € TTC du coût horaire de formation et 1 500 € TTC par agent·e et par année scolaire.
Pour la FERC-CGT, la formation professionnelle des salarié∙es doit être réalisée sur le temps de travail et rémunérée comme tel.
La FERC-CGT revendique dans le public et dans le privé, un droit individuel à la formation, à l’initiative du salarié∙e, transférable, garanti collectivement et financé par les employeur·ses.
La FERC-CGT s’oppose à la monétisation du CPF et à la mise en place d’un reste à charge. La FERC-CGT revendique un retour à des crédits d’heures dans un volume permettant une formation qualifiante.
Le bilan de compétences
Le recours au bilan de compétences peut s’effectuer désormais par plusieurs voies :
- À l’initiative de la ou du salarié·e directement sans accompagnement particulier ; en articulation avec le conseil en évolution professionnelle (CEP).
- Avec l’accord de son employeur·se, notamment suite à un entretien professionnel, à l’initiative de l’employeur·se.
L’employeur·se peut proposer à la ou au salarié·e de réaliser un bilan de compétences, notamment à la suite d’un entretien professionnel, afin de déterminer avec elle ou lui ses besoins de formation au regard des objectifs de l’entreprise et aux évolutions prévisibles de l’organisation du travail.
L’utilisation du CPF pour financer le bilan de compétences conduit souvent à arbitrer entre suivre une formation ou faire un bilan de compétences. C’est pourquoi la FERC-CGT revendique un financement spécifique du bilan de compétences et un congé pour le bilan de compétence.
Le service public de formation professionnelle continue que la FERC-CGT revendique doit comporter un volet information et accompagnement à la formation.
La FERC-CGT met en garde contre l’existence de nombreux organismes peu scrupuleux qui proposent sous l’appellation « bilans de compétences » des prestations pouvant sembler intéressantes d’un point de vue financier, mais qui ne respectent pas les critères d’un bilan (contenu, durée, synthèse…).
La validation des acquis de l’expérience (VAE)
Mise en place en 2002, la validation des acquis de l’expérience (VAE) permet à un·e travailleur·se de valider son expérience professionnelle pour obtenir un diplôme délivré par l’État.
La VAE permet de faire reconnaître l’expérience (salarié∙es, non salarié∙es et bénévoles, militant∙es syndicale·aux) afin d’obtenir un diplôme, un titre, un certificat de qualification professionnelle ou un ou plusieurs blocs de compétences d’une certification professionnelle obligatoirement inscrite au Répertoire national des certifications professionnelles (RNCP).
Au fur à mesure des réformes, la notion d’expérience se dilue. La durée minimum d’expérience de 3 ans est abaissée à 1 an, avec une prise en compte des périodes de mise en situation de milieu professionnel (PMSMP). En 2022, elle est simplement supprimée et remplacée par un "entretien préalable centré sur l’analyse du parcours du candidat, de ses compétences et de son projet professionnel".
L’expérimentation de VAE inversée consiste à proposer un parcours de formation en situation de travail et sa reconnaissance par une certification professionnelle. L’objectif assumé du gouvernement, avec la "VAE inversée" en ouvrant la VAE par exemple aux proches aidant·es est d’abord de certifier partiellement, voire très partiellement, des personnes susceptibles de travailler immédiatement dans des secteurs en tension, notamment du sanitaire et social.
Pour la FERC-CGT, la VAE doit rentrer dans un processus d’obtention d’une certification complète. L’obtention de blocs de compétences ne doit pas devenir la finalité universelle de la VAE. La CGT reste très attachée au fait que les personnes doivent pouvoir obtenir un diplôme complet et que tous les savoirs et savoir-faire d’une certification sont nécessaires à la réalisation d’un métier.
Pour la FERC-CGT la VAE/VAP doit être réalisée sur le temps de travail et rémunérée comme telle. Les frais pédagogiques et frais d’accompagnement en VAE sont pris en charge par l’employeur·se.
L’obtention d’une certification bénéficie à la ou au salarié·e, mais aussi à l’entreprise. Celle-ci doit, à ce titre, contribuer à son financement, aider à sa mise en œuvre, et assurer sa reconnaissance.
Pour se préparer et passer devant le jury, la ou le salarié·e a la possibilité de demander un congé VAE d’une durée maximum de quarante-huit heures, consécutives ou non. Ce congé permet à la ou au salarié·e de participer aux épreuves de validation, mais aussi à l’accompagnement à la VAE. Cette durée est insuffisante au regard des attendus d’écrits pour la certification. Elle défavorise les niveaux 3 et 4 ainsi que les personnes ayant un faible niveau rédactionnel.
En juillet 2023, le site « France VAE » est créé. Présenté comme un service public, « France VAE » devient l’espace numérique unique pour se renseigner, être accompagné·e et effectuer toutes les démarches nécessaires pour entamer une VAE. Depuis le mois de juillet 2023, plus de 50 acteur·ices institutionnel·les de la VAE, parmi lesquel·les les Régions, les certificateur·ices, branches professionnelles et France-Travail, se sont positionné·es sur la plateforme, point d’entrée unique pour s’informer, effectuer les démarches administratives et bénéficier de l’accompagnement d’un·e professionnel·le, appelé·e désormais « Architecte Accompagnateur de Parcours (AAP) ».
« France VAE » concernait près de 300 certifications dans des domaines en tension (métiers du soin et de l’accompagnement de la personne, insertion sociale, industrie, logistique, entrepreneuriat), pour des niveaux de diplômes allant du CAP au niveau 7. Faute de financement de l’État, la plateforme France VAE a subi un coup d’arrêt en juillet 2024 et ce ne sont plus que 24 certifications qui sont concernées par le dispositif dans le domaine de l’accompagnement des personnes.
L’accès et l’accompagnement à la VAE doivent devenir gratuits pour la ou le salarié·e.
La FERC-CGT revendique un véritable accompagnement, professionnel, de qualité et gratuit. La FERC-CGT est favorable à la création d’un guichet unique sous forme de Service public, avec des agent·es du Service public au contact des usager·es.
La FERC-CGT s’oppose à la forme actuelle avec un système non réellement public et qui n’est qu’une plateforme numérique.
Les certificats de qualification professionnelle CQP
Un certificat de qualification professionnelle (CQP) permet de faire reconnaître les compétences et savoir-faire nécessaires à l’exercice d’un métier. Un CQP est créé et délivré par une ou plusieurs commissions paritaires nationales de l’emploi (CPNE) de branche professionnelle.
Certains CQP ne sont reconnus que dans les seules entreprises ou dans la/les branches concerné·es.
Depuis le 1er janvier 2019, l’enregistrement au répertoire national des certifications professionnelles (RNCP) des CQP permet l’attribution d’un niveau de qualification, à l’instar des diplômes et titres à finalité professionnelle enregistrés à ce même répertoire. Les titulaires de ces CQP enregistrées au RNCP peuvent les faire valoir auprès d’entreprises d’autres branches que la ou les branches porteuses du CQP.
Les CQP, concurrencent les diplômes d’État du sport ou de l’animation par exemple. Ils ouvrent un quasi-marché aux acteur·ices privé·es d’un secteur professionnel.
Nous observons que des certifications apparaissent...puis disparaissent du RNCP, laissant le titulaire du titre avec une certification qui n’est plus renouvelée par l’organisme qui l’avait initié. En fait, les certifications apparaissent et disparaissent essentiellement en fonction du taux de remplissage. L’hypothèse sous-jacente de la/du législateur·ice est que le "marché" de la formation se régulerait ainsi vertueusement en fonction du succès commercial ou non des dispositifs de formation.
Cet organisme, titulaire d’un titre, peut ensuite contractualiser avec d’autres organismes pour confier l’organisation du dispositif par un centre de formation tiers. Cela constitue ainsi un marché en soi, source de profit. C’est par exemple ce qui a favorisé l’explosion de la bulle de l’enseignement supérieur privé lucratif. Le contrôle de l’effectivité de l’acquisition des savoirs, et donc de la qualité du dispositif est confié à l’organisme de formation initiateur et titulaire du titre professionnel inscrit au RNCP, avec toutes les dérives possibles et les limites de Qualiopi déjà évoquées.
La FERC-CGT revendique le fait que la priorité doit être de pouvoir obtenir un diplôme ou un titre à valeur nationale.
La FERC-CGT exige que les titres école ne soient pas dénommés titres professionnels (donne une valeur nationale et trompeuse quant au lien tutélaire du ministère du Travail).
Le « plan de développement des compétences » - PDC
Le « plan de développement des compétences » constitue l’une des voies d’accès des salarié·es à la formation professionnelle dans l’entreprise. Le plan concerne toutes et tous les salarié·es de l’entreprise, titulaires d’un contrat de travail (à durée indéterminée, à durée déterminée, à temps partiel, en apprentissage et en contrat de professionnalisation) sauf les travailleur·ses intérimaires qui dépendent de l’entreprise de travail temporaire. Ce document formalise l’ensemble des actions de formation, de bilans de compétences et de validation des acquis de l’expérience que l’employeur·se a décidé de mettre en œuvre de sa propre initiative ou à la suite des propositions des représentant·es du personnel ou des demandes individuelles des salarié·es [26].
L’initiative des choix de formation revient quasi systématiquement à l’employeur·se seul·e. Or cet·te dernier·e fixe également les priorités de l’entreprise. Elle ou il utilise alors la formation pour répondre aux besoins à court terme qu’elle ou il a déterminés.
Toute action de formation doit conduire à une reconnaissance de la qualification acquise et à une progression de salaire.
C’est pourquoi, afin que les formations répondent mieux aux besoins des salarié·es, en termes de développements personnel et professionnel, et à ceux de l’entreprise pour répondre aux évolutions des métiers, le « plan de développement des compétences » devrait être décidé par la négociation et le comité social et économique (CSE) devrait contrôler sa mise en œuvre ceci quel que soit le nombre de salarié∙es.
Rendre obligatoire, la création d’une commission formation dans toutes les entreprises quel que soit le nombre de salarié∙es.
Dans le cadre des négociations obligatoires sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP), il faut exiger la reconnaissance des évolutions professionnelles des salarié∙es.
La négociation de la GEPP/ GEPC (gestion des emplois et des parcours professionnels) réservée aux établissements de plus de 300 salarié∙es devrait être étendue à l’ensemble des entreprises afin de faciliter le parcours professionnel des salarié·es.
Salaires, qualification vs Compétences
Découpage en bloc de compétences
« D’un côté, [les employeurs] réclament plus de flexibilité, plus de facilité pour rompre un contrat, et dans le même temps rechignent à donner aux salariés les moyens de cette mobilité, que sont la formation et l’accès à la certification. C’est d’ailleurs en partie pour cela que les entreprises ont promu le modèle de la Compétence qui ne les oblige à reconnaître que la part des savoirs et savoir-faire qu’ils décident, unilatéralement, devoir être mise en œuvre dans l’acte de production. [27] ».
D’abord prévu pour la validation des diplômes par la VAE, le découpage des diplômes est en train de se généraliser. En effet, la loi LCAP a rendu obligatoire le découpage en bloc de compétence pour l’inscription d’un diplôme au RNCP [28].
Pour la FERC-CGT, chaque individu·e doit acquérir une qualification professionnelle et une certification reconnue nationalement, inscrite au répertoire national des certifications professionnelles et garantissant la valeur nationale des diplômes et des titres.
Ainsi, pour la FERC-CGT, les diplômes nationaux et les titres doivent être l’unique base garantissant les grilles salariales des conventions collectives et des statuts.
La FERC-CGT revendique la fin de ce système des blocs de compétences qui n’a ni signification pédagogique ni intérêt professionnel et attaque les droits des travailleur·ses.
Renforcer l’articulation formation, diplômes et convention collective
Nombreuses sont les conventions collectives qui hélas ne reconnaissent pas les qualifications ou ne s’appuient même pas sur une indication de diplômes. Le poste de travail prime sur le métier et la qualification.
L’exemple de la Nouvelle Convention collective de la métallurgie : une attaque supplémentaire contre la formation ! Depuis le 1er janvier 2024, la nouvelle convention collective de la métallurgie est entrée en application. Le changement fondamental concerne la classification. Elle n’est plus en lien avec les qualifications de la/du salarié∙e, mais elle est désormais attachée au poste de travail. Un∙e salarié∙e pourrait ainsi voir sa classification, et donc son salaire, diminuer à la suite d’un changement d’emploi dans l’entreprise.
La détention d’un diplôme ne génère même pas de droit à un classement minimal, mais n’intervient qu’à titre indicatif. Seule la CGT a refusé de valider cette nouvelle classification présentée par le patronat de la métallurgie (l’UIMM) comme un « dispositif conventionnel au service de la compétitivité ». L’importance de l’influence de l’UIMM dans le MEDEF peut faire craindre que cette nouvelle convention collective ne s’étende à d’autres branches…
La FERC-CGT défend la qualification, sa validation dans des diplômes et des titres, et sa reconnaissance dans les conventions collectives. La FERC-CGT défend le retour à une hiérarchie des normes.
Nos interventions dans les structures territoriales de la CGT peuvent aussi aider à cette bataille des idées. À ce titre, nous devons proposer des candidatures de camarades issu·es de la FERC dans les instances nationales et régionales qui traitent de la formation.
La formation professionnelle est un élément de la revendication d’une sécurité sociale professionnelle que revendique la CGT.
La formation professionnelle doit être un outil d’émancipation, c’est un en enjeu pour l’ensemble des salarié∙es. La FERC doit porter son projet avec l’ensemble de la CGT.
[1] Les 21 OPCA "Organisme Paritaire Collecteur Agréé" en charge de collecter les obligations financières des entreprises en matière de formation professionnelle ont été remplacé le 1er avril 2019 par 11 opérateurs de compétences (OPCO)
[2] Les commissions professionnelles consultatives (CPC) émettent des avis conformes sur la création, la révision ou la suppression de diplômes et titres à finalité professionnelle et de leurs référentiels, dans le ou les champs professionnels relevant de leurs compétences.
[3] Centre de Formation d’Apprenti·es
[4] Groupements d’établissements (GRETA)
[5] Présentation de l’ouvrage de Prisca Kergoat, De l’indocilité des jeunesses populaires par Lucie Tanguy
Présentation de l’ouvrage de Prisca Kergoat, De l’indocilité des jeunesses populaires | Cairn.info
[6] Fiche repères revendicatifs FERC n°2 : Emancipation et construction des citoyen-nes.
[7] « Accès à la formation : pourquoi souhaiter se former ne suffit pas » ; Céreq Bref, n° 451, Avril 2024
https://www.cereq.fr/acces-formation-professionnelle-souhait
[8] Parcours Y : à partir de la mi-mai, les élèves de terminale Bac Pro de la voie scolaire doivent « choisir » entre des PFMP supplémentaires (gratifiées) ou rester au lycée préparer une poursuite d’études.
[9] Loi 3DS : Différenciation territoriale, Décentralisation, Déconcentration, Simplification
[10] Les apprenti·es sont déjà embauché·es et bénéficient des réseaux et des ressources de leur milieu et de leur entreprise.
[11] CAP certificat d’aptitude professionnelle
[12] "L’apprentissage dans l’enseignement supérieur en 2023", Note flash du SIES ,n° 2024-22, septembre 2024.
[13] Prisca Kergoat, De l’indocilité des jeunesses populaires
[14] Prisca Kergoat, De l’indocilité des jeunesses populaires
[15] Nathalie Frigul (sociologue à l’université de Picardie) [à partir d’une étude de l’insertion professionnelle de jeunes de la voie scolaire] « La protection des jeunes travailleurs reprend le chemin du XIXe siècle » L’humanite.fr
[16] Le terme CMR est issu de la réglementation sur la prévention des risques chimiques. Il est également utilisé pour désigner certains procédés industriels qui ont des effets cancérogènes.
[17] Zoe Rollin, « Sous le vernis des ongles et des capots : les risques du métier : Accepter et banaliser le risque, un processus d’apprentissage » ; Travail, Genre, Société, La Découverte, 2024
[18] Harcèlement sexuel et mobbing à l’apprentissage – Unia, le syndicat
[19] Mesure 2.1 du plan du ministère du Travail « pour la prévention des accidents du travail graves et mortels 2022-2025 » (mis à jour en avril 2024).
[20] Mesure 2.2 du plan du ministère du Travail « pour la prévention des accidents du travail graves et mortels 2022-2025 » (mis à jour en avril 2024).
[21] OPCO : opérateurs de compétences. Ils assurent le financement et apportent un appui technique aux branches. Ils assurent un service de proximité à destination des très petites, petites et moyennes entreprises afin de parvenir à l’amélioration de l’information et de l’accès de leurs salariés à la formation professionnelle.
[22] SUFA : service universitaire de formation par alternance], CMAR[[Chambre de Métiers et de l’Artisanat Régionale
[23] Centres de rééducation professionnelle
[24] CREPS (Centre de Ressources d’Expertise et de Performance Sportive) sont des établissements publics locaux de formation dans les domaines du sport, de la jeunesse
[25] CDDU Contrat à Durée Déterminée d’Usage
[26] Elles ne doivent pas être financées en mobilisant le compte personnel de formation (CPF) des salarié·es concerné·es.
[27] 1971-2021. Retour sur 50 ans de formation professionnelle · Didier Gelot, Djamal Teskouk, Éditions du Croquant, 2021
[28] Répertoire National des Certifications Professionnelles.